Contre-enquête sur la mort d'Emma Bovary
de Philippe Doumenc

critiqué par Laure256, le 3 septembre 2007
( - 51 ans)


La note:  étoiles
pour retrouver Flaubert ...
Yonville l’Abbaye (Normandie, France), le 24 mars 1846 à deux heures de l’après-midi, Emma Bovary, 25 ans environ, décède par empoisonnement à l’arsenic. Aux deux médecins appelés à son chevet, le docteur Canivet et le professeur Larivière, elle a le temps de dire : « assassinée, pas suicidée ». Et comme chacun sait (nous dit le roman), en une seule prise, l’arsenic n’est presque jamais mortel. De plus, elle a des traces d’ecchymoses ici et là. Le commissaire Delévoye et son jeune assistant Remi, dépêchés de Rouen, vont mener l’enquête. Et l’on retrouve ainsi tous les personnages du roman de Flaubert, une belle flopée de suspects !
Tout le talent de Philippe Doumenc est d’avoir su retrouver cette écriture flaubertienne, un style fidèle et délicieux. Le lire est un régal ! Certes il prend quelques fantaisies libertines, attribuant notamment à Homais une fille de 16 ans quelque peu aguicheuse, il replace dans le contexte le jeune Flaubert, tout cela est très plaisant ! A lire donc comme un excellent exercice de style, qui ne vous donnera qu’une envie, relire Madame Bovary !
"Même Flaubert s'est laissé piéger !" 8 étoiles

Philippe Doumenc (1934- ) est un écrivain français né à Paris.
"Les Comptoirs du Sud" reçoit le Prix Renaudot en 1989.
En 2007; il publie "Contre-enquête sur la mort d'Emma Bovary" inspiré par le roman de Gustave Flaubert Madame Bovary, partant de la thèse que sa mort ne serait pas un suicide.

Emma Bovary a 26 ans quand on la retrouve morte après l'ingestion d'une forte dose d'arsenic.
"Comment ne pas se suicider si l'on a un peu d'âme et que le sort vous condamne à Yonville ?" affirmera Flaubert dans une correspondance avec George Sand.
Dans ce savoureux roman, Philippe Doumenc se plait à remettre en cause la théorie du suicide et de s'interroger sur un éventuel meurtre perpétré par l'un des protagonistes du fameux roman.
Qui des époux Homais (pharmaciens), de Rodolphe Boulanger (Dandy rentier du domaine de la Huchette), de Mr Lheureux (commerçant et usurier à ses heures), et de bien d'autres, pourrait avoir eu intérêt à faire taire la belle Emma ?
Les mobiles sont nombreux et classiques: Argent, liaisons amoureuses, réputation à préserver, ...
Au fil des pages, les déclarations de culpabilité s'empilent pour tourner au vaudeville.

J'avoue avoir passé un bon moment à la lecture de ce court roman. L'auteur respecte l'oeuvre de Flaubert et écorne encore un peu plus les "pantins bourgeois de Yonville".
Il ne faut pas y chercher un Polar haletant mais un excellent complément au roman du Maître.
Encore merci à Alma pour ce judicieux conseil.

Frunny - PARIS - 58 ans - 28 décembre 2015


Une autre version des choses 8 étoiles

Assassinat, ou suicide, voilà la question...Même si la version de l'auteur comporte parfois quelques petites invraisemblances, ce livre aussi passionnant qu'inclassable mêle les qualités d'un excellent polar et d'un petit bijou de littérature classique plein d'humour et de finesse. A dévorer...lentement pour ne pas en perdre une miette. Une invitation à (re)lire Flaubert.

Isis - Chaville - 79 ans - 25 novembre 2010


Qui a tué Emma Bovary? 10 étoiles

Flaubert nous a menti ou s'est-il laissé berner? Quand un des médecins qui a été appelé pour sauver Emma Bovary de son "suicide" raconte que les derniers mot étaient "assassinée pas suicidée", le parquet de Rouen décide de clarifier la situation...

Ce roman policier, car c'en est un, m'a rappelé la lecture de "L'Affaire du Chien des Baskerville" de Pierre Bayard où l'auteur veut prouver que Conan Doyle s'est trompé, mais le livre de Bayard est plus un essai, bien que l'auteur donne sa propre vision, qu'une relecture du roman, ce que le roman ci-critiqué est, dans les deux cas il y a un mélange de respect, ce genre d'exercice, proposer une autre lecture d'une oeuvre archiconnue, nécessite de bien connaître l'oeuvre originale pour ne pas faire d'erreur et que ça reste cohérent et l'auteur se moque un peu de Flaubert, soit en le traitant de menteur ou d'imbécile, il le met même en scène (Flaubert étant un ancien condisciple de l'inspecteur et de Charles Bovary).

Il faut bien entendu avoir au moins lu "Madame Bovary" pour apprécier à sa juste valeur ce roman, qui m'a donné envie de relire Flaubert pour savoir si l'hypothèse de Philippe Doumenc se vérifie.

Killeur.extreme - Genève - 42 ans - 16 février 2009


La deuxième mort d'Emma 8 étoiles

Cette enquête policière nous conduit au milieu du 19 ème siècle dans le village d'Yonville-l'Abbaye (seine inférieure) afin de connaître la vérité sur la mort de l'un des personnages les plus célèbres de la littérature française : Madame Bovary.

L'ambiance est formidablement rendue par l'auteur, fort d'avoir su trouver le ton qui sied à cette contre-enquête tout en la replaçant dans son contexte historique : l'année 1846, la fin du règne de Louis Philippe et son ordre moral, ce village normand où tout se sait dans le quart d'heure mais où on ne dévoile sur la place publique que les sous-entendus les plus scabreux.

Remi, le personnage principal, a la lourde tâche de découvrir la véritable cause de la mort d'Emma Bovary. Il assume cette fonction seul, contre vents et marées, lui l' inspecteur inexpérimenté chargé de suppléer au pied levé son supérieur écarté de l'affaire par une hiérarchie inquiète de voir se développer un climat nauséabond autour des notables locaux.

Il mène ses interrogatoires au pas de charge et offre au lecteur un florilège de portraits habilement croqués : le mari de la victime, anéanti, l'ancien amant organisateur de parties fines, le pharmacien et ami de la famille qui en sait peut être plus qu'il ne le dit, le curé détenteur du secret de la confession....
Sous l'apparente sérénité de cette petite bourgeoisie normande, se cache l'indicible que Remi finira par découvrir. Il comprendra les mystères d'une femme sans doute trop naïve et manquant cruellement de lucidité sur la perversion de son entourage.
Quant à l'ordre moral, il sera balayé deux ans plus tard lors de l'avènement de la deuxième république.
Philippe Doumenc sonde les âmes avec une redoutable efficacité et une grande sensibilité.
Il nous livre un ouvrage astucieux et plein d'audace qui éclaire le roman de Flaubert d'un jour nouveau pour notre plus grand plaisir.








Actes sud - 18 euros

Mmerliere - - 62 ans - 17 décembre 2007