Le petit héros
de Fedor Mikhaïlovitch Dostoïevski

critiqué par Dirlandaise, le 21 novembre 2007
(Québec - 68 ans)


La note:  étoiles
Petite enfance si fragile et éphémère
J'aime bien Dostoïevski quand il se met en tête de nous raconter une histoire à travers les yeux d'un enfant.

Cette courte nouvelle a été écrite en prison en 1849 alors qu'il venait d'être arrêté pour complot politique. Il s'agit d'un jeune garçon de onze ans qui obtient l'autorisation de passer le mois de juillet chez un parent éloigné qui habite un petit village de la province de Moscou. Ce parent est très sociable et reçoit beaucoup d'invités dans sa maison.

Donc, notre jeune héros, plutôt timide et réservé, s'occupe la plupart du temps à observer la société et à essayer de comprendre les agissements bizarres des adultes qui l'entourent. Il s'attache à une belle dame en particulier, Madame M., et devient rapidement son ami mais aussi son plus fervent admirateur. Cette dame est mariée à un homme très jaloux et elle doit user de ruse pour parvenir à rencontrer son amant ce que notre jeune ami étudie avec grande attention. Mais, il est persécuté par une autre jeune dame très jolie et frivole qui le prend comme souffre-douleur jusqu'à ce qu'un évènement tout à fait incroyable se produise et renverse la situation à l'avantage de notre jeune garçon et fait de lui "un véritable petit héros".

Je n'en dis pas plus pour ne pas tout dévoiler mais c'est tout à fait charmant comme histoire. C'est touchant et l'extrême naïveté du petit héros le rend particulièrement sympathique. Dostoïevski analyse avec une grande justesse les sentiments et la découverte du monde des adultes par un enfant, le faisant sortir ainsi de sa petite enfance et lui faisant perdre une partie de cette naïveté si fragile et éphémère qui la caractérise.

Dostoïevski règle aussi quelques comptes avec la classe aisée oisive et gâtée, par le biais du personnage du mari de Madame M. dont il fait une description tout à fait savoureuse :

"On le disait un homme intelligent. C'est ainsi que, dans certains cercles, on appelle une race particulière de l'humanité, engraissée sur le compte d'autrui, qui ne fait absolument rien, qui ne veut absolument rien faire et qui, suite à sa paresse éternelle, à force de ne rien faire, a un morceau de gras à la place du coeur."
un petit Dosto 7 étoiles

Trouvé en librio 2 €
Articulé comme une farce dans le style de celles de Shakespeare (auquel il fait référence lui-même dans le texte) voire une bouffonnerie à la Molière (le théâtre en moins il s'agit bien d'une nouvelle où le personnage et narrateur principal est ce petit héros).
La lecture était agréable quoique courte. 70 pages pour celles de la nouvelle, c'est court même pour un librio.
Cela approche de la qualité et des thèmes de l'auteur dans ses romans plus denses.
Je ne saurais dire si c'est un bon moyen de découvrir Dostoïevski car plus accessible. Probablement pas car la longueur n'habitue pas à la densité coutumière de cet auteur et sa profondeur de plongée dans l'âme humaine (russe?).
Pourtant c'était une agréable lecture. Le récit commence un peu comme par une farce et traite avec de recul d'un adulte des premiers émois d'un enfant tellement jeune qu'on a du mal à l'imaginer pubère(11 ans)... justement cette innocence et la réflexion dessus en fait l'un des points forts et les réflexions de galéjades dans les soirées mondaines va s'approfondir et faire resurgir doublement aussi bien ce petit que ce héros, confronté aux adultes et à leurs intrigues.
Une sorte débauche légère du roman L'idiot et de son prince Mychkine mais bien lointaine.
Une évasion vers une enfance insouciance et ses souvenirs les plus chéris dont le contexte de l'écriture explique probablement cela.

Magicite - Sud-Est - 45 ans - 5 juin 2021