Femmes en guerre et autres nouvelles
de Chinua Achebe

critiqué par Débézed, le 16 juin 2008
(Besançon - 76 ans)


La note:  étoiles
Déjà la tragédie africaine perçait chez Achebe
Chinua Achebe, l’auteur nigerian célèbre pour son roman « Le monde s’effondre », a écrit quelques nouvelles dont la plupart sont réunies dans ce recueil publié en 1972 mais elles ont été écrites au cours d’une longue période qui court de 1952 à 1972 et qui couvre donc la guerre qui enflamma le Biafra. Ces nouvelles évoquent, notamment dans la première période, les difficultés rencontrées par le peuple nigerian pour faire cohabiter la tradition africaine avec les nouvelles valeurs, principalement l’instruction et l’éducation, importées par les colons blancs. Ces premières nouvelles sont souvent moralisatrices, elles dénoncent les principales tares qui affectent l’Afrique de l’époque : l’obscurantisme religieux et culturel, la corruption et la cupidité, le non respect des traditions et surtout le manque d’instruction et d’éducation qui fait l’objet de plusieurs nouvelles. Elles laissent transpirer l’espoir d’un jeune Africain de voir son pays un jour, après quelques efforts, plus d’application et moins de vices, accéder au rang des pays dits développés. Mais les dernières nouvelles, notamment les trois dernières, sont empreintes de beaucoup plus de pessimisme et montrent même un certains désabusement et une certaine résignation devant l’incapacité des hommes à vivre en paix sans se déchirer pour des biens terrestres bien éphémères car « nos parents ne nous ont jamais appris à préférer la richesse aux femmes et aux enfants. »

Ecrites sur une durée de vingt ans, ces nouvelles montrent combien la situation de l’Afrique s’est dégradée au cours de cette période et comment l’optimisme d’un jeune écrivain talentueux et reconnu a tourné au pessimisme désabusé et fataliste après la guerre du Biafra. C’est toute la tragédie de l’Afrique actuelle qui est écrite en filigrane dans ces nouvelles de Chinua Achebe qui prend place ainsi à mi-chemin entre Wole Soyinka et Ken Saro-Wiwa dans le panthéon des écrivains nigerians.