Retour au pays
de Rose Tremain

critiqué par Cuné, le 28 août 2007
( - 56 ans)


La note:  étoiles
« Je trouve qu’il te va au poil, et je te dis ça complètement à jeun ! »
Voici l’histoire de Lev, quarante-trois ans, qui vient chercher en Angleterre de quoi donner un sens à sa vie. Après des années de communisme, son pays, dans l’Est, est sur le point de s’ouvrir au monde mais en attendant, il n’y a pas de travail. Il n’y a que le froid, intense, et la tristesse, terrible, qui s’abat sur sa vie : son épouse tendrement chérie vient de mourir, sa petite fille est aux soins de la grand-mère dans une cahute glaciale, et il n’y a pas d’argent. C’est courageusement, et avec un balluchon de quelques cours d’anglais, qu’il entreprend les cinquante heures de bus vers l’Angleterre. Il doit trouver un toit et un travail, et envoyer de l’argent au pays. Il va y arriver, rencontrer un tas de gens, partager avec eux quelques bons et mauvais moments, jusqu’au jour où il lui faudra bien revenir…
Dès les premières lignes, on sait ce qu’on va trouver dans ce petit pavé délicieux. Il y a un ton, oscillant perpétuellement entre la tendresse et l’âpreté, entre l’humour et le désespoir qui est toujours la marque des grands romans.
C’est tout autant une histoire d’émigrant, dans laquelle on retrouve un peu du « Comment peut-on être français » de Chahdhortt Djavann, ou du « Syndrome d’Ulysse » de Santiago Gamboa, qu’une histoire d’amitiés et d’amours. Lev est un personnage atypique, qu’on a envie de voir réussir, qui nous parait le mériter, et qui nous offre des heures somptueuses en sa compagnie. Du genre qui redonne foi en la lecture.
Il est où le bonheur... 7 étoiles

Lev, 43 ans, quitte son village natal d’Auror, pour aller en Grande-Bretagne où il espère gagner de l’argent pour vivre et faire vivre sa petite fille Maya et sa maman Ina après la fermeture de la scierie de Baryn dans laquelle il travaillait. Aussi peu de bagages professionnels que personnels, quelques mots d’anglais à son répertoire, il monte dans le car qui doit l’amener à Londres après une cinquantaine d’heures de trajet.
Le hasard le placera à côté de Lydia qui elle, espère y trouver un poste de traductrice.
L’arrivée à Londres sera loin de ce qu’il avait envisagé. La découverte de l’économie libérale, lui qui vient de quitter le joug communiste, l’interroge, le désoriente.
Il va rencontrer de nombreux personnages, croiser des gentils et des méchants, exercer plusieurs métiers dont un qui orientera sa vie et lui permettra d’envisager l’avenir, qui lui donnera "l’Idée".
Au fil des semaines, il se sentira moins solitaire, moins perdu dans cette capitale où il se fera des amis, sans jamais oublier, malgré la distance et le temps, Rudi sur qui il pourra toujours compter, ni Marina, son épouse décédée d’un cancer..

Cela ressemblait à un roman léger, cet homme malheureux et solitaire, qui tombe sur une gentille voisine de voyage puis qui croise la route de Sophie ; on pense au roman de Katarina Mazetti, Le mec de la tombe d’à côté, en moins drôle.
Mais au fil des pages, on a un portrait de notre société de consommation assez lucide et peu enviable ; l’économie libérale et ses laissés pour compte, le snobisme londonien, les populations émigrées...
Un héros attachant, un peu naïf, qui voit ses illusions fondre aussi vite que son argent, quelques visions pertinentes du monde "des riches" vu par les migrants, de l’extérieur puis de l’intérieur, ainsi que quelques belles histoires d’amitié et d’entraide, de rédemption en font finalement une lecture agréable.

Marvic - Normandie - 65 ans - 14 décembre 2020


C'est beau... 9 étoiles

Une très belle découverte que cet auteur et ce magnifique "Retour au pays". Les personnages sont si vivant et attachants, l'histoire est tellement prenante, impossible de lâcher tout ce petit monde avant la dernière ligne.
L'écriture de Rose Tremain est agréable, fluide, précise, sans fioritures. Voilà un auteur qui sait raconter des histoires. Et qu'est que c'est bon !
Un petit bémol, s'il faut en trouver un: les dialogues. Il y en a peut-être un peu trop, comme chez Anna Gavalda, mais pour moi, la comparaison s'arrête là.
J'ai vraiment adoré ce livre et vais me précipiter sur les autres romans de Rose Tremain.

Jemangeleslivres - - 50 ans - 31 juillet 2011