L'homme qui entendait siffler une bouilloire
de Michel Tremblay

critiqué par Dirlandaise, le 2 mars 2009
(Québec - 68 ans)


La note:  étoiles
Un petit bruit qui change tout...
C’est un très beau témoignage que nous livre ici Michel Tremblay au sujet d’un problème de santé dont il a été victime il y a quelques années. Simon, un metteur en scène québécois dans la cinquantaine et très connu se lève un matin avec la sensation bizarre que quelque chose a changé dans sa vie. Il lui semble entendre un bruit bizarre et cherche dans toute la maison l’origine de ce sifflement qui ressemble à s’y méprendre au bruit que fait une bouilloire. Ne trouvant rien, il décide de ne pas tenir compte de ce bruit incongru et de continuer ses activités comme avant. En effet, Simon est en plein tournage et il a besoin de toute son énergie et de toute sa concentration afin de mener à bien ce film qui lui tient tant à cœur. De plus, il doit prendre soin de ses deux acteurs vedettes qui lui donnent du fil à retordre. Mais, notre Simon réalise bien vite que la vie normale fait désormais partie du passé pour lui et il doit se résigner à consulter un oto-rhino-laryngologiste qui lui assènera une implacable vérité qui va bouleverser la vie de Simon et le mener aux portes du désespoir.

Bien que le sujet de départ soit un peu mince, Michel Tremblay sauve la mise par son humour irrésistible et son écriture extrêmement attachante. Son personnage de Simon n’est pas un homme fort, au contraire, il est rempli de faiblesses. La spécialité de Simon c’est le déni de la réalité. Autrement dit, il préfère jouer à l’autruche et se mettre la tête dans le sable plutôt que d’affronter les épreuves et les coups durs de la vie. Il se plaint, s’apitoie sur son sort, se laisse aller à des crises de nerfs, pleurniche, se vautre dans le désespoir le plus complet bien qu’il sache très bien que tout cela ne changera rien à sa situation désastreuse. Bref, il agit comme un enfant gâté et c’est d’une belle truculence de le voir se débattre avec sa misère !

Michel Tremblay nous expose avec beaucoup de justesse et de réalisme en quoi consiste une opération importante comme celle qu’il a subie, lui laissant des séquelles permanentes et irréversibles à l’ouie. Mais, fidèle à lui-même, il nous présente tout cela en cabotin qu’il est et restera éternellement même aux heures les plus sombres de sa vie. Je l’aime cet homme…

« Il avait besoin de se gratter le bobo. Y prenait un malin plaisir et, dans un certain sens, s’en trouvait un peu soulagé. Il avait toujours refusé de faire pitié aux yeux des autres, mais cette fois il se complut avec délectation dans l’apitoiement et le mépris de soi-même. L’apitoiement à cause de l’acouphène, le mépris à cause de ce petit tas de films sans rythme, sans allure et sans dessein qu’il avait osé jusque-là considérer comme une œuvre ! Une œuvre, ça ! Une œuvre à la Ed Wood, oui ! Il y avait désormais deux pires cinéastes de tous les temps ! Ed Wood et, vous savez, le Québécois, c’est quoi son nom, déjà… »