Le silence des esprits
de Wilfried N'Sonde

critiqué par CHALOT, le 10 mars 2010
(Vaux le Pénil - 76 ans)


La note:  étoiles
une prose poétique sur la détresse et l'amour
Se couler juste un instant dans le délice et l'oubli

L'auteur de ce roman est musicien. Son art transparaît dans son écriture : les phrases construites avec soin se succèdent à un rythme peu banal. Il nous offre là une ballade triste, très humaine et comme le dit l'éditeur dans sa quatrième de couverture : « lumineuse »!
Les xénophobes égarés et chasseurs de sans papier devraient lire cette histoire où le jeune clandestin se confie totalement à cette femme rencontrée par hasard dans un train de banlieue.
Ce jeune africain fuit la misère et la violence pour se réfugier dans le pays des droits de l'homme.
Il a souffert dans sa chair et est devenu un acteur des abominations d'une guerre civile alimentée par des appétits inassouvis.
La misère, l'analphabétisme et la haine dans certains pays africains, c'est une « crise »qui perdure et l'auteur n'y va pas par quatre chemins :
« La crise, elle résistait tranquillement à la démocratie, avec cette désinvolture qui l'avait fait triompher du communisme, de la torture, des maîtres de l'invisible, du tiers monde, du développement et de la coopération. »!
Le jugement porté est sans appel et comme le rappelle le jeune homme à cette femme horrifiée et pleine de mansuétude pour l'une des victimes de ce « formidable » gâchis humain et social : «  les esprits simples pleins d'espoir comme le mien ne s'y retrouvaient plus ».

Peut-on renaître des cendres du passé quand sans papier, sans soutien on se retrouve à la merci de profiteurs de tout genre ou de policiers étendant leurs filets ?

Hier désespéré, Clovis va pouvoir se couler juste un instant dans le délice et l'oubli avec Christelle, cette femme qui va l'écouter, répondre à sa désespérance et l'inviter chez elle.
C'est à la fois un roman dramatique et réaliste et à la fois l'histoire d'un amour profond où l'affection et le désir réciproques vont plonger les deux rescapés de la vie dans le plaisir, à tâtons .
« Comme deux enfants s'en vont pieds nus sur les sentiers, nous étions revenus à l'aube de la déchirure, puis nous nous sommes envolés. »

Jean-François Chalot