L'Horloger aveugle
de Richard Dawkins

critiqué par Oburoni, le 8 avril 2010
(Waltham Cross - 41 ans)


La note:  étoiles
L'évolution et Dieu
"L'Univers m'embarrasse et je ne puis songer / Qu'une telle horloge existe et n'ait point d'horloger". On pense à Voltaire... et bien non ! Dawkins se réfère ici en fait à la métaphore utilisée par William Paley dans son livre "Théologie naturelle", publié 50 ans avant "L'Origine des Espèces" de Darwin. Mais qu'importe la source ! L'idée reste la même. L'argument de l'horloge est simple, tellement simple qu'il en est puissant et, a priori, difficilement contestable -Darwin lui-même y avait succombé avant d'entamer ses travaux. Il va comme suit : si vous trouvez une montre, comme cela, perdue dans la nature, la complexité d'un tel objet vous renvoie à un horloger -un créateur. Idem, donc, si on l'extrapole à la vie sur terre : la complexité du vivant ne peut s'expliquer que par l'existence d'un dessein intelligent -le Créateur Dieu.

Fracassant par sa logique, d'un charme difficile à briser -c'est encore aujourd'hui l'un des bouts de ficelle qui raccroche les religieux de tous bords à leur déité- et pourtant ! Dawkins affirme ici que rien n'est plus faux qu'une telle conception. Merci qui ? Merci Darwin.

Le biologiste anglais reprend l'image à son compte mais qualifie le dit horloger "d'aveugle". Notez bien : l'adjectif a son importance. Bien sûr que la montre n'apparait pas comme cela, plouf plouf, tombée des cieux. Non, il y a tout un mécanisme derrière, des étapes qui se succèdent mais, appliquées au vivant, elles ne signifient pas l'existence d'un Créateur; loin de là. En fait c'est plutôt le contraire. Ce mécanisme, ben oui, c'est l'évolution par la sélection naturelle.

Toujours convaincu qu'on peut prendre Dieu et le rafistoler, tant bien que mal, quelque part dans le processus ? C'est ne pas avoir compris grand chose à la façon dont il fonctionne. Mais pas de panique ! Dawkins est là qui vient nous éclairer. La nature et l'ADN lui inspirent ici un livre devenu l'une de mes Bibles.

Non, la vie sur terre n'a rien à voir avec la chance; et non, la chance n'a pas pour contraire Dieu. Non, la sélection naturelle n'a rien à voir avec un singe tapant du Shakespeare sur une machine à écrire ( le paradoxe du singe savant ) et non la complexité de certains organes ( l'oeil ) ne sont pas les preuves d'un dessein intelligent. Non... j'arrête ou je continue ? Au lieu de s'agiter sur leur chaise j'en pressens beaucoup qui feraient bien d'aller lire ce livre. Pas mal d'idées reçues y partent en fumée.

Avec une passion contagieuse et une patience admirable -parce qu'il en faut pour démonter les foutaises qui circulent sur le sujet !- Richard Dawkins, une fois encore, nous enchante. On se sent comme un petit enfant curieux sur qui le biologiste se serait penché, aurait pris la main, et donné à voir en les pointant du doigt les mille et une merveilles de la sélection naturelle.

Magique.