King Kong théorie de Virginie Despentes

King Kong théorie de Virginie Despentes

Catégorie(s) : Sciences humaines et exactes => Economie, politique, sociologie et actualités

Critiqué par Mieke Maaike, le 11 février 2007 (Bruxelles, Inscrite le 26 juillet 2005, 51 ans)
La note : 8 étoiles
Moyenne des notes : 7 étoiles (basée sur 7 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (22 823ème position).
Visites : 7 865  (depuis Novembre 2007)

Variation punk sur le thème « on ne naît pas femme, on le devient »

Dans cet essai pamphlétaire, Virginie Despentes utilise la métaphore de King Kong pour appuyer sa démonstration de la faiblesse à laquelle sont assignées les femmes. King Kong est un être puissant, dépourvu d’attributs sexuels ce qui le rend neutre, entretenant une relation asexuée avec l’héroïne, et incarnant l’idéal protecteur (sa propre force protectrice). Mais on connaît l’histoire : King Kong sera capturé(e) par les hommes, exhibé(e), puis assassiné(e). L’héroïne, alors dépourvue de sa puissance, rejoindra finalement un homme pour se mettre sous sa protection et donc se priver de liberté.

Ce livre s’inscrit dans la lignée de nombreux écrits anti-sexistes et revisite une fois de plus la fameuse citation de Simone de Beauvoir « on ne naît pas femme, on le devient ». L’auteure l’illustre de moultes exemples, pour la plupart autobiographiques, puisés notamment dans sa jeunesse de punkette puis dans son expérience de la prostitution.

Un aspect important de ce livre est la question du viol. Le viol fondateur de la prise de conscience de l’auteure de son assignation à la catégorie « femme » : « Cette proximité, depuis, parmi les choses indélébiles : corps d’hommes dans un lieu clos où l’on est enfermées, avec eux, mais pas semblables à eux. Jamais semblables, avec nos corps de femmes ». Le viol cristallisant toutes les injonctions faites aux femmes : la peur inculquée depuis le plus jeune âge, la culpabilité de ne pas se débattre à mort, et surtout l’obligation de silence. « Les premières années, après le viol, surprise pénible : les livres ne pourront rien pour moi. Ca ne m’était jamais arrivé. Quand, par exemple, en 1984, je suis internée quelques mois, ma première réaction, en sortant, a été de lire. Le Pavillon des enfants fous, Vol au-dessus d’un nid de coucou, Quand j’avais cinq ans je m’ai tué, et les essais sur la psychiatrie, l’internement, la surveillance, l’adolescence. Les livres étaient là, tenaient compagnie, rendaient la chose possible, dicible, partageable. Prison, maladie, maltraitances, drogues, abandons, déportations, tous les traumas ont leur littérature. Mais ce trauma crucial, fondamental, définition première de la féminité, « celle qu’on peut prendre par effraction et qui doit rester sans défense », ce trauma-là n’entrait pas en littérature. Aucune femme après être passée par le viol n’avait eu recours aux mots pour en faire un roman. Rien, ni qui guide, ni qui accompagne. Ca ne passait pas par le symbolisme. C’est extraordinaire qu’entre femmes on ne dise rien aux jeunes filles, pas le moindre passage de savoir, de consignes de survie, de conseils pratiques simples. Rien. »

Si dans ses romans Despentes ne brille pas par la finesse de son style, cet essai est relativement bien écrit. Alliant le discours et la forme, elle dénonce l’exigence pour les femmes d’être douce, gentille, polie et aimable. Dès lors, elle écrit comme elle donnerait des coups de boule, enchaînant virulence et fermeté, n’hésitant pas à utiliser des mots qu’on accepte mieux lorsqu’ils proviennent de bouches masculines. Cette écriture donne au livre un ton militant et rassembleur, y compris avec les hommes que Despentes invite à faire leur propre révolution.

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Un anti-sexisme musclé

8 étoiles

Critique de Veneziano (Paris, Inscrit le 4 mai 2005, 46 ans) - 28 septembre 2014

Ce petit essai anti-sexiste bouscule les idées reçues, et agite la lectrice et le lecteur, avec sa faconde habituelle, en donnant, comme souvent dans le trash, voire le glauque. Virginie Despentes donne ici un nouveau coup de poing, pour démontrer, en effet, la fragilité de la condition féminine, que rien ne justifie véritablement, ce qu'elle montre notamment en inversant les rôles entre femmes et hommes.
Elle livre un assez long passage sur la prostitution, en relatant sa propre expérience. Si elle n'est pas favorable à son développement, elle précise qu'il va être difficile de l'endiguer, car cette pratique constitue un moyen facile de se procurer de l'argent rapidement, ce qui n'enlève pas l'écoeurement de vendre son intimité. Mais, pour celles qui arrivent à passer cet a priori, les besoins financiers prennent le dessus et cela n'est pas condamnable. Elle n'en fait pas l'apologie, mais explique le mécanisme ; c'est intéressant.
Elle relate bien également son combat contre le viol, avec tout ce que cela a de fatigant, à la longue, avec ces témoignages en série qui lui sont fait. Elle ne manque pas de courage.
Je partage moins son avis sur le cinéma pornographique. Elle défend certes sa paroisse, mais assimiler cela à des films ordinaires, car ce segment peut tout aussi bien produire des oeuvres de qualité, relève quelque peu du raccourci. Elle spécifie en quoi les hardeuses inspirent du respect.

