Auschwitz et après, tome 1 : Aucun de nous ne reviendra de Charlotte Delbo

Auschwitz et après, tome 1 : Aucun de nous ne reviendra de Charlotte Delbo

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Smokey, le 18 août 2008 (Zone 51, Lille, Inscrite le 12 août 2008, 38 ans)
La note : 8 étoiles
Moyenne des notes : 9 étoiles (basée sur 3 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (12 631ème position).
Visites : 4 091 

Aujourd'hui, je ne suis pas sûre que ce que j'ai écrit soit vrai. Je suis sûre que c'est véridique."

Ce livre est unique par le choix de Charlotte Delbo de le rédiger sous forme de flash-backs qui commencent on ne sait pas quand et s'arrêtent net.
Pourtant, l'ensemble est très cohérent: c'est ce qui fait la grande richesse de ce livre.

Ces moments restitués se détachent sur fond d'une réalité impossible à imaginer pour ceux qui ne l'ont pas vécue.
Elle évoque les souffrances subies et parvient à les porter à un degré d'intensité au-delà duquel il ne reste que l'inconscience ou la mort. Elle n'a pas voulu raconter son histoire ou celle de ses compagnes: dans ces lieux, il n'y a pas de place pour l'individu.

Un des passages qui est vraiment resté ancré dans ma tête est celui où elle décrit avec quelle facilité on peut s'asseoir, juste quelques secondes pour se reposer et quelle douleur, quelle souffrance il faut affronter pour pouvoir se relever, chose que l'on réussit rarement seule.
Ou encore ce passage où les SS décide de construire un jardin et où les détenues doivent courir en portant des poignées de terre dans leur robe, elles courent, courent, on dirait que ça ne s'arrête jamais...

Extrait:

"Mais il est une gare où ceux-là qui arrivent sont justement ceux-là qui partent
une gare où ceux qui arrivent ne sont jamais arrivés, où ceux qui sont partis ne sont jamais revenus.
C'est la plus grande gare du monde."

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jusqu'au bout de l'horreur

8 étoiles

Critique de Monocle (tournai, Inscrit le 19 février 2010, 64 ans) - 7 février 2019

Premier des trois tomes de "AUSCHWITZ ET APRES" les suivants se nommant "UNE CONNAISSANCE INUTILE" suivi de "MESURE DE NOS JOURS" publiés aux éditions de minuit en 1970 et 71.
Charlotte Delbo était l'assistante de Louis Jouvet. Très engagée politiquement (elle épouse en 1936 le militant communiste Georges Dudach).
Charlotte Delbo et son mari sont arrêtés le 2 mars 1942 au 93 rue de la Faisanderie (16e arrondissement de Paris) par les Brigades spéciales.
Elle sera déportée en 1943 à Auschwitz et sera une des rares survivantes de son séjour en enfer.

La littérature compte déjà bon nombre de titres sur le sujet. Les textes de Charlotte Delbo sont détaillés, réalistes et démontrant l'incroyable cruauté qui régnait dans ces camps. Comment surmonter de telles horreurs demeure un grand mystère... où puiser la force ? je reste interrogatif sur le sujet.
Après le premier tome il m'est impossible de poursuivre cette lecture. Trop dur, trop fort ; l'horreur me donne un sentiment de honte, la honte d'être humain... tout simplement.

Magnifique témoignage

10 étoiles

Critique de Donatien (vilvorde, Inscrit le 14 août 2004, 81 ans) - 22 juin 2015

Charlotte Delbo 1

Je viens de terminer la lecture des trois livres écrits par Charlotte Delbo qui a vécu 27 mois au camp d’Auschwitz.

Son style, sa façon de découper ses textes en comptes-rendus d’incidents, de moments, de rencontres, l’évocation de certaines émotions sous la forme de poèmes, pour terminer par la description du retour à la «vie normale» pour les rescapées et suscite l’empathie du lecteur.

Lire ces magnifiques textes d’hommage à l’amitié, à la solidarité, à l’amour a été pour moi une épreuve émotionnelle, grâce aux phrases courtes et directes de Charlotte Delbo . Pas de fioritures.

Ce sentiment a été exacerbé par la proximité dans le temps, presque parallèle, de la lecture du livre de Getty Sereny relatant ses nombreuses conversations avec F.Stangl, commandant du camp d’extermination de Treblinka.
Stangl qui , comme la plupart de ses collègues cherchait à justifier constamment l’impossibilité d’échapper aux ordres d’euthanasie et d’extermination donnés par les responsables nazis.

A-t-elle démontré la «banalité» du mal?

Je ne parviens pas à le croire. C’est dire que l’on pourrait «s’habituer» à ce type de «travail»! Torturer, frapper, injurier, affamer, assassiner, brûler des millions d’êtres humains en s’aidant d’alcool, de médicaments et de nuits blanches?
C’est incroyable. Pourtant certaines rescapées le déclarent: «Où était la vraie vie? Là-bas, ou ici? Où étaient les vrais visages? Là-bas ou ici?

Fortes émotions donc. J’en ai pourtant lu des ouvrages sur la Shoah.

Il n’y a que le film «Shoah» qui atteint cette efficacité dans l’horreur. Et ce par les mêmes moyens: la simplicité du témoignage humain, des rescapés ET des participants aux génocides.

Charlotte Delbo (source Wiki), femme de lettres, n° 31661 tatoué sur le bras, et née le 10 août 1913 à Vigneux-sut-Seine et morte le 1 mars 1985 à Paris.
Résistante qui a vécu la déportation, communiste, assistante de Louis Jouvet. S’engage en 1941 dans la Résistance avec son mari , Georges Dudach, arrêté avec elle et fusillé en 1942.
Déportée à Auschwitz le 24 janvier 1943,puis à Ravensbruck, parmi 230 femmes. Elle sera l’une des 49 rescapées.
Publie une «oeuvre» et pas simplement un témoignage. Après la guerre, jouit de la vie mais s’oppose à la guerre en Algérie.
Elle n’a pas d’enfant et n’avait jamais souhaité en avoir.

Dans le premier volume de cette suite de trois «AUCUN DE NOUS NE REVIENDRA»,Charlotte Delbo évoque une suite de moments du séjour dans l’univers du camp d’Auschwitz.
Une succession de textes en prose, poèmes, récits pour tenter de restituer l’arrivée. «Il y a des gens qui arrivent. Ils cherchent des yeux dans la foule ceux qui attendent ceux qui les attendent....», les séparations brutales.
Des dialogues «Il faut lutter de tout son courage.Pourquoi..pourquoi lutter puisque
nous devons toutes...».
Les appels :» Nous restons immobiles. La matinée s’écoule - du temps en dehors du temps. Nous étions statufiées par le froid.»

Les cris des gardiens, des SS «SCHNELL, SCHNELLER, WEITER, WEITER...»

La soif :»La soif du marais dure des semaines. La raison chancelle. la raison résiste à tout, elle cède à la soif. Il y a la soif du matin et la soif du soir, celle du jour et celle de la nuit». J’avais oublié cette torture spécifique de la soif, peu évoquée dans d’autres livres.
Les morts :» Un cadavre. L’oeil gauche mangé par un rat. L’autre oeil ouvert avec sa frange de cils. Essayez de regarder. Essayez pour voir».

«Ici, le soleil n’est pas du printemps. C’est le soleil de l’éternité, c’est le soleil d’avant la création».

L’utilisation du présent renforce l’efficacité de la charge émotive de l’auteure. François Bott, son ami, parle de «douloureuse et bouleversante incantation..».

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