Le Trou
de Thomas Vinau

critiqué par Kinbote, le 30 mars 2008
(Jumet - 65 ans)


La note:  étoiles
"Le trou est l'empreinte de tes bosses"
Qui aurait pensé écrire un livre sur un sujet aussi « creux » ? Thomas Vinau, ce jeune poète français, s’est employé à combler cette lacune.
Sa manière d'écrire m’a fait penser à la technique des artistes contemporains : il fait feu de tout genre poétique (aphorismes, poésie minimaliste, prose etc.) pour donner corps à un objet à multiples facettes qui suscite la réflexion sans jamais la diriger. Son recueil comprend trois sections: le trou, « l’entre-deux » et « le bout du ciel », comme autant de stations pour « sortir du trou » sans cependant accéder au firmament (« Les dieux ne vivent pas dans le ciel / Ils ne le méritent pas »), car l’auteur reste attaché à une mélancolie salvatrice qui le retient de verser dans toute forme d’idolâtrie.

Les choses ne sont jamais catégoriques, verrouillées ; si Vinau écrit, c’est pour avancer, parvenir à trouver des fragments de vérité et sortir du marasme causé par la problématique humaine entre intérieur et extérieur (« Du dedans ou du dehors / Lequel déteint sur l’autre ? »), une manière de se tenir debout, entre ciel et terre. Les mots sont ses béquilles, des échelles de fortune qui, souvent chez lui, prennent l’allure de mur d’escalade. D’une prise à l’autre, la perspective se dégage et produit des vues fulgurantes (de superbes aphorismes) sur l’existence, un espoir de rédemption par la langue (« il faut voir au fond pour voir au-delà »), celle qui fouille les replis ombrageux, les peurs (« Piétine tes peurs/ elles te serviront de fumier ») et les blessures avant qu’un « un jour le trou » devienne « la caisse de résonance de ton rire. »

Un beau recueil paru dans une collection Le chant du cygne qui compte déjà des ouvrages, entre autres, de J.-P. Gavard-Perret et d’Otto Ganz.

L'extrait:

"Il aura plu toute la nuit. La terre a bu, l'eau a pansé ses cicatrices, les feuilles vertes brillent légèrement plus dans la fraîcheur. La brûlure s'est apaisée. Un jour tout neuf. Un jour clément
Petit vent, pierre humide, l'ombre plus froide que d'habitude. Un jour d'action. L'eau de la nuit aura nourri jusqu'à ton propre sommeil. Un nouveau sang en toi. L'entre-deux a l'air derrière toi, derrière le brouillard du fleuve."


Le blog de l'auteur: etc-iste.blogspot.com