Virginie Despentes avance, avec force, des positions arguments, avec lesquelles chacune et chacun s'accorde ou non, mais qui ont le mérite de faire réfléchir, de prendre du recul, sur des idées reçues et des positions arrêtés de manière un peu rapide. Ce petit essai est donc utile.

un essai réussi

6 étoiles

Critique de Fanou03 (*, Inscrit le 13 mars 2011, 48 ans) - 30 juillet 2013

Mots crus, affirmations choc, style direct : c’est sûr, la prose de Virginie Despentes ne laissera personne indifférent. Je rejoins cependant la majorité des critiques : bien qu’on ne sera sans doute pas d’accord avec tout ce qu’elle avance, elle parvient dans ce très intéressant essai sur la condition de la femme – et celle de l’homme – à se positionner avec des angles de vue surprenants, qui font vraiment réfléchir sur les mécanismes régissant les rapports homme/femme et sur les préjugés qui peuvent exister, en particulier sur la féminité, le viol, la pornographie et la prostitution. L’écriture énergique et presque brutale sert parfaitement le propos. Construisant son discours avec vigueur, argumentant avec efficacité et trouvant l’exemple juste qui fait douter le sceptique, l’auteure se révèle à cette occasion une essayiste et polémiste de talent.

Punk-rock

6 étoiles

Critique de Kabuto (Craponne, Inscrit le 10 août 2010, 63 ans) - 21 janvier 2012

C’est intéressant, caustique et souvent pertinent. Même si mes convictions de « mâle dominant » ont été quelque peu bousculées par le discours parfois virulent de cet essai, j’ai apprécié la verve et le style direct. Ce livre m’a avant tout fait beaucoup réfléchir. Les expériences difficiles vécues et racontées crûment mais sans pathos excessif, nous font mieux comprendre la personnalité controversée de Virginie Despentes. A lire pour cogiter et pour secouer les idées reçues.

Un essai courageux et percutant

8 étoiles

Critique de Thorpedo (, Inscrit le 22 octobre 2009, 44 ans) - 24 octobre 2009

Despentes traite de la féminité, avec courage et un franc parler qui lui permet définitivement de ne pas appartenir à la catégorie des écrivains gnan gnan ou consensuels. On aime ou on est choqué, et bien j'aime ce style direct, qui ne donne que plus d'efficacité au propos. Certains la trouvent grossière, ça se discute. Sa position est tranchée et à ce titre parfaitement critiquable, mais l'analyse est intéressante et a le mérite de taper dans la fourmilière, et c'est tout ce que l'on demande à un essai de ce type. Sa vision du féminisme est assez originale, bien qu'un peu excessive parfois. Sur la sexualité et certains rapports hommes-femmes, son analyse est juste et brise quelques tabous.

Ce petit essai peut être lu par tous (plus de 15 ans tout de même).

Le franc-parler par excellence

10 étoiles

Critique de Baader bonnot (Montpellier, Inscrit le 11 janvier 2008, 40 ans) - 30 avril 2009

Une femme qui a décidemment des idées et du caractère à revendre. Brisant les tabous du sexe, des fantasmes, des pulsions, de la pornographie, ce petit essai féministe et subversif témoigne d’une liberté absolue.

Bien que très court (150 pages) « King Kong Théorie » sensibilise, choque mais surtout ouvre des voies pour réfléchir à la place de la femme. Virginie Despentes décrit avec justesse que le féminisme ne peut pas être un combat si l’on ne définit pas la place de l’homme, qu’au lieu de comparer l’homme et la femme il vaudrait mieux les accoler. Le passage où l’auteur nous parle de son viol est assez personnel et laisse le lecteur dans le flou, mais la description de cet acte barbare est très instructive.

Virginie Despentes décrit également avec sincérité la part inconsciente qui réside en nous et qui se manifeste lors des pulsions sexuelles. La masturbation est selon elle une pratique indispensable à la recherche de la jouissance absolue et montre à quel point le tabou posé sur cette pratique est une bêtise. Le monde du sexe est un véritable marché omniprésent de la pornographie jusqu’à la simple publicité. Le sexe est une chose que l’on cache puis que l’on suggère afin d’en tirer profit.

Enfin selon l’auteur, l’homme s’admire et la femme n’est qu’un miroir. Pendant l’acte sexuel, l’homme se verrait déjà en train de raconter ses exploits à ses potes et que finalement, si l’on poussait la logique un peu plus loin, « le réel désir des hommes serait de s’enculer entre eux », ce qu’ils ne peuvent accepter dans leur conscience.

Les références bibliographiques sont nombreuses ce qui montre que le travail réalisé par l’auteur a été colossal. Virginie Despentes propose un féminisme intelligent loin des clichés que l’on connaît depuis 68. Elle décrit par ailleurs l’évolution du marché du sexe qui a explosé depuis l’arrivée des nouvelles technologie constituant une sorte de prostitution légale (l’auteur s’est d’ailleurs prostituée avec l’arrivée du minitel).

Un essai subversif qui montre que l’auteur n’a pas que du talent mais aussi de l’intelligence.

Bof

4 étoiles

Critique de Sophie_752001 (Vitry sur Seine, Inscrite le 12 février 2008, 38 ans) - 12 février 2008

Il n'y a que le premier chapitre qui m'ait plu, le reste n'est pas très intéressant.
Complètement différent de son autre livre "Teen spirit" qui m'avait davantage amusé.

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