Famille de Pa Kin

Famille de Pa Kin
( Jia)

Catégorie(s) : Littérature => Asiatique

Critiqué par Vigno, le 27 novembre 2001 (Inscrit le 30 mai 2001, - ans)
La note : 8 étoiles
Moyenne des notes : 8 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 5 étoiles (39 864ème position).
Visites : 5 340  (depuis Novembre 2007)

Les restes de la dynastie des Qing

À Chengdu, dans la province du Sichuan, Gao Eveil de l’intelligence, orphelin, vit avec ses deux frères dans la famille mandarine de son grand-père. Ainsi habitent sous un même toit (en fait plusieurs bâtiments entourant une cour centrale prolongée par un vaste jardin) cinq oncles et leur famille et de multiples serviteurs.
Le grand-père, un ancien mandarin de la famille des Qing, gère la famille d’une main de fer. Tous tremblent devant ce despote, sauf son petit-fils, éveil de l'intelligence, qui a pris conscience du désastre que perpétue la famille de type féodal. Ce personnage serait l’alter ego de l'auteur : « Dans mon enfance, j’ai souvent vu, de mes propres yeux, dévaster la vie de jeunes gens merveilleux qui ont été poussés à un destin tragique. »
L’action se situe en 1920-1921, juste après la révolution du 4 Mai 1919, un mouvement patriotique (anti-japonais) et antiféodal, qui s'accompagne d’une révolution culturelle. En sous-fond également les déchirements causés par les Seigneurs de la guerre qui se disputent le pouvoir.
Pa Kin (ou Bajin) décrit l'éclatement de la vieille société chinoise par le biais d’une famille. À travers l'opposition du jeune Eveil de l’intelligence à sa famille, c'est l'opposition de la nouvelle Chine à l'ancienne. Il montre un système familial très hiérarchisé, figé dans des traditions aliénantes et cruelles, mais aussi une société décadente où les tenants du pouvoir (les hommes les plus haut placés dans la famille) abusent de leurs inférieurs, à commencer par leurs enfants. Le jeune éveil de l'intelligence se joint à un groupe de jeunes qui veulent changer la Chine. Ils rêvent de liberté, ce qui se traduit par des choses aussi élémentaires que décider de son avenir professionnel, choisir sa femme; et pour les jeunes filles, les premières victimes du système, fréquenter l’école, refuser un mariage et couper leurs nattes. Bien entendu, les serviteurs ne peuvent même pas concevoir de telles aspirations, eux qui sont traités comme du bétail.
Il est quelque peu difficile d'entrer dans ce roman à cause du nombre incalculable de personnages qui portent des noms assez semblables, parfois très poétiques (Prunier des frimas, Chant de phénix, épée aux nues…). En fait, pendant le premier tiers du roman, l'action évolue très peu. Pa Kin esquisse la vie de ses nombreux personnages, ce qui n’est pas sans intérêt. Une fois bien installé dans cet univers romanesque, on lit la deuxième partie du roman d'un seul trait.
On peut comprendre facilement que les Chinois soient très attachés à ce roman (publié en 1931) qui décrit une période-clé de leur histoire. Et le lecteur étranger, comme le dit Pa Kin en préface, pourra « voir comment [son] pays mi-féodal, mi-colonisé, s’est transformé en une nation indépendante et autonome, en une Chine socialiste ne comptant que sur ses propres forces ».
Pourtant le roman souffre de certains défauts, à commencer par quelques invraisemblances psychologiques et, ici, on pense au revirement du grand-père sur son lit de mort. On a aussi de la difficulté à comprendre que le plus jeune fils ait pris un tel ascendant sur ses deux frères plus âgés. Mais comme l'auteur prétend que le roman est largement autobiographique…

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Dans la Chine de 1920:le combat d'une certaine jeunesse contre l'ordre ancien.

7 étoiles

Critique de Myrco (village de l'Orne, Inscrite le 11 juin 2011, 74 ans) - 7 juin 2012

Pa Kin (ou Ba Jin selon une retranscription plus récente)(1904-2005) dont le destin a été intimement lié à tous les évènements qui ont bouleversé la Chine du XXème siècle,est une des figures les plus emblématiques de la littérature chinoise de sa génération au même titre qu'un Lao She.
"Famille" constitue le premier volet de sa trilogie "Torrent" considérée comme son oeuvre majeure.

Par le biais d'une fiction romanesque,l'auteur témoigne (il appartenait lui-même à une famille de ce type) de ce qu'était la structure familiale de base de ce milieu privilégié des mandarins et grands propriétaires fonciers,en place depuis des millénaires,dans cette Chine féodale et confucéenne.
Pa Kin nous livre là une remarquable étude sociologique -en forme de réquisitoire- de cette microsociété: modes de vie et de fonctionnement, relations de conflit et d'asservissement, condition des femmes et des domestiques, pratiques exutoires, pesanteur des traditions, des rituels, des interdits, des superstitions... qui régissent ce type de communautés soumises au pouvoir absolu du patriarche, communautés par ailleurs aveugles et indifférentes à la misère du monde qu'elles exploitent, vivant à l'abri de leurs murs, sur de vastes parcs paysagers, magnificents, à la hauteur de leur opulence.

Comme il a été dit dans la critique principale, le roman se situe à un moment très particulier de l'histoire de la Chine qui connaît alors un bouillonnement d'idées nouvelles véhiculées par une jeunesse étudiante pénétrée par la culture occidentale, en particulier russe (la Révolution de 1917 a eu lieu). Cette jeunesse appartient souvent à ces familles; elle ne supporte plus d'être victime de ces tragédies humaines que le système génère et qui broient régulièrement des vies; elle entend revendiquer son droit au bonheur, à la liberté et à la dignité.

Le thème central du livre est effectivement le combat d'une certaine jeunesse contre l'ordre ancien. Ce dernier nous est essentiellement donné à voir à travers son regard. "Famille" est un livre de jeunesse -écrit par Pa Kin à 26 ans en replongeant dans ses propres souvenirs et émotions relativement récents-mettant en scène, au premier plan , la jeunesse (les principaux protagonistes ont entre 17 et 20 ans), ses premières amours, ses exaltations, ses élans pour des causes nobles, ses luttes...

Comme Vigno, je n'ai pas accroché aux 100 premières pages, pour les mêmes raisons, mais aussi parce qu'une lectrice de mon âge éprouvait quelque décalage et désintérêt à l'évocation de ces amours un peu mièvres et immatures du début du livre; je ne saurais trop inviter le lecteur à poursuivre, il devrait comme nous être récompensé de sa persévérance.

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