L'imprévisible
de Metin Arditi

critiqué par Sahkti, le 17 janvier 2007
(Genève - 49 ans)


La note:  étoiles
Renaissance italienne
Superbe texte de Metin Arditi sur la passion. Celle de l'art, de l'âme et de la chair. Guido Gianotti, historien d'art, rencontre Anne-Catherine Hugues autour d'une expertise d'un tableau supposé être de Bronzino. Parallèlement à cette quête de paternité picturale qui permet à Metin Arditi de libérer énormément de chaleur et de sensualité dans ses mots (quel talent pour parler d'un tableau, le composer sous les yeux d'un lecteur admiratif!) s'esquisse une relation tendre et fragile entre un homme complexé par une sexualité défaillante et une femme à la carapace hautaine qui se livre petit à petit.

A l'exception d'un gros bémol sur la fin que je trouve quelque peu facile et attendue, je suis tombée sous le charme de cette histoire pleine de romantisme, teintée d'un soupçon d'enquête quasi policière lorsqu'il faut identifier une peinture décrite dans les moindres détails. L'écriture de Metin Arditi est magique, il arrive à faire naître diverses sensations puissantes autour d'une oeuvre d'art de la Renaissance italienne, d'une main qui capte le regard, d'un texte mystérieux qui invite à la découverte. Pas à pas, on progresse avec Guido Gianotti dans ses recherches, on espère que le tableau va livrer tous ses secrets. Le personnage de Guido est intéressant à plus d'un titre, homme que la vanité aveugle régulièrement, que les complexes étouffent, que l'âge ne rend pas plus sûr de lui, que l'amour naissant transforme en un jeune homme jaloux et inquiet. Un personnage qui a plus de consistance à mes yeux que celui de Anne-Catherine Hugues, même si celle-ci joue un rôle très important dans l'histoire. Une histoire dont le personnage principal est un tableau. Magnifique en l'occurence.
Encore un peu de la petite mort avant la vraie 8 étoiles

Un roman intense, sensuel et prenant par un très bon style fluide et d’une grande qualité.

Sans de nouveau résumer l’histoire, on peut être pris par le récit tantôt suggestif et qui pourtant ne laisse pas planer de doute sur la compréhension. Tantôt presque crue et pourtant teintée de tendresse, cette romance crépusculaire entre Guido et Anne-Catherine est émouvante.

Cette histoire a fait remonter de ma mémoire le livre de Jean-Philippe Postel « L’affaire Arnolfini » qui évoque de manière didactique l’histoire d’un mystérieux tableau de la renaissance.

J’ai en tout cas découvert un auteur de qualité en la personne de Metin Arditi.

Pacmann - Tamise - 59 ans - 17 juillet 2020


Moïse croisant la providence. 9 étoiles

Moïse croisant la providence.

Un texte magnifique et sensuel. Une recherche sur une peinture de Bronzino décrite avec une minutie déroutante.
Un homme qui se cherche à l'aube de son crépuscule. Voici les trois ingrédients de ce superbe roman.
Metin Arditi (que je lis pour la première fois grâce aux précédentes critiques) m'a furieusement fait penser à Paul Auster.
Une belle démonstration.

Monocle - tournai - 64 ans - 5 juillet 2015


La Renaissance, et la re-mort 8 étoiles

Tout a déjà été dit mais comme ce livre m'a été gentiment prêté par Débézed je voulais qu'il reste une trace de ce que j'en avais pensé.
J'ai beaucoup aimé le parallèle entre l'histoire du tableau, qui se révèle dans sa splendeur petit à petit, sans cesse plus vrai, sans cesse plus beau, qui est sublimé au fil du livre...et celle de l'homme,sur la pente descendante de sa vie, victime de sa lente décadence.
L'histoire d'amour est plutôt bancale mais elle n'en est que plus touchante.
Parce qu'elle est triste mais jolie quand même.

Sissi - Besançon - 53 ans - 3 décembre 2010


Une petite friandise ! 8 étoiles

Quelle bonne surprise que ce petit roman d’Arditi, les critiques que j’avais lues ne m’avaient pas laissé penser que j’allais découvrir un vrai petit bonbon, comme disent maintenant les gens de radio et de télé, une sucrerie, une friandise que j’ai dégusté avec plaisir.

Un bonbon pas trop sucré, pas trop fort, un bon au goût sobre comme le style de ce roman sans fioriture où les formules brèves et quelques fois elliptiques laissent entendre plus que ce qu’il y a sur le papier. Mais un bonbon pétillant sur la langue comme cette enquête sur ce tableau que cette grande bourgeoise genevoise veut vendre pour cause de séparation, qui petit à petit révèle ses mystères à travers une enquête exaltante conduite, jusqu’au cœur du « quinquacento » florentin, par un vieil expert séducteur sur le retour.

