Destins et visages de August Strindberg

Destins et visages de August Strindberg
( Svenska öden öch äventyr)

Catégorie(s) : Littérature => Européenne non-francophone , Littérature => Romans historiques , Littérature => Nouvelles

Critiqué par Dirlandaise, le 24 mai 2009 (Québec, Inscrite le 28 août 2004, 68 ans)
La note : 8 étoiles
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Nouvelles historiques strindberguiennes

Un recueil de nouvelles écrites durant une période qui va de 1882 à 1889. Strindberg s’amuse à composer des histoires dont l’action se situe au Moyen-Âge et dans laquelle il met en avant ses idées sur ses thèmes de prédilection dont la religion et ses absurdités, l’éducation, l’inégalité des classes sociales, l’évolution de la société mais aussi sa régression, la corruption de l’Église ainsi que la chasse aux sorcières.

Ce n’est pas ce que j’ai lu de meilleur de Strindberg mais cela reste tout de même de la grande littérature. Du Strindberg moyen, c’est encore très bon. Mais, je crois que la traduction laisse à désirer et j’aurais aimé plus de notes de bas de pages et de commentaires ce que le livre distille au compte-gouttes.

La première nouvelle intitulée « Un fruit de culture » raconte comment il est difficile pour un noble ruiné de survivre par ses propres moyens dans un monde qui lui a retiré les honneurs et les privilèges dus à son rang. « L’enfant du mauvais désir » ne m’a pas particulièrement intéressée. J’ai trouvé cela confus malgré son message sous-jacent soit le fait que l’honnêteté n’est pas toujours récompensée à sa juste valeur et que parfois, il faut devenir fourbe et rusé afin de se faire une place au soleil. La nouvelle intitulé « Un mariage » est une violente sortie contre l’Église et le célibat des prêtres. Un pasteur se voit forcé de sacrifier femme et enfants s’il veut conserver son poste au sein de sa petite communauté. Une excellente nouvelle !

« Les protecteurs » nous plonge dans le monde du commerce et de la concurrence. Strindberg démontre les méfaits du progrès mais aussi ses avantages. Avoir des idées innovatrices et les mettre en application n’apporte pas toujours les effets escomptés. Très bon. « Du bien et du mal » traite de la vie dans un monastère de moines franciscains copistes et le bouleversement que l’invention de l’imprimerie apporte dans la petite communauté.

« Un visage » met en avant les méfaits que la religion sème dans le cœur d’un jeune homme le poussant à réprimer ses pulsions sexuelles et entraînant chez lui un fort sentiment de culpabilité jusqu’à ce qu’il fasse la rencontre d’un autre jeune homme libertin croquant dans la vie à belles dents, sans remords ni regrets. Intéressant le choc de ces deux personnalités aux antipodes mais éprouvant l'une pour l'autre un irrésistible attrait. Très beau et émouvant. « Une arme nouvelle » raconte comment des paysans désarmés utilisent le seul moyen qui leur reste pour protéger leur famille et leur vie. Intéressant.

« L’île des bienheureux » est un délire strindberguien savoureux qui narre le naufrage d’un navire et la survie de l’équipage, obligé de repartir de zéro sur une île déserte. Strindberg retrace toute l’évolution de la société par le biais de cette aventure rocambolesque. Savoureux et imaginatif à souhait. Finalement, ma préférée « Une sorcière » retrace la vie d’une fille issue d’un milieu très modeste et qui réussit à se sortir de la pauvreté grâce à l’amour d'un jeune homme de la bourgeoisie. Mais les chemins de l’ambition sont irrésistibles pour Tekla qui joue avec le feu et s’y brûle. Là, je reconnais tout le talent et le génie de Strindberg et j’ai été enchantée de cette nouvelle.

C’est une lecture somme toute agréable mais je suis restée un peu sur ma faim, attendant plus, peut-être trop de mon écrivain adoré. Il y a cependant une nette évolution entre les premières nouvelles et les dernières car elles sont présentées par ordre chronologique. Les dernières sont nettement plus étoffées et intéressantes, plus délirantes aussi ce dont je ne me plains pas au contraire. Existe-t-il quelque chose au monde de plus jouissif que le délire et la folie débridée de Strindberg ?

« Tu gagneras ton pain à la sueur de ton front, est-il écrit. Oh ! qu’il est bon de suer ! C’est autre chose que lorsque l’angoisse de ne pas saisir le sens d’un texte obscur fait perler des sueurs froides sous les cheveux, ou lorsque les esprits du doute bousculent tant la sève du sang qu’on a l’impression d’avoir un sable brûlant qui circule dans le corps. » (Un mariage)

« Puis les mouches le laissèrent un instant pour aller ponctuer les grands livres en parchemin… (Du bien et du mal)

« Sais-tu ce que nous avons au dîner aujourd’hui ? chuchota Martin à Franciskus. — La rémission de nos péchés, souffla Franciskus. » (Du bien et du mal)

« La vieille église de bois noir, bien petite demeure pour un Dieu si grand… (Une arme nouvelle)

« Ah quelle pensée resplendissante, libératrice : qu’importe ! Qu’importent bien ou mal, grand ou petit, vie ou mort, qu’importe tout ! » (Une sorcière)

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