Un village à la nuit tombée
de Kazuo Ishiguro, François Rosso (Traduction), François Gallix (Postface)

critiqué par Septularisen, le 28 juillet 2009
(Luxembourg - 56 ans)


La note:  étoiles
LES VESTIGES DE LA NUT
L’action se situe dans les années 90, un homme venu de loin, ressemblant à un clochard, nommé Fletcher, parle au lecteur pendant son retour dans un village où il a passé sa jeunesse, et où il était autrefois l’un des membres d’un groupe (politique? révolutionnaire?) vénéré par tous ceux qui croyaient à leur discours.
Mais les temps ont changé, cette adoration aveugle est maintenant de l’histoire ancienne, et Fletcher au cours d’une conversation admet lui-même s’être trompé et finit par reconnaître que, bien sûr, il n’avait pas réponse à tout.

Le narrateur a perdu ses repères, nous sommes au début de la nuit et il ne reconnaît pas les rues mal éclairées et les maisons du village où il avait vécu et où son influence avait été si grande.
Accueilli dans une maison, il ne se rend compte qu’après un long moment que c’était la maison dans laquelle il avait vécu, et reconnaît, enfin, la paillasse sur laquelle il avait dormi!... Il est complètement déboussolé et très fatigué, son état vacille constamment entre veille et sommeil. Il ne reconnaît personne de ceux qu’il retrouve, même pas la très belle femme qui avait été son amante.

La seule personne qu’il reconnaît enfin, est un ancien camarade de classe, dont il avait fait son souffre-douleur, il engage une conversation avec lui, mais veut bientôt le quitter et suivre une mystérieuse jeune femme qui elle, l’a reconnu et veut le mener à ses amis. Il se prépare donc à aller parler aux «jeunes», pour propager ses idéaux, auxquels ont devine qu’il n’a pas vraiment renoncé…

L’atmosphère récit de Flecher est baignée dans l’étrange un peu à la manière d’un Franz KAFKA ou d’un Samuel BECKETT. Cette nouvelle peut être comparée à un tableau abstrait, l’auteur ne nous donne pas toutes les clefs d’accès, ni les tenants et les aboutissants exact de l'histoire, un peu à la manière d’un Haruki MURAKAMI, chacun peut combler les vides de l’histoire, comme il l’entend.

Comme Salmann RUSHDIE, ou bien encore Hanif KUREISHI, ces «perles littéraires» importées par le Royaume-Uni de son ancien empire colonial, l’écriture de Kazuo ISHIGURO, avec sa signature thématique et formelle désormais bien établie, est parfaitement reconnaissable de ses lecteurs. Comme toujours, il nous livre ici un texte enchanteur, d’un style et d’une beauté remarquable, car comme les deux autres auteurs cités plus haut, il est un grand raconteur d’histoires, qui a l’art et la manière de retenir l’attention de ses lecteurs grâce à des intrigues soigneusement bâties.

Kazuo ISHIGURO a publié peu de nouvelles, c’est ainsi que «Un village à la nuit tombée» a été écrit en 1991 donc deux ans après «Les vestiges du jour» et quatre avant «L’inconsolé». Cette nouvelle peut ainsi être lue comme un creuset, une matrice, permettant à l’auteur de reprendre et développer certains thèmes et procédés narratifs avant de les utiliser dans ses ouvrages… Une bonne raison donc de lire cette nouvelle!..