Le ciel de Bay City de Catherine Mavrikakis

Le ciel de Bay City de Catherine Mavrikakis

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Gabri, le 7 avril 2009 (Inscrite le 28 juillet 2006, 37 ans)
La note : 5 étoiles
Moyenne des notes : 6 étoiles (basée sur 6 avis)
Cote pondérée : 4 étoiles (49 070ème position).
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Le poids de l'Histoire

Amy, adolescente révoltée, grandit au Michigan dans une famille peu traditionnelle. Sa mère et sa tante, Denise et Babette, sont des rescapées de la seconde guerre mondiale. Cachées puis adoptées par des paysans français alors qu’elles étaient encore enfants, elles décident plus tard d’émigrer en Amérique pour s’éloigner de toute l’horreur infligée aux Juifs sur le vieux continent. En Amérique, elles donneront naissance à Victor et Amy, enfants qui seront destinés à vivre selon le mode de vie américain.

Amy grandira dans l’ignorance de ses origines juives, entre la culture française et la culture américaine, entre les insultes de sa mère et les grossièretés de son cousin. Mais surtout, elle grandira avec une souffrance immense nichée au plus profond de son être, une souffrance qui lui fera bientôt découvrir que le présent et le passé ne sont pas dissociables, et que le poids de l’Histoire pèse sur tous ceux qui la partagent.

"Le ciel de Bay City" est un récit d’une qualité littéraire indiscutable. C’est un roman noir, très dense, où chaque phrase semble étudiée avec soin. L’auteure a un pouvoir d’évocation impressionnant; elle écrit avec des images, des odeurs, des émotions, et je garde encore le souvenir de certaines scènes où il ne se passe rien mais qui sont si évocatrices qu’on croirait se trouver juste à côté des personnages. Il n’y a pas à dire, tous les ingrédients littéraires sont bien présents… N’empêche que les 300 pages que comporte le récit m’ont parfois semblé bien longues à abattre. "Le ciel de Bay City" n’est pas un livre qui divertit; c’est un récit sombre dans lequel il faut savoir se plonger entièrement pour parvenir à bien l’apprécier. Parce qu’au bout du compte, l’histoire d’Amy n’est pas faite de grands remous. On en connaît le dénouement dès le premier chapitre, et la deuxième grande surprise est sur la quatrième de couverture. Malgré toutes les qualités d'écriture de l’auteure, je dirais que je suis plutôt restée sur ma faim… Même si ce n’est certainement pas une lecture que j’oublierai de sitôt.

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La Mélodie du bonheur états-unienne

8 étoiles

Critique de Libris québécis (Montréal, Inscrit(e) le 22 novembre 2002, 82 ans) - 21 décembre 2011

« Le temps arrange bien les choses », dit-on. Amy, l’héroïne du roman, constate le contraire. Rien ne meurt. Difficile de tourner la page quand le deuil est pris en charge par une mémoire qui défie le temps et le lieu.

Née aux États-Unis, l’héroïne, une juive élevée comme une catholique, vit le nez collé au camp d’Auschwitz, où furent conduits ses grands-parents. Cette filiation la retient de prendre son envol même si sa mère et sa tante ont choisi l’Amérique pour secouer cet atavisme. Sous la fumée des usines, le ciel mauve de Bay City ne parvient pas à étendre son voile sur les malheurs qui ont présidé à l’exil de ces femmes. Amy tente de s’accrocher à la vie américaine dans la maison de tôle de sa tante et de son mari, un prêtre laïcisé. Mais en vain.

Devenue mère, elle veut réussir là où la sienne a échoué : déconnecter sa fille des spectres de l’holocauste ressenti à travers une épiphanie qui s’est manifestée jusqu’à Bay City dans le Michigan. Est-ce possible quand le silence divin se fait complice de l’horreur humaine ? Tout de même, son métier de pilote d’avion l’amène à vouloir concilier le ciel et la terre sans quoi elle juge inopportun de s’investir dans l’aventure humaine pour connaître une mort banalisée dans un hôpital contaminé par le clostridium difficile ? Contrairement aux paroles de Welcome to My Nightmare d’Alice Cooper, son chanteur préféré, elle veut protéger sa fille du cauchemar qui lui empoisonne l’existence.

Avec une plume incisive, l’auteure navigue en plein drame shakespearien. Ses personnages cherchent un sens à leur vie de malheurs en se fiant, comme la famille Trapp, à l’oncle Sam qui, à première vue, semble offrir un monde de rêves, où la mélodie du bonheur se chante dans tous les tons. Malheureusement, à Bay Cuty comme ailleurs le ciel reste mauve comme l'indique la page couverture.

Beau... mais répétitif.

5 étoiles

Critique de Widjet (, Inscrit le 18 juillet 2011, 52 ans) - 20 juillet 2011

L'auteur a une écriture très riche, très visuelle et les trouvailles stylistiques sont souvent inspirées. Néanmoins, par moment, le procédé est un tantinet trop voyant et certains effets à force d'insistance en deviennent artificiels (comme si l'auteur était un peu trop certain de son aisance) à l'image de l'utilisation abusive d'adjectifs et de métaphores.

Beaucoup de thèmes abordés (mais celui de la mort prédomine, à l'image de la soeur décédée qui hante le roman et l'esprit de l’héroïne), le récit flirte souvent avec le fantastique (à l'image des grands parents fantomatiques). Le personnage principal torturé à souhait, déchirée par les souvenirs d'une guerre qu'elle n'a pas connue, navigue entre destruction et rédemption.

