Le miracle de San Gennaro
de Sándor Márai

critiqué par Monito, le 2 novembre 2009
( - 51 ans)


La note:  étoiles
Voir Assise sous un autre jour et espérer Naples
Quelques années après le second conflit mondial, Sándor MÁRAI nous donne à voir de cette Italie défaite la vie de Napolitains tous pauvres, tous hauts en couleurs, tous si généreux dans leur solidarité, dans leurs colères, dans leurs excès et dans leurs différences.

Avant l’exil américain Sándor MÁRAI a manifestement largement aimé son séjour italien.

Introduction à deux confessions autour d’un homme pour qui la rédemption figure la seule issue dans un monde où, après le nazisme, le bolchevisme a rendu toute résistance illusoire.

De très belles pages sur la douleur de l’exil mais aussi de belles analyses sur un monde ébranlé en si peu de temps par tant de cataclysmes, du fascisme au nazisme, du nazisme au bolchévisme pour finir par la bombe atomique.

Plutôt que de devoir renoncer par faiblesse à ce qu’il est, à ce qu’il pense, l’Homme que décrit Márai (et qui finalement pourrait être l’auteur lui-même) ne voit qu’une issue, celle de sauver le monde par son sacrifice personnel. Cette réflexion sur la rédemption, le miracle, le sacrifice et la vanité s’illustre par une vénération non dissimulée de St François d’Assise.

De très belles pages, des formules puissantes, un roman qui ne cesse de réfléchir au plus profond de soi.
Chroniques napolitaines d'un "réfugié" 9 étoiles

Après avoir assisté en 1945 à la "libération" de Budapest (voir son remarquable récit publié sous ce même titre), Sandor Marai choisit l'exil, en commençant par l'Italie où il passera plusieurs années avant de partir définitivement aux USA (il se donnera la mort en 1989). Son séjour à Naples lui inspirera certainement ce roman exceptionnel.

Tout commence par une série d'anecdotes mettant en scène le petit peuple napolitain qui, après la fin de la guerre, vit dans une misère désespérante, en comptant, sans trop y croire, sur un miracle seul en mesure de les ramener à une existence décente. Mais d'où viendra-t-il ce miracle ? Des Américains, des communistes ou des saints innombrables et folkloriques dans cette partie de l'Italie. S.Marai nous régale avec son talent incomparable d'observateur maniant l'humour et la tendresse. On pense un peu à Malaparte (La Peau) mais aussi à Vialatte dans un tout autre registre ; où sont donc passés les journalistes d'antan, ceux d'aujourd'hui ne nous parlent que de polémiques et de communication...

La deuxième partie du roman concerne exclusivement un couple de réfugiés ayant fui le nazisme et le communisme et se sont retrouvés mêlés à ces napolitains pittoresques. Ils portent en eux le désespoir, d'avoir perdu biens matériels et identité propre bien entendu, mais surtout de constater la lâcheté des Occidentaux vis à vis du communisme. Pour eux le monde ne peut survivre que par une nouvelle "Rédemption" redonnant à chacun une conscience individuelle. Leur démarche est analysée dans des pages splendides qui restent d'actualité, la conclusion ne surprendra pas.

Bravo aux "Héritiers de Sandor Marai" et à l'éditeur français de nous permettre de prendre connaissance de ce chef d'oeuvre sans prétention.

Tanneguy - Paris - 84 ans - 28 février 2010