Un bonbon tendre et délicat comme cette société genevoise imprégnée d’art et de culture, comme ces deux vieux amants, elle en été, lui en automne, pour parodier une chanson de Serge Reggiani, et aussi comme le style de ce roman tout en nuances et finesse.

Mais aussi, un bonbon qui laisse une certaine amertume dans la bouche comme celle qu’éprouve vieil amant qui ne peut plus satisfaire ses conquêtes comme Romain Gary l’a si bien écrit « Dans au de-là de cette limite votre ticket n’est plus valable » et qui doit accepter d’entendre le fameux « ce n’est pas grave » qui assomme définitivement les amants défaillants qui sentent déjà l’odeur de la mort rodée à travers ces premières défaites.

Et même, une certaine aigreur en fond de bouche comme celle que ce grand expert ressent quand il constate que tout le talent qu’il a déployé tout au long de sa vie n’en fera jamais l’égale de cette «… grande bourgeoise, impudente par droit divin et jugeant inutile de voiler sa suffisance. » L’aigreur aussi de ce fils d’émigré italien qui, dans cette Suisse riche et guindée, supporte difficilement « … dans l’air un petit parfum de racisme baigné de bonhomie qui était à la fois patelin et odieux. »

Une petite friandise au goût doux amer qui parle d’art, d’amour, de vieillesse, de décadence, de xénophobie feutrée et de la différence induite par la naissance et l’argent qui l’accompagne. Beaucoup de choses dans un petit roman qui démontre, une fois de plus, que la longueur en littérature n’est pas forcément le seul gage de talent.

Débézed - Besançon - 76 ans - 21 juillet 2009


une fin « explosive » ! 8 étoiles

L’art, l’amour, sont convoqués au chevet de cet « imprévisible ». Un court roman, magnifiquement écrit, en phrases courtes, en dialogues. C’est direct mais sensible, sensuel, du grand art !
Guido Gianotti, professeur d’art en retraite et spécialiste de la Renaissance, est contacté par Anne-Catherine Hugues, pour expertiser, donner son avis sur un tableau. Tout les sépare. Elle est née avec une cuillère d’argent dans la bouche, il est né dans une famille qui sert ceux qui ont une cuillère d’argent dans la bouche. Il en conçoit du ressentiment pour ce genre de milieu et une forme de complexe. Néanmoins … les circonstances, les choses comme elles vont, la nature du tableau à expertiser, vont créer un miracle entre ces deux-là. Un miracle bref mais un miracle. Oui, il faut dire que l’un comme l’autre ne sont plus de première jeunesse et notamment lui, à un âge où les hommes se posent des questions quant à leur toute-puissance physique ! Et donc la fin sera brutale et explosive, et d’ailleurs la fin … on l’a au début ! Pourquoi pas ? De toutes façons, on ne le sait qu’à la fin !

« De l’index, je lui caressai la joue. Le geste aurait pu être tendre. Il n’était que fat.
Si à cet instant le courage m’était venu de dire : « Moi aussi je reviens de l’autre rive. C’est à ta beauté, à ta grâce, à ton amour que je le dois », les choses se seraient sans doute déroulées autrement. Nous nous serions raconté nos blessures. Nous les aurions apaisées. Ous nous serions dit : ce n’est rien. Nous aurions formé un couple.
Mais j’eus peur. Une confidence en aurait amené une autre. J’aurais fini par me trahir. Elle aurait compris que ce qui m’importait le plus, à cet instant, ce n’était pas de l’aimer. C’était de me sentir un homme. Que mon histoire d’amour, c’était avec moi-même que je la vivais. Alors je ne dis rien. »

Ca c’est la partie humaine, à la psychologie bien fouillée. Mais il y a aussi une partie plus … descriptive, plus … artistique, en rapport avec l’art, la peinture de la Renaissance. C’est très fin, fort documenté et donne presque l’impression de devenir un technicien de l’art de la Renaissance, de savoir plonger dans, et décrypter, une énigme qui remonte à des siècles !
Metin Arditi sait partager son savoir et doit s’avérer excellent pédagogue.

Tistou - - 67 ans - 30 juin 2009


Vies cachées, vies gâchées 7 étoiles

Ce roman est d’abord l’histoire d’un tableau qui en cache un autre et cette partie là est très réussie. Metin Arditi sait conter une histoire même si j’ai trouvé son style un peu trop neutre. Il est manifestement érudit, peut-être collectionneur. Et il nous prend habilement à son piège. J’ai un moment pensé qu’il romançait une histoire vraie. Il a choisi une époque le seizième siècle, un lieu Florence l’unique, un drame le désir et la jalousie qui donnent à son livre un attrait et parfois un peu de magie.