Le roman (d'une noirceur absolu) est donc globalement réussi même si la construction est parfois un poil alambiquée (flash back) et que certains passages sont redondants.

W

un roman qui s'empourpre et s'embourbre

4 étoiles

Critique de Mamoquin (, Inscrit le 18 janvier 2010, 58 ans) - 11 mai 2010

Le roman de Mavrikakis commence comme il finit ; par une longue plainte au ciel où la protagoniste semble ne trouver aucun refuge et où le temps n'a réussi qu'à graver les pires affres de l'histoire.

Le texte est d'une littérature sans mouvement : les changements entre divers scènes du livre se font sans style particulier pour chacune d'entre elles. De l'Inde, à l'Europe, en passant par le Midwest américain, Mavrikakis ne s'impose pas et court dans tous les sens. Le principal acteur du livre n'est que le ciel, mais un ciel peu importe la couleur qu'il ait, n'est pas une base en soi puisqu'il ne représente strictement rien, et force est d'admettre que le sujet est vite épuisé.

La longue déchéance d'Amy - la personnage principal - se fait avec détachement de la part du lecteur et les nombreuses répétitions nous forcent, sans que nous le voulions, à cerner dès le début les intentions pessimistes de l'auteure quant à son roman.

Plus on lit, plus le manque de vigueur du texte se fait sentir, comme si les tournures métaphoriques avaient laissé place à des adjectifs répétitifs qui sont la preuve cruelle du bâclage et du manque de finition du livre

Noirceur absolue

6 étoiles

Critique de Aliénor (, Inscrite le 14 avril 2005, 56 ans) - 3 décembre 2009

Amy Duchesnay a grandi à Bay City, petite ville du Michigan dans laquelle sa tante et son oncle se sont installés et ont fait construire une maison de tôle bleue qu’ils adorent. Car pour sa tante, cette maison est le symbole de la réussite à l’américaine.
Amy a grandi entre cette tante dévote qui la sanctifie, un oncle qui l’aime plus que son propre fils, et une mère qui l’ignore et la méprise. Uniquement parce qu’une autre fille, Angie, née précédemment mais aussitôt décédée, prend toute la place dans son cœur et son esprit.
D’ailleurs Amy déteste cette sœur qui lui fait tant d’ombre, comme elle déteste cette maison bleue, sa famille, et ce ciel de Bay City désespérément mauve.
Amy n’est que rage et douleur. Elle sent qu’elle est une survivante, sans savoir de quoi exactement. Jusqu’au jour où le secret de ses origines lui est révélé. Un secret que sa mère avait enfoui comme s’il était honteux.

Le premier chapitre de ce roman m’a littéralement happée. D’une noirceur absolue, remarquablement écrit, je me suis sentie emportée jusqu’à la dernière phrase qui pourrait apparaître comme le dénouement d’une histoire qui n’en est en fait qu’à son commencement. Car la narration est faite de retours en arrière. Amy, la narratrice, a atteint la quarantaine lorsqu’elle se met à raconter son histoire. Et les faits qu’elle relate dans ce premier chapitre, fondateurs de la suite de son existence, se sont déroulés la nuit de ses 18 ans. Une nuit terrible dont je ne dirai rien, même si certaines critiques en ont révélé la teneur.

Scotchée donc dès ces premières pages, j’avoue avoir ensuite trouvé que l’histoire patinait un peu, et que cette expression de la difficulté de vivre qu’éprouve Amy était répétitive. Certes la qualité d’écriture demeure, mais à un certain moment je n’ai plus compris cette héroïne et sa volonté de chercher la mort. Cette mort qui est un lourd héritage et qu’elle semble plus porter en bandoulière que comme un fardeau.
Une mort omniprésente qui à un moment semble faire évoluer le roman aux frontières du fantastique…à moins que ce ne soit aux limites de la folie.
Un roman marquant quoi qu’il en soit. Un de ceux dont je me souviendrai je pense. Et surtout une auteure à découvrir plus largement et à suivre.

Sous un ciel mauve

6 étoiles

Critique de Aaro-Benjamin G. (Montréal, Inscrit le 11 décembre 2003, 54 ans) - 12 novembre 2009

Ce long réquisitoire, essentiellement, est situé durant les jours qui précéderont un incendie, allumé par la narratrice, et qui emportera toute sa famille. Deux thèmes refont surface sans arrêt au long du monologue ; la déchéance sociale de l’Amérique avec ses valeurs superficielles, sa promiscuité adolescente, la laideur de ses banlieues ; ainsi que le poids de la mémoire des aïeux morts à Auschwitz.

La prose est enragée. Pensez à la colère d’une adolescente révoltée qui à l’approche de l’âge adulte se rebelle contre le monde dans lequel elle doit se conformer. Cela donne lieu à des phrases puissantes et des moments d’intensité. Toutefois, le style féroce dénué de nuances combiné au propos constamment démoralisant est assommant, en quelque sorte ternit la crédibilité du personnage.

Mon plus grand reproche va au texte en soi. Il y’a surabondance d’adjectifs et de détails inutiles. La structure est éparpillée. Le rythme ne change jamais. Bref, un travail d’édition bâclé.


(Prix des Libraires du Québec, Prix des Collégiens, Grand Prix du livre de Montréal)

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