Un dieu un animal
de Jérôme Ferrari

critiqué par Dudule, le 28 janvier 2009
(Orléans - - ans)


La note:  étoiles
Un homme une femme
C’est le récit d’un homme, enrôlé dans l’armée pour fuir son village, sa famille, il a vu les horreurs de la guerre, et celui d’une femme, Magali, consultante dans une grande entreprise de recrutement, enfermée dans la spirale du travail.

Ils se sont connus jeunes, elle venait passer les vacances d’été dans son village, ils sont tombés amoureux à l'adolescence, la vie les a séparés. Il lui écrit une lettre afin de la retrouver.

Deux mondes se confrontent, celui de la guerre et celui de l’entreprise, deux vies bien différentes et pourtant aussi dévastatrices.

C’est un roman d’une grande force, romantique, poétique, et pourtant si violent sur la profondeur du désespoir, des angoisses, on passe d’un personnage à l’autre, d’un événement à l’autre sans transition.

J’ai été saisie par ce texte court sur la violence contemporaine. Magnifique, à lire.
Hypnotisant 8 étoiles

Un profond roman qui se dévore d'une traite.
Le choix d'une mise en forme "monobloc" participe à cette spirale enivrante, empêchant toute respiration chez le lecteur. Ainsi, sans crier gare, par de surprenants enchaînements nous transportant d'un point à un autre des errements des deux protagonistes, nous mettons en articulation, et en échos, leurs trajectoires respectives.
A travers le prisme des réflexions introspectives de cette femme et de cet homme, puis de leur relation teintée d'incompréhensions réciproques tant leur ancrage dans leur réalité les empêche de comprendre celle de l'autre (ou d'avoir envie), nous effectuons un zoom sur nos sociétés contemporaines où l'individualité toute puissante (dite de la liberté) cache en réalité des formes modernes de coercition tel que le diktat de la performance ou celui du pouvoir (où la violence y est légitime). Ceci permet de mettre en perspective "l'égarement" des individus : déracinement ; enferment lié à l'incapacité de communiquer ses ressentis à autrui ; quête du sens de la vie, de l'amour, de la foi... faisant que le sentiment d'être de plus en plus étranger l'un pour l'autre, mais aussi vis-à-vis de soi-même, écrase l'Homme ; faisant que les trajectoires que nous pensons diriger rationnellement sont soumises à des logiques collectives qui ne sont pas ou plus maîtrisables.
Sur tous ces thèmes, nous ne pouvons pas rester insensibles à la lecture de ce cinglant roman allant à l'essentiel avec force et précision.

PPG - Strasbourg - 48 ans - 15 août 2009