Meurtre au champagne
de Agatha Christie

critiqué par Jean Meurtrier, le 15 janvier 2008
(Tilff - 49 ans)


La note:  étoiles
La mort est nulle sans bulles
Et si Rosemary ne s’était pas suicidée le fameux soir de son anniversaire au luxueux cabaret «Le Luxembourg»? Et si elle avait été assassinée? Ce sont des questions que commence à se poser George Barton, le mari de la défunte Rosemary Marle, surtout depuis qu’il a reçu des lettres anonymes suggérant cette hypothèse. Mais alors qui a versé de la strychnine dans le verre de champagne de la victime? Quel est le mobile?
Serait-ce un crime passionnel? Il est manifeste que l’éblouissante Rosemary faisait tourner bien des têtes. Elle devait probablement entretenir des liaisons extraconjugales. Peut-être avec l’énigmatique Anthony Browne, ou alors avec le très respectable Stephen Farraday. Si cela se vérifiait, son épouse Alexandra aurait de bonnes raisons d’être jalouse. Sans oublier Ruth Lessing, la méritante secrétaire de George Barton, qui aurait pu se sentir injustement doublée par une Rosemary aussi belle que bête.
Ou alors l’aurait-on supprimée pour son argent? Nul n’ignore qu’elle a hérité d’une fortune colossale venant d’un ami de la famille, ce qui n’est pas le cas de sa jeune sœur, perpétuellement dans l’ombre de son ainée. Mais Iris Marle, d’apparence si sensible, est-elle capable d’un tel acte? De toute façon George a échafaudé un plan. Le jour des morts, pour l’anniversaire d’Iris, il réunira toutes les personnes présentes lors du décès de sa femme, dans le même établissement, à la même table. Le meurtrier n’aura d’autre choix que de tomber dans le piège tendu à son intention.
«Meurtre au champagne» est une belle intrigue policière, moins spectaculaire et plus statique que certains autres romans d’Agatha Christie, mais sans doute plus plausible. Les motivations et impressions des suspects sont magnifiquement reproduites, sans toutefois dépasser les limites imposées par le genre. Chacun d’eux est traité avec une attention égale, garantissant que le coupable ne sera pas un personnage oublié ressorti en dernière minute du chapeau de l’auteur.
Contrairement aux épisodes plaçant Hercule Poirot ou Miss Marple en tête d’affiche, cette enquête est menée collégialement par l’inspecteur Kemp, le colonel Race (entrevu dans d’autres récits dont «Mort sur le Nil») et un joker qu’il n’est pas opportun de dévoiler dans ce résumé. Grâce aux échanges d’information au sein de ce trio, le lecteur suit de près la progression des investigations, ce qui n’est pas toujours le cas avec un Poirot qui peut se montrer secret jusqu’aux révélations finales.
«Meurtre au champagne» n’a rien d’un best seller mais trouve très honorablement sa place dans la bibliographie de la reine du crime.
Passe le temps 4 étoiles

Rosemary, femme qui a en apparence tout (argent, beauté, mari, amant), se retrouve morte de façon théâtrale, empoisonnée lors d'un souper. Meurtre ou suicide ?

Dans la première partie, pour chaque chapitre on suit un personnage, dont peut-être le responsable de la mort de Rosemary.

« - [...] Il faut penser à ce qui s'est passé... Il faut réfléchir, vous rappeler... C'est ça, rappeler... Il faut revoir tous les événements de cette nuit-là, les passer en revue... Parce que vous vous rendez bien compte [...] que, si elle a été assassinée, elle a nécessairement été tuée par l'un de ceux qui étaient à table avec nous cette-nuit là. Vous vous en rendez bien compte ? »

Ça n'a pas le lustre des grands Christie, mais j'ai passé un bon petit moment de lecture.

Nance - - - ans - 13 avril 2020


Un toast fatal 7 étoiles

Ce roman d'Agatha Christie n'est peut être pas des plus mémorables, je l'avais d'ailleurs lu une première fois il y a quelques années et j'avais totalement oublié la fin c'est donc dire, mais je trouve qu'il se défend quand même plutôt bien. En effet il prend vraiment le temps de présenter tous les suspects, le fin mot de l'histoire est plutôt bien trouvé et il réserve quelques bonnes surprises.

Il est par contre un peu déroutant dans son déroulement car il est divisé en trois parties qui ne sont pas construites de la même manière, ce qui est assez rare chez l'auteur. On a également très peu d'empathie envers Rosemary qui est présentée comme une jolie gourde que quasiment personne ne regrette à part Georges, lui même d'ailleurs pas très intéressant. Le fait qu'il manque également d'un détective charismatique dans ce récit est fort dommage car Race est bien gentil mais pas vraiment marquant.

A cause de ces quelques défauts ce roman manque donc d'un petit plus qui fait qu'il n'est pas aussi marquant que d'autres enquêtes d'Agatha Christie. La lecture en a toutefois été très agréable et je l'ai bien aimé car cela reste une bonne histoire policière dans l'ensemble, mais je pense qu'il y a de fortes probabilités pour que j'oublie encore le coupable et il faudra donc que je le relise une troisième fois.

