Le livre du rire et de l'oubli
de Milan Kundera

critiqué par Marco, le 17 novembre 2001
(Seraing - 50 ans)


La note:  étoiles
Où est la frontière ?
Ce livre n’est pas un roman mais un recueil de 7 histoires. Mais ces histoires n’en sont qu'une. Ou plutôt, elles sont une variation sur un thème central. Kundera, en musicien accompli, donne vie à une série de miroitements qui fascinent et pourtant effraient. Comme s’il invitait le lecteur à entrer dans son monde et en même temps le retenait hors de celui-ci.
C'est un livre sur l’oubli. "La lutte de l’homme contre le pouvoir est la lutte de la mémoire contre l’oubli". C’est l’histoire de Tamina, expatriée à l’ouest, qui fait revivre son mari en se rappelant les petits noms tendres qu’il lui donnait. Ou celle de Mirek, suivi par la police secrète, qui retourne chez son ancienne amante récupérer des lettres passionnées. Ou peut-être celle de Kundera, dont les livres sont interdits et qui publie sous un faux nom des horoscopes pour continuer d’exister.
C’est un livre sur le rire. La différence entre le rire du diable et celui de l’ange. L’antagonisme du rire, qui est cruel, et du sexe, qui est triste et sérieux. C'est l'histoire de Jan, qui tente de ne pas rire au beau milieu d’une orgie. Ou celle de cette mère qui s’incruste chez son fils et sa belle-fille au plus mauvais moment. C'est un livre qui parle de Prague et de son printemps. Kundera, exilé en France, se verra retirer la nationalité tchèque après la publication de ce livre en 1978. Avec "une larme à l'oeil qui lui permet de voir de loin", il nous décrit un monde où l’omniprésence de l’appareil communiste n’empêche pas la complexité psychologique et sexuelle des êtres.
C’est un livre qui parle des anges. Les enfants qui tourmentent l’héroïne Tamina. Ou bien ces rondes de Tchèques qui célèbrent les assassinats politiques et dansent jusqu'à s'élever dans le ciel. Kundera a quitté le cercle, lui. Il est passé au-delà de la frontière invisible qui désormais l’empêche de revenir en arrière et a fait de son écriture un instrument de témoignage extraordinaire qui privilégie le rire et empêche l'oubli.
Du danger de ces titres clinquants qui recouvrent le vide. 6 étoiles

Non plus ...
J'ai le même sentiment de déception, après m'être plongé dans l'Insoutenable Légèreté de l'Etre, et au sortir du Livre du rire et de l'oubli, que la plupart des critiques qui me précèdent.
Je trouve que l'architecture de ce roman est pantelante. L'ensemble manque à mon goût de la cohérence et de l'élégance qui forgent les grandes réussites de Kundera. L'intrigue, diaphane, semble osciller entre des considérations sexuelles, qui, je ne saurais dire pourquoi, me paraissent bien plus vulgaires que dans ses autres ouvrages, sans pour autant qu'il y en ait plus, d'ailleurs, mais sans doute parce qu'elle sont articulées de manière différente; et entre des réflexions intellectuelles sur la Litost - je ne sais toujours pas exactement ce que c'est ... - ou l'art, la libido, et d'autres thèmes chers à ce romancier, qui, décidément, a du mal à se renouveler.
J'adore Kundera, mais, comme dans bien d'autres de ses oeuvres, j'ai eu du mal à retrouver toute la cruauté de La Vie est Ailleurs, ou tout le génie de l'Insoutenable légèreté de l'Etre ...
J'espérais mieux.

Lisancius - Poissy - - ans - 15 février 2011


Rire pour ne jamais oublier......... Prague ! 7 étoiles

J'espérais savourer un peu de " L'insoutenable légèreté de l'être " et j'avoue avoir été déçu .

On retrouve au fil de ces 7 histoires ( ayant un lien les unes avec les autres ) les thèmes de prédilection de Milan Kundera :

--> son amour pour Prague et sa Bohème asservie.
--> l'insignifiance de l'Homme ( à travers sa nudité )
--> l'Histoire qui s'efface au gré des évènements.
--> l'étroite relation entre la pléthore de livres et le vide de leur contenu ( ce qu'il qualifie de graphomanie )
--> la beauté féminine .
--> le refus de la compromission tchèque , expliquant la descente aux enfers de ce peuple tout au long de son Histoire .

Autant je m'étais " régalé " avec 'L'insoutenable légèreté de l'être " ; autant là...... j'ai eu du mal à raccrocher les wagons et à interpréter les métaphores utilisées par l'auteur .

Cette oeuvre reste néanmoins profonde .
Milan Kundera crie son amour pour Prague avec férocité et épingle les régimes qui ont successivement " violé " son pays .

Frunny - PARIS - 58 ans - 25 septembre 2010


Flou artistique 4 étoiles

Je n’ai pas aimé son discours décousu, ni les scènes érotiques utilisées comme liant pour faire tenir une ébauche d’intrigue. J’ai apprécié tout de même sa manière de tourner en dérision toute entreprise humaine. Impression d’ensemble : j’attendais autre chose, plus cohérente, plus construite.

Béatrice - Paris - - ans - 30 novembre 2008


Une excellente critique pour un très bon livre 9 étoiles

Le rire est un des moyens de défense de l'homme emprisonné dans un cercle infernal. La mémoire et la musique en sont un autre. Il dit: " Les anges sont partisans non pas du Bien mais de la création divine. Le diable est au contraire celui qui refuse au monde divin un sens rationnel." Et il poursuit: "...le bien du monde n'implique pas que les anges aient l'avantage sur les démons, mais que les pouvoirs des uns et des autres soient à peu près en équilibre... S'il y a dans le monde trop de sens incontestable (le pouvoir des anges), l'homme succombe sous son poids. Si le monde perd tout son sens (le règne des démons) on ne peut pas vivre non plus."
Il semble que Kundera était vraiment l'écrivain de la révolte contre un certain type de régimes politiques. Quand ils se sont effondrés, sa production s'est raréfiée, sa valeur n'était plus la même et il ne publie quasiment plus depuis quelques années. Pourtant certains de ses livres resteront de grands classiques comme "L'insoutenable légèreté de l'être", "La plaisanterie" et celui-ci.

Jules - Bruxelles - 79 ans - 20 novembre 2001