Sylvie et Bruno
de Lewis Carroll

critiqué par Nance, le 21 août 2008
( - - ans)


La note:  étoiles
Nébuleux
C’est un livre très original par la forme, mais qui pèche par excès. On suit deux intrigues où la réalité et le rêve se croisent et dont le lien est le narrateur. On ne connaît pas son nom, mais qu’on sait qu’il est vieux et malade (et qu’il possède une grande imagination).

« Petit à petit, cependant, je me persuadai que je pourrais me concentrer assez pour faire tomber le voile en pensée, et ainsi jeter un coup d’œil sur le mystérieux visage - à propos duquel les deux questions : "Est-ce jolie ? Est-ce laide ?" restaient suspendues en un merveilleux équilibre.
Le succès fut partiel - et capricieux - mais enfin il y eut un résultat : de temps en temps la voilette semblait disparaître, dans un brusque éclair de lumière ; mais, avant que je pusse pleinement réaliser ce que je voyais, tout s’obscurcissait de nouveau. »

Bruno et Sylvie sont frère et soeur et les enfants du gouverneur du pays Du-Dehors (aussi, roi du pays des Fées). Ils sont victimes d’un sous-gouverneur ambitieux qui veut devenir empereur. Le sous-gouverneur, sa femme excentrique et leur fils détestable n’ont pas cessé de me faire penser aux Dursley de la série Harry Potter et les parents de David dans L'île des sorciers. On suit aussi le triangle amoureux dans la « réalité » avec Arthur, Muriel et Eric.

Ce n’est pas la même chose que Alice aux pays des merveilles et De l’autre côté du miroir. Oui, on y retrouve des poèmes, du nonsense, de l’humour, mais l’écriture et le ton ne sont vraiment pas pareils. C’est trop flou, je me suis perdue à plusieurs reprises. Des fois, on a de la difficulté à savoir qui parle à qui et on ne sait pas toujours où les personnages veulent en venir. La syntaxe est laborieuse, ce qui rend vraiment le livre difficile à lire. Les livres de Alice sont plus clairs, ici ça manque de direction. Peut-être est-ce le but, le style est original, mais ça rend presque le livre illisible. Le manque de lisibilité rend le livre long et lourd. Ça c’est pour la forme, pour le fond, les personnages ne pas aussi attachants que dans les Alice, ils sont trop noirs ou blancs, vils ou purs. Enfin, j’ai quand même ri à quelques reprises, comme quand Bruno imite quelques personnages de Shakespeare, mais ce n’est pas assez globalement, c’est trop imprégné de morale et de religion.

«"Être ou ne pas être !" remarqua Hamlet d’un ton joyeux, puis il fit plusieurs culbutes, perdant sa cape en cours d’exécution. [...] "Ne va-t-il pas dire un mot de plus ? murmurai-je à Sylvie. - Je ne pense pas, répondit Sylvie en murmurant elle aussi. En général il fait la cabriole quand il ne connaît plus d’autres mots du texte." [...] "Ceci, est-ce un poignard ?" demanda Macbeth d’un ton assez surprenant ; et un concert de "crois pas ! crois pas !" s’éleva des grenouilles (j’avais alors bien appris à comprendre leur croassement). "C’est un poignard ! proclama Sylvie d’une voix péremptoire. Taisez-vous !" et le croassement cessa immédiatement. Shakespeare ne nous a pas dit, pour autant que je sache, que Macbeth avait la fantaisiste habitude de faire la cabriole dans la vie privée ; mais Bruno considérait manifestement que cela faisait essentiellement partie du personnage, et il quitta la scène par une série de sauts périlleux. »

Ce livre a été une mauvaise expérience. Peut-être que je n’étais pas assez prête, mais je crois encore que ce livre est un exercice de style plus ou moins réussi. Je ne sais pas si c’est à cause de la traduction, à cause des jeux de mots difficilement traduisibles... Enfin, je suggère Sylvie et Bruno que pour les curieux extrêmes de Lewis Carroll.