Un froid d'enfer
de Joe R. Lansdale

critiqué par Sahkti, le 14 février 2008
(Genève - 50 ans)


La note:  étoiles
Foire aux monstres
Bill Roberts est un paumé. Six mois plus tôt, sa mère est morte et il n'a pas déclaré le décès afin de continuer à toucher la pension, mais il n'arrive plus à signer les chèques en imitant l'écriture de sa mère et le voilà sans le sou. Il décide alors de braquer une baraque à pétards du 4 juillet, avec un butin de 3000 dollars à la clé. Deux potes l'aident à monter le coup qui vire au cauchemar, les deux amis et un flic trouvant la mort, lors d'une course-poursuite un peu dingue, dans un marais infesté de serpents et de moustiques. Moustiques qui ne vont pas louper Bill et vont lui détruire le visage, ce qui lui donnera un ticket d'entrée pour un cirque ambulant un peu spécial qu'il croise en route pendant sa fuite. Une sorte de foire aux monstres avec un homme-chien, un homme avec une main sur le ventre, un cadavre de glace et j'en passe. Galerie hétéroclite de portraits profondément touchants et humains, au point que le road-movie en devient complètement accessoire et ce qui se présentait comme un thriller se révèle surtout être un fameux portrait de certaines tares de nos contemporains, pas ceux qui s'exposent dans le cas présent mais ceux qui les regardent avec moquerie et curiosité.
Une écriture alerte, un rythme soutenu. Petit bémol perso cependant sur la traduction, qui n'est pas mauvaise mais reprend littéralement certaines expressions, ce qui nous vaut une volée de "foutu ceci" ou "foutue cela", parfois un peu lassants, mais ceci est un détail dirons-nous.
Thriller? 7 étoiles

Dans la tradition des écrits de Harry Crews, Lansdale, nous sert un roman noir et drôle où les ploucs ont la belle part. Rien n’est tabou dans ce roman où personne n’est normal, ou sain. Sous le couvert de l’excentricité, les pires choses peuvent arriver, et le lecteur ne peut s’empêcher de rire devant la mauvaise tournure des choses.

Mais s’il reste fort divertissant, un froid d’enfer manque cependant de rythme. On aurait aimé pouvoir passer le livre avec un rythme comme celui de l’introduction, mais la vie avec les freaks vient ralentir l’histoire. Cette déception est accentuée par l’étiquette « Thriller » que Gallimard ose maintenant apposer sur certains numéros de Folio Policier. À croire que la plus prestigieuse maison d’édition de la francophonie est elle aussi en train de tomber dans le panneau des étiquettes aguicheuses.

Grass - montréal - 46 ans - 29 avril 2008