Mais Arditi a voulu lier cette histoire de vie cachée à une autre, celle d’un vieux professeur d’histoire de l’art. Et là j’ai beaucoup moins marché. J’ai trouvé la relation entre Guido et Anne-Catherine bien superficielle et sans grand intérêt, probablement parce que l’auteur a écrit son livre en monologue et non en récit. Il en résulte que, hormis Guido, les autres personnages sont un peu schématiques. Et la fin est ratée. Metin Arditi aurait dû conclure son histoire par la scène de la vente aux enchères qui est une vraie réussite.

« J’avais passé ma vie à cacher mes émotions…Ne pas plonger dans le regard de l’autre…Ne pas risquer la douleur ». Comment quand on a vécu ainsi, éprouver de la passion ? Il est trop tard. Peut-être le livre eût-il été différent si Arditi avait écrit un roman sur le désir, celui qui tout à la fois conduit à la vie cachée de ces Florentins de la Renaissance et révèle la vie gâchée de ce vieux Genevois du vingt et unième siècle.

Un peu déçu donc mais bien sûr ce n’est qu’un avis.

Jlc - - 80 ans - 24 avril 2009


Lecture satisfaisante 7 étoiles

L’écriture est fluide, c’est un livre qui se lit bien. J’aime l’art de la peinture et plus particulièrement Bronzino, peintre de cour de l’aristocratie italienne au seizième siècle. Ce livre m’a d’ailleurs donné le goût d’approfondir mes connaissances sur cet artiste.

On ne sait pas trop où l’auteur veut nous mener, j’ai aimé le suspense avec le couvercle de Bronzino, mais le drame du personnage principal m’a plus ou moins touché. Je ne me suis pas sentie complice de ses déboires.

Nance - - - ans - 24 février 2009


Cruelle lucidité 8 étoiles

Il y’a une belle simplicité dans cette jolie histoire d’un homme d’âge mur qui retrouve la fougue de sa jeunesse grâce à la propriétaire d’un tableau dissimulant une énigme digne de son talent d’historien d’art. L’alternance entre l’idylle et l’expertise du chef-d’œuvre donne un curieux mélange. Un chapitre sur la renaissance italienne, l’autre sur le viagra. En même temps, c’est ce qui fait son charme. Le portrait de Guido est touchant, authentique et l’on se réjouit qu’il puisse vivre pleinement, un certain bonheur, que d’autres n’auront pas la chance d’éprouver à ce moment de leur existence.

Je m’interroge encore à savoir qu’est-ce qu’Arditi voulait que je retire son roman ? L’homme payera en quelque sorte pour sa vanité, mais je ne crois pas que ce soit l’essentiel du propos.

Aaro-Benjamin G. - Montréal - 54 ans - 3 février 2009


Les mystères de la peinture... 7 étoiles

Anne-Catherine, bourgeoise genevoise et Guido, historien de l'art, se rencontrent autour d'un tableau dont ils cherchent à percer le mystère….

J'ai été plus captivée par toute la recherche historique que par l'histoire entre Anne-Catherine et Guido. Metin Arditi donne une belle définition de l'histoire de l'art: "L'histoire de l'art, c'est un paradis d'émotions protégées". L'auteur nous emmène avec lui à la découverte de ce tableau et de son histoire. On voit la peinture, les craquelures, les jeux de lumières; on sent l'odeur des liasses d'archives épluchées par Guido dans les bibliothèques...
Mon état d'historienne de l'art explique certainement cette préférence pour cet axe du roman.. Mais je tiens à soulever tout l'intérêt également des réflexions de Guido sur les relations humaines, la solitude et la Vie.
Ce livre se lit rapidement, car il est écrit en toute simplicité..

Jo - Quelque part au coeur des Ardennes - 47 ans - 13 janvier 2009


Court mais bon... 8 étoiles

Un historien de l'art, fils d'émigré italien, est appelé par une dame de la haute société de Genève afin d'évaluer un tableau de la renaissance florentine. Cette rencontre entre un érudit de la soixantaine, perturbé par ses difficultés sexuelles, et une dame sensible d'apparence hautaine et sèche va donner lieu à une belle histoire d'amour. C'est aussi le début d'une passionnante et érudite plongée dans le monde de l'art.

Contrairement à ce que le titre indique, l'histoire est assez prévisible, mais il n'empêche qu'on ne s'ennuie pas une seconde. C'est un livre court et qui se lit très vite, mais le plaisir est au rendez-vous, que demander de plus ?

Saule - Bruxelles - 58 ans - 27 décembre 2008