La promesse de Shanghaï
de Stéphane Fière

critiqué par BMR & MAM, le 8 août 2007
(Paris - 64 ans)


La note:  étoiles
L'envers du décor du miracle économique chinois
Voici le roman d'un auteur français, Stéphane Fière, qui vit actuellement en Chine, à Shanghai.
Son roman décrit la vie des paysans pauvres victimes de la corruption et des expropriations, devenus des "émigrants de l'intérieur" et qui viennent chercher du travail dans les grandes villes, en l'occurrence dans le bâtiment à Shanghai. La promesse de Shanghai c'est en quelque sorte, l'envers du décor du boom économique de la Chine.
La suite du roman décrit avec beaucoup d'ironie l'ascension sociale du héros et toutes les petites magouilles qui lui permettent peu à peu de s'en sortir.
On y découvre également les occidentaux (et les français) vus au travers des yeux chinois : décapant, même si parfois le trait semble un peu forcé.
L'écriture simple de Stéphane Fière et l'humour de son bouquin en font une lecture très facile.

[...]
Ici à Shanghai pas de pitié inutile : le gros poisson gobe le petit poisson qui avale les crevettes, le camion écrase la voiture qui écrase la moto qui écrase le piéton.

... Ensuite nous nous promenons le long de la rue Xizang et dans le marché aux oiseaux j'achèterai pour elle un grillon adulte et son panier en osier, il crissera du matin au soir pour que je me souvienne de cette journée.

... Ces amis étrangers, tout de même, comment peuvent-ils s'imaginer un seul instant que nous allons nous laisser prendre par leurs pièges grossiers et jeter par dessus bord nos six mille années d'histoire et le flamboiement de notre prodigieuse civilisation pour un bout de pain sans goût, un peu de leur verroterie, les gadgets peinturlurés de leurs techniciens ou des marchandises dont nous n'aurons jamais le moindre besoin. C'est certain ils nous prennent pour des japonais.
Français et chinois vu par un français de Shanghai 7 étoiles

Stéphane Fière, français ayant longuement vécu en Chine, nous fait suivre un jeune paysan chassé de ses terres qui échoue dans la capitale économique de la Chine comme manœuvre (au noir et sous payé). On découvre ainsi l’envers du développement économique, de cette ville en plein boom, avec le regard d’un paysan (très) naïf qui s’efforce de suivre le mouvement général vers l’enrichissement et le bien être matériel.
J’avais commencé à lire avec une certaine appréhension, car le thème m’a fait penser à L’équilibre du monde de Rohinton Mistry. Mais c’est beaucoup plus facile à lire et beaucoup moins dur ! La structure narrative et le style sont simples. C’est plaisant et ironique, écrit par un fils de Voltaire. Fière ne cherche pas à cacher les fils un peu grossiers de la trame (avec une chute finale attendue depuis de nombreux chapitres, même si ce n’était pas avec une telle crudité). Comment un chinois aurait-il raconté cela ? La réalité sans doute de façon plus sombre et moins ironique, plutôt à la façon d’un Lao She dans Le pousse-pousse.
Même si Shanghai a déjà beaucoup changé par rapport à la période décrite ici (exposition universelle oblige), sa lecture est une bonne préparation à un séjour : apprendre à recompter sa monnaie, regarder avant de traverser, apprendre à négocier, se méfier de filles…

Romur - Viroflay - 50 ans - 24 mai 2010