Là-haut, tout est calme
de Gerbrand Bakker

critiqué par Grégoire M, le 31 janvier 2010
(Grenoble - 49 ans)


La note:  étoiles
Paysan dans les polders
Helmer van Wonderen est un paysan, vivant seul avec son père, dans une ferme du nord des Pays-Bas, dans les polders où la terre gagnée sur la mer est divisée par de multiples canaux. Il fait preuve d’une colère et d’une froideur de sentiment face à ce père grabataire qu’il a remisé dans une chambre à l’étage, qu’il ne voit plus que pour lui donner à manger, avec qui il limite les discussions à l’essentiel.
On apprendra que son destin est un destin contrarié. Plus jeune, il avait un frère jumeau, le fils préféré, celui qui était destiné à reprendre la ferme. Mais ce frère est mort dans un accident peu avant son mariage et Helmer s’est retrouvé dans le devoir de reprendre la succession.
« Là-haut, tout est calme » est à la fois un portrait d’une grande justesse de son personnage principal, par touches successives, à travers ses rencontres, ses confrontations, son travail et ses menues activités et un portrait de la vie de ces terres du nord se tournant vers le tourisme et où les derniers paysans ne semblent plus là que pour entretenir un patrimoine. C’est aussi un livre sur le poids de la famille, les relations entre frères, père et fils et sur le désir de réalisation de chacun.
La corneille mantelée 10 étoiles

À première vue, il n’y a rien d’attirant. Un roman rural! Avec une couverture ‘clichée’ d’un moulin hollandais et un titre qui suggère déjà l’ennui. Mais, j’aurais commis une grave erreur de m’en tenir à ce mauvais emballage. Car il s’agit d’un roman exceptionnel.

En dépit d’une écriture d’une grande simplicité, l’auteur arrive à transmettre au lecteur une charge émotive étonnante. Le cœur du récit tourne autour d’un personnage d’homme-enfant qui a passé toute sa vie sous le joug d’un père austère et dans l’ombre d’un frère préféré.

À 56 ans, ce paysan oublié par le bonheur, emprisonné dans la monotonie du labeur de la ferme et une homosexualité refoulée, arrive à un point critique de sa vie. Celui où tout ceux autour lui sont disparus et il peut s’offrir enfin la liberté de toute contraintes sociales. Serait-il trop tard ?

Chaque moment d’humanité est amené avec beaucoup de finesse. Bakker nous offre une étude intime de la vie - la jeunesse, le devoir, la vieillesse, la solitude et la mort. Tout est en nuances, une merveille de subtilité et de détails symboliques sans être mièvre ou dépourvu de phrases incisives, « Quand on a une famille, on peut se débarrasser de son père sans remords. »

À lire.

(Prix IMPAC International, Prix des librairies Initiales, Prix des librairies Millepages)

Aaro-Benjamin G. - Montréal - 54 ans - 2 août 2011