Koolasuchus - Laon - 34 ans - 15 juin 2018


Sortie de route 3 étoiles

J'ai vraiment dû lutter pour le finir celui-là. Clairement, on n'est pas dans le haut du panier concernant la reine du Crime. Pourtant, je n'ai rien contre les aventures ne mettant en scène ni Hercule Poirot ni Miss Marple ni les époux Beresford. Certains sont même très réussis comme Un meurtre est-il facile ? ou Cinq heures vingt-cinq.

Mais là, dieu que ce fut laborieux. On passe d'abord par une longue mise en revue des différents protagonistes de la haute société anglaise. Un homme politique ambitieux, une secrétaire dévouée, un patron soumis à une femme trop belle pour elle. C'est d'ailleurs cette écervelée qui est morte. Bref, tous les clichés sur pattes du roman à énigme "Christien" sont présents. Honnêtement, j'ai été parfois à deux doigts de m'endormir tant c'était inintéressant et hors-sujet par rapport au meurtre en cours. Comme si la romancière ne savait par quelle bout commencer son enquête et que détailler tous les personnages pouvait lui faire gagner du temps.

Il n'y a donc pas de notion de progression. Les deux limiers, Race et Kemp paraissent plus que tâtonner. Ils sont totalement à côté de la plaque et ce même dans les dernières pages en avançant au hasard des noms comme s'ils venaient de les tirer d'un chapeau. C'est même un des potentiels coupables qui donne la clé du mystère.

En conclusion, une histoire ratée parsemée de propos sur les domestiques, les jeunes d'aujourd'hui, d'un autre âge. D'accord, Agatha Christie était d'une autre génération, d'un autre temps. Mais quand même. Sauf sur la politique où il y a des commentaires de sa part encore étrangement d'actualité. Ce qui m'a fait esquisser un sourire ou deux. Mais pour le reste, c'est un des plus mauvais que j'ai lu.

Incertitudes - - 39 ans - 11 décembre 2017


A la vôtre !!! 9 étoiles

Voici un bien étrange roman. Imaginez un peu… Tout commence avec une nouvelle mettant en scène un enquêteur hors normes, un certain Hercule Poirot. Et voilà qu’au moment où la reine du polar et du crime se décide à le mettre en roman, elle supprime son héros belge et ne le remplace pas par un autre de ses enquêteurs favoris. Du coup, un roman sans vedette mais avec une intrigue alambiquée à souhait qui va certainement plaire à ceux qui refusent les histoires cousues de fil blanc… ou plus exactement noir, dans le cas qui nous préoccupe.

Tout commence donc avec un anniversaire qui se termine par le suicide de celle qui était à l’honneur, une certaine Rosemary. C’est du moins ainsi que Iris, sa sœur, George, son mari, Stephen et Alexandra Farraday, leurs amis, ont vécu cette tragique soirée…

Vous êtes en train de vous dire que s’il s’agit bien d’un suicide, ce n’est pas là le cœur du roman d’Agatha Christie… et s’il s’agit d’un crime, alors autant le dire tout de suite, une bonne fois pour toute ! Je vous comprends, mais admettez, pour une fois, que le doute pourrait bien faire partie du roman, des intentions de l’auteure. Un suicide, avec des raisons qui semblent crédibles, avec une police qui y croit et des sommités médicales qui l’ont bien confirmé… Et, surtout, un mari qui tente péniblement et progressivement de faire son deuil…

La construction du roman est très bien faite car nous allons nous retrouver à vivre cette soirée dramatique, mais aussi tous les mois qui suivront en nous mettant à la place de chacun des protagonistes Un événement vu à travers les yeux de chacun, avec des sentiments différents, avec des motivations variées et surtout avec la surprise de voir se confirmer les motifs d’un suicide programmé et des mobiles tout à fait réels et plausibles… pour un peu on s’y perdrait !

Il faudra attendre que le mari, ce bon George, décide de réinviter tout le monde pour l’anniversaire d’Iris, un an après, jour pour jour, au même endroit, au « Luxembourg », pour que le noir nous tombe dessus de façon irrémédiable… Oui, la lumière aura bien du mal à arriver.

J’ai beaucoup apprécié ce roman qui commence par une partie très psychologique. Pas de crime, pas de clarté dans les faits, juste des sentiments, des ressentis, des souvenirs. Petit à petit, Agatha Christie pose ses personnages, on s’y attache ou on les rejette et on se retrouvera en difficulté quand les rencontres et soirées viendront donner du sens à tout cela, mais pas celui que l’on avait, éventuellement, envisagé.

Finalement, c’est plutôt une bonne chose que Hercule Poirot ait disparu de ce roman car je suis certain qu’il aurait faussé les choses, voir même qu’il se serait trompé de coupable… Impossible ! Non, tout à fait envisageable. N’oubliez pas que s’il s’était trompé, si certains accusés avaient été pendus, personne ne serait venu vous le dire ! Ni Poirot le prétentieux, encore moins Hastings son fidèle admirateur, et je crois qu’Agatha Christie, elle-même, ne s’en serait pas vanté… alors qu’un policier et un ancien agent de sa majesté, en bonne intelligence, ne pouvait qu’acculer, certes avec difficultés, le coupable à se dénoncer ! Coupable ? Zut ! Je me suis trahi, vous savez maintenant qu’il y a eu au moins un crime dans ce roman policier…

Shelton - Chalon-sur-Saône - 67 ans - 29 mars 2011