Matzneff : l'exilé absolu de Vincent Roy

Matzneff : l'exilé absolu de Vincent Roy

Catégorie(s) : Littérature => Biographies, chroniques et correspondances

Critiqué par Dirlandaise, le 25 octobre 2009 (Québec, Inscrite le 28 août 2004, 68 ans)
La note : 8 étoiles
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Des mots comme les couleurs d'un peintre

Un livre indispensable pour qui veut aborder l’œuvre de Gabriel Matzneff en ce sens que l’auteur retrace la genèse des premiers romans de l’écrivain et établit un parallèle entre la vie et l’œuvre. Vincent Roy passe en revue tous les aspects de la vie de monsieur Matzneff. Il nous fait mieux comprendre qui est l’homme mais aussi, comment l’écriture l’a sauvé du suicide. Le début est constitué d’une belle analyse du style de l’écrivain et de son activité de diariste. Dès l’âge de dix-sept ans, Gabriel Matzneff commence à tenir un journal et il le fera toute sa vie durant. Il rédige ce journal d’une façon spontanée, presque au même moment où les événements se produisent, à bout portant. Il relate un passé immédiat, très immédiat. Ce journal, c’est la bouée de sauvetage de Matzneff, son salut. Il le dit d’ailleurs dans cette phrase : « Au bord de l’abîme, je me raccroche au point-virgule ». Pour Matzneff, l’écriture, c’est son salut, sa rédemption, la preuve de son existence terrestre. Mais l’idée du suicide ne quittera jamais l’écrivain. L’écriture lui sert de rempart au désespoir, au gouffre de l’existence et à la tentation de basculer dans la mort.

Le livre est aussi une biographie retraçant les événements marquants de la vie de l’homme : sa naissance à l’Hôpital américain de Neuilly, son adolescence, la ruine de sa famille, son service militaire où il est surnommé « Gab la Rafale », ses premiers écrits, le succès littéraire presque immédiat, son mariage qui ne tient que cinq années, ses amitiés, ses nombreuses conquêtes, la rencontre de l’amour de sa vie en la personne de Francesca, une jeune fille de quinze ans qui lui inspirera les livres « Les moins de seize ans » et « La passion Francesca », la trahison de celle-ci et l’effondrement des illusions, le retour à la vie de libertinage et de débauche, le suicide de Montherlant, l’affaire du Coral.

Je voulais lire ce livre avant d’aborder l’œuvre de Matzneff et je ne le regrette nullement au contraire. Il m’a permis de mieux comprendre cet homme fascinant et son oeuvre. Vincent Roy émaille son récit de textes et de citations matznéviennes tout à fait pertinentes et significatives. Il ne juge pas, il nous présente un homme tourmenté, complexe, une personnalité hors du commun et j’ai apprécié au plus haut point son honnêteté et sa rigueur. Huit pages de photos viennent compléter le texte. On peut y voir l’écrivain, toujours beau et racé, à différentes époques de sa vie, en compagnie d’amis dont entre autres Antoine Gallimard, Émile Cioran, Alfred Eibel, Dominique de Roux, Guy Hocquenghem et quelques autres.

Une belle approche qui nous fait pénétrer dans l’univers matznévien d’une façon fort agréable et intelligente. Du beau travail.

« L’accusation d’impudeur ne me touche pas. Ce n’est pas le journal intime, c’est l’écriture en général qui est impudique. Mes romans, mes essais, mes poèmes constituent, autant que mes carnets noirs, un ensemble intime, et impudique. Chaque fois que je publie un livre, je passe aux aveux ; je fournis à l’accusation les pièces du dossier. » Gabriel Matzneff

« J’attache peu d’importance aux idées. J’en attache beaucoup plus à l’écriture. Il n’est, en effet, pas une idée si originale soit-elle, que nous ne partagions avec une multitude d’individus, au lieu que notre style est notre bien propre, notre marque, et ce qui fait que nous sommes nous, et personne d’autre. C’est l’écriture qui est créatrice de beauté, et nous sommes sur cette terre pour créer de la beauté, et nous n’y sommes pour rien que cela. » Gabriel Matzneff

« Un esprit libre s’attire nécessairement l’hostilité des plus médiocres d’entre ses contemporains. Il doit néanmoins tenir bon, et demeurer véridique, donc naturel. Il ne doit pas avoir peur de ses singularités, de ses passions, de ce qui fait de lui un suspect. Il doit oser être supérieur à l’approbation. Certes, cela peut se terminer par la prison, l’asile ou la balle dans la tête. Mais comme, de toute manière, il faudra mourir un jour, il aurait bien tort, aussi longtemps qu’il est en vie, de ne pas vivre la vie qu’il a envie de vivre, de ne pas aimer les êtres qu’il a envie d’aimer, de ne pas écrire les livres qu’il a envie d’écrire. » Gabriel Matzneff

« Les mots d’un écrivain de cette trempe sont comme les couleurs d’un peintre. » Vincent Roy

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Les éditions

  • Matzneff [Texte imprimé], l'exilé absolu Vincent Roy
    de Roy, Vincent
    Michalon
    ISBN : 9782841861866 ; 17,24 € ; 13/02/2003 ; 206 p. ; Relié
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