Les hommes mariés ne font pas les nuits douces
de Yaël König

critiqué par BONNEAU Brice, le 2 novembre 2009
(Paris - 39 ans)


La note:  étoiles
Totalement dispensable...
Très honnêtement, il est rare que je ne finisse pas un livre. Il faut en général que l’ennui soit abyssal (comme dans un Houellebecq) ou que l’histoire soit particulièrement creuse, irritante ou psychiatrique (comme dans un Nothomb) pour que j’abandonne face au plaisir de lecture.

Pour autant que les histoires romantiques et torturées ne m’attirent pas spécialement, Les hommes mariés ne font pas les nuits douces me semblait prometteur, voué à traiter du délicat sujet de l’adultère et de la vie amoureuse cachée avec l’écriture délicate d’une femme.

Je dois au moins reconnaître à Yaël König, l’auteure, un talent tout particulier pour la reformulation. Peu d’écrivains savent écrire en 247 pages la même histoire avec une cinquantaine de formulations différentes. Mais König y arrive. Evidemment, ce n’est pas ce qui compte le plus dans un roman, et très vite un sentiment très désagréable s’installe pendant la lecture. Celui du déjà lu.

Alicia rencontre Joris, entre eux c’est l’amour fou, celui qui fournit l’oxygène, fait briller le soleil et chanter les oiseaux. Mais Joris est marié. Joris est un homme, donc il promet qu’il quittera sa femme. Alicia est une femme, donc elle croit Joris. Au bout d’un moment, Alicia comprend que Joris ne quittera pas sa femme, alors elle quitte Joris. Et revient.

Joris promet alors qu’il quittera sa femme. Alicia le croit, pour les raisons qu’on sait. Au bout d’un moment, elle comprend qu’il ne quittera pas sa femme, alors elle le quitte. Et revient.

Alors il promet de quitter sa femme ! Et elle y croit. Mais comprend. Et le quitte. Puis revient.

Quand j’ai abandonné la lecture, à cinquante pages de la fin, Joris revenait à la charge, et Alicia capitulait. Pour la dix neuvième fois, au moins. Avec toujours plus d’emphase romantique et d’hystérie amoureuse, l’auteur nous raconte la vie sentimentalement chamarrée de son héroïne. Extrait choisi : (dans un courrier adressé à Joris) « Alors que je t’aime cristal et granit, je viens te signaler que je considère ma période probatoire comme achevée. [...] Je t’aime chocolat, mandarine et jaillissements moirés. Tu es plus, beaucoup plus que la lumière : tu es le rythme, la respiration, l’évidence de ma vie » (p. 128).

Vous apprécierez ici le style évident que l’on retrouve dans la plupart des courriers romantiques. Douze ruptures plus tard (dans une discussion avec sa meilleure amie ) et toujours pour illustrer les belles phrases d’une Alicia en permanence à fleur de peau, perdue depuis 4 ans dans une tempête de sentiments : « J’ai au coeur des stries féroces ; elles me catapultent dans des orages intérieurs ravageurs, et tu voudrais que je chante ? » (p. 159).

Peut-être que je suis un homosexuel sans coeur, incapable de comprendre l’hystérie qui bouillonne dans le cerveau embrumé d’une femme amoureuse. Et j’espère pour mes amis hétérosexuels que les femmes amoureuses ne sont pas toutes comme ça. Une chose est cependant certaine : on imagine très bien ce livre devenir le prochain « film français » à la mode : titre long, casting déprimant, histoire d’amour à multiples allers-retours. Tout n’est pas perdu. Enfin…