Les habits neufs du président Mao - chronique de la révolution culturelle
de Simon Leys

critiqué par Tanneguy, le 13 janvier 2010
(Paris - 84 ans)


La note:  étoiles
Une précieuse réédition
Simon Leys (pseudonyme), citoyen belge né en 1934, après des études littéraires, apprend le chinois, s'installe à Hongkong, où il épouse une Chinoise dont il aura quatre enfants. Il a, à l'époque de la révolution culturelle, entre 30 et 40 ans et , depuis Hongkong, il a accès à toute l'information dont on peut disposer sur les évènements qui se déroulent en Chine, mais surtout il sait l'interpréter.

En 1970, alors qu'il part s'installer avec sa famille en Australie, il décide de mettre en ordre ses documents et de les publier dans un texte de 350 pages qui fera l'objet de nombreuses rééditions, la dernière date de 2009... Elle était attendue !

Rappelons-nous cette époque : mai 68 en France, le "printemps de Prague", une Chine fort peu connue à l'Ouest, ce qui n'empêche pas nos intellectuels de porter au pinacle le régime "éclairé" du Président Mao. Simon Leys va jeter un pavé dans la mare en dénonçant "les purges sanglantes des années 50... la gigantesque famine créée par Mao au début des années 60... et le désastre humain de la Révolution Culturelle". Inutile de dire qu'il ne s'attira pas la sympathie de nos soixante-huitards ! Une émission mémorable en 1983 opposa Simon Leys à Maria-Antonietta Macchiocchi sur le plateau d'Apostrophes de Bernard Pivot.

Le document initial comprend tout d'abord une mise en perspective des évènements qui déclenchèrent la Révolution Culturelle : pour l'auteur il s'agissait de la reprise du pouvoir par Mao, qui avait été progressivement mis à l'écart par le Président de la République Liu Shao Qi, en organisant des troubles violents contre l'appareil du Parti, les travailleurs, et l'armée.

Puis l'auteur nous propose une chronique au jour le jour des évènements entre 1967 et 1969, basée sur les journaux, la radio, les entretiens personnels. Ce n'est pas toujours facile à lire, car on ne connaît pas forcément en détail les nombreuses personnalités impliquées mais de nombreuses notes et notices biographiques guident le lecteur. De plus les compléments des éditions successives permettent de faire le lien avec la situation actuelle en Chine. A chacun de se faire une opinion sur l'avenir...

Une référence essentielle à lire et à méditer !
L'Occident dupé par la Chine 6 étoiles

Simon Leys connaît le chinois et nous dit que les traductions des articles du parti communiste en langues européennes disent tout autre chose que les textes originaux à l'usage des Chinois. Et il se gausse des Occidentaux qui se sont laissés berner par ces traductions au point d'encenser Mao Zedong et sa révolution Culturelle.

Ce livre m'a intéressé par sa documentation très complète et très précise, quoique trop bourrée de noms chinois impossibles à retenir. Il nous montre ce qu'a été la révolution Culturelle : une formidable lutte de Mao, pour reprendre le pouvoir contre le parti communiste qui, après coup, n'a pas osé toucher à l'image tutélaire de son Président Mao.

Mais j'ai été un peu déçu, je m'attendais à autre chose. Je croyais trouver une biographie de Mao, re-située dans son temps. En réalité, le portrait de Mao n'est que rarement ébauché et, à peu près rien n'est dit de son action pendant la dernière guerre, ni de sa vraie révolution dans les années 20 à 50, ni du « grand bond en avant »... L'auteur ne parle que de ses comptes-rendus et de ses commentaires sur les communiqués officiels du parti, lors de la reprise du pouvoir par Mao, durant les années 67 – 68 – 69.

Les quelques lignes qui décrivent le personnage de Mao, dans l'introduction – qui fait quand-même 60 pages – le présentent comme un utopiste, disciple de Confucius, poète et rêveur, peut-être sincère quand il a commandé le plus grand massacre de tous les temps... pour l'avènement des jours meilleurs !
Ce qui m'a donné l'envie d'en savoir plus sur ce curieux personnage de l'Histoire du XXème siècle.

Saint Jean-Baptiste - Ottignies - 88 ans - 12 janvier 2015


Un grand esprit 10 étoiles

J'ignorais l'existence de cette réédition, m'en tenant à la première édition. Ce livre a fait l'effet d'un tsunami dans les rangs - au sein desquels Madame Macchiocchi, dont Tanneguy a raison de rappeler la piteuse figure lors de la fameuse émission d'Apostrophes - des maoïstes inconscients. Bernard Pivot, dans une récente chronique du Journal du Dimanche, a écrit que Simon Leys était l'un de ses invités qui l'ont le plus marqué. S'il est parfois un peu trop détaillé, cet exercice de lucidité intellectuelle est une leçon à déguster, un peu à la manière de ceux de Camus.

Falgo - Lentilly - 84 ans - 14 janvier 2010