Les derniers jours du Rock'n'Roll de Pierre Achard

Les derniers jours du Rock'n'Roll de Pierre Achard

Catégorie(s) : Arts, loisir, vie pratique => Musique

Critiqué par Numanuma, le 3 juillet 2008 (Tours, Inscrit le 21 mars 2005, 50 ans)
La note : 10 étoiles
Moyenne des notes : 10 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (3 719ème position).
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La mort est toujours affaire d'autrui quand on en parle

En toute honnêteté, je n’ai jamais entendu parler de l’auteur de cette anthologie, Pierre Achard. La quatrième de couverture fait bien son boulot : la notice biographique indique que l’on a affaire à un gars sérieux et professionnel : journaliste, directeur de la SACEM et possédant 50 000 disques. Ca force le respect.
Et ça effraie un peu aussi. Avec un CV pareil, on imagine vite un travail érudit à la limite de l’indigestion ; un truc par et pour les pros. Un truc chiant, quoi !
Et bien, non ! C’est même tout l’inverse. Pierre Achard, en plus de ses connaissances, possède un talent de plume indéniable, une poésie dans l’écriture qui sied à merveille à son entreprise : nous faire revivre la vie et les derniers instants de grands noms de la pop music, au sens anglo-saxon du terme, soit une musique populaire et non un genre en soi.
C’est justement ce talent d’écriture qui rend hommage aux artistes dont l’histoire est évoquée plutôt que racontée. Certes, la liste n’est pas exhaustive. A titre d’exemple, au moment où j’écris ces lignes, j’écoute la magnifique réédition des deux disques de Dennis Wilson, Beach Boy décédé (le seul à pratiquer le surf d’ailleurs) réunis sur un double CD : Pacific Ocean Blue ; il n’y figure pas. Pas plus que les membres fracassés en avion de Lynyrd Skynyrd, ni Duane Allman, ni John Cippolina, ni Georges Harrison. La liste de ceux qui n’y sont pas pourrait donner un volume II.
Je pense que l’auteur n’a retenu que les artistes pour lesquels il sent une attirance particulière, une connivence, ce qui rend le texte poignant. Tous n’ont pas droit au même traitement, certains chapitres sont plus fournis que d’autres mais on sent bien derrière un amour sincère pour les artistes dont il parle et qui nous ont quittés trop tôt.
J’ai particulièrement apprécié la ballade morbide de Jim Morisson dans notre capitale, de son arrivée, fuyant la célébrité derrière une barbe de Père Noël alcoolique et une vingtaine de kilos en trop, jusqu’à son dernier repos au Père Lachaise. La façon dont Morisson est passé de l’état de grâce dans cette ville fantasmée à la déchéance camée est digne d’un film. A mon avis, le meilleur chapitre de ce livre qui en compte beaucoup et qui retrace bien des destins.
Bien sûr, Morisson est accompagné des autres destins brisés célèbres : Janis Joplin, Brian Jones, Jimi Hendrix et Kurt Cobain, tous morts avant d’avoir atteints leurs trente ans… Tous, ainsi que le roi. Le chapitre sur Elvis est l’une des meilleures choses que j’ai pu lire sur le sujet. Il ne traite vraiment que de la fin de la vie du King mais tout est là, discrètement, toute la sauvagerie première désormais corsetée par un contrat à Las Vegas, par des costumes ridicules de roi soleil proclamé par son manager, par des surdoses de médicaments… toute l’innocence du jeune homme qui enregistre un disque pour sa maman, toute la rage adolescente qui va faire entrer brutalement le monde d’après-guerre dans une nouvelle ère, tout est là et tout est perdu.
Le seul reproche que je pourrais faire, c’est que Pierre Achard semble prendre le parti systématique du « c’était prévisible ». J’ai eu l’impression en lisant ce bouquin que l’issue de tous les artistes cités ne pouvait être que la mort, que, d’une certaine manière, leur personnalité, leurs capacités de créateurs ne pouvaient les amener ailleurs que dans la tombe.
L'autre élément sujet à caution est le recours systématique à Wikipédia. Je n'ai rien contre le principe de Wikipédia mais on sait que ce qu'on y trouve est à prendre avec des précautions.
Alors qu’il est de bon ton depuis plusieurs années déjà de se demander si le rock est mort, il me semble important de rappeler que ce mode d’expression musicale doit beaucoup à ses disparus au point qu’il est préférable de faire un beau cadavre que de vieux os dans le métier. Le statut de légende vivante n’est pas octroyé aisément alors que la mort en pleine gloire est le sésame parfait, un aller direct pour le mythe.

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Les éditions

  • Les derniers jours du rock'n'roll [Texte imprimé] Pierre Achard
    de Achard, Pierre
    B. Grasset
    ISBN : 9782246734611 ; 19,00 € ; 14/03/2008 ; 507 p. ; Broché
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Le cercle des rockeurs disparus

9 étoiles

Critique de Nothingman (Marche-en- Famenne, Inscrit le 21 août 2002, 44 ans) - 7 février 2010

De Buddy Holly au songwriter trop peu connu Ellioth Smith, 50 ans d’histoire du rock américain sont ici retracés par le prisme des morts souvent violentes de ses icônes. Avec ses « derniers jours du rock’n’roll », Pierre Achard recense tous ses morts pour les rendre encore plus vivants. Accidents d’avions (Buddy Holly et Richie Vallens), accident de taxi (Eddy Cochran), noyade dans une piscine (Brian Jones), overdose (jimmy Hendrix, Janis Joplin, Jim Morrison), assassinats (John Lennon, Marvin Gaye), suicide (Kurt Cobain, Ellioth Smith), à travers toutes ces morts violentes, on voit qu’au plus grand talent est souvent associé un caractère autodestructeur. Ces artistes, au final, sont tous comme des comètes passées trop vite, mais qui paradoxalement nous ont apporté beaucoup de par leur musique, mais aussi par leur façon d’être. Combien de minutes d’insouciance ne leur doit-on pas ?
Tous, nous nous demandons : que serait-il advenu de Jeff Buckley, s’il ne s’était pas noyé dans le Mississippi ? Son seul album, justement intitulé «Grace», la respire à chaque titre et laissait augurer du meilleur. Le groupe de Kurt Cobain aurait-il atteint le « Nirvana » si celui-ci, torturé et dépressif, n’avait pas décidé de mettre fin à ses jours ? Vers quels sommets Marvin Gaye aurait-il pu emmener la soul s’il n’avait pas été assassiné par son père ? John Lennon aurait-il été assassiné par Mark Chapman, si ce dernier n’avait pas lu « L’attrape-cœurs » de Salinger ?
Toutes ces questions nous submergent à la lecture des différents biopics de Pierre Achard. La légende du rock s'est bâtie sur ce mélange de vie sur la voie rapide, de flirt avec les limites. Le rock'n'roll comme métaphore d'une vie où prime le plaisir. La liberté absolue. Forever Young !

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