La fin des paysages
de Luc Lang

critiqué par Sahkti, le 11 janvier 2007
(Genève - 49 ans)


La note:  étoiles
Traque dans le passé
C'est un livre à tiroirs, avec des échos et une mise en abîme permanente. C'est le récit des docks de Liverpool à marée basse, rebondissant sur un précédent opus de Luc Lang "Liverpool, marée haute".
Le déchargement d'oeuvres d'art, une grande exposition pour inaugurer une antenne nouvelle de la Tate Gallery, la volonté de quelques-uns de transformer les quais en espace culturel et tant pis pour la colère des gestionnaire du ports, des caisses lâchées par une grue, la disparition dans l'eau de trésors de l'art africain et aussi un vol, commis par un homme mystérieux qui ne se cache pas vraiment lorsqu'il prend possession du larcin. Des pièces d'une collection patiemment rassemblée par Abel Manson, qui meurt au début du livre. Martin Finlay, son bras droit, prend le relais, mène l'enquête, organise tout et rien et, surtout, se fait le porte-voix de l'histoire d'Abel et de son frère Jason, de leurs femmes respectives qui sont aussi deux soeurs, de disparitions dans le passé, de souvenirs enfouis qui brouillent les cartes lorsqu'ils refont surface et d'une certaine Afrique colonisée que l'on n'hésita pas à piller...

Tout cela est dense, complexe et le procédé d'écriture de Luc Lang, des phrases courtes constamment entrecoupées par trois petits points, traduit assez bien le souffle court qui est celui de Martin au fil de ses découvertes, mais aussi du lecteur qui doit ingurgiter tout cela et assimiler chaque info au fur et à mesure qu'elle se présente. Pas simple, parfois un peu trop pesant, presque confus. Entre les délires comateux de Martin Finley et les silences de son entourage, il y a de quoi se perdre. Trop de directions différentes à mon goût, même si toutes les routes finissent par mener au même chemin. L'impression quelque peu dérangeante que par moments, l'auteur s'est amusé à perdre son lecteur. C'est dommage parce que c'est une belle histoire qui nous est contée là, un récit très humain occupé par des personnages invisibles et présents à la fois, des êtres qui apparaissent assez peu et occupent cependant toute la place dans l'histoire. J'aurais aimé que Luc Lang s'en préoccupe davantage, leur laisse un plus grand champ d'action, quitte à laisser un peu Martin Finley de côté. Mais faire cela, ça aurait été remettre en question le processus narratif employé, cohérent du début à la fin. et celui-ci est de qualité, comme un compte à rebours qui permet de comprendre, les dernières pages venues, tous les fils qui servent à tisser le récit d'une existence, basée en grande partie sur les rêves, l'apparence et le mensonge. Pas vraiment séduite, juste un peu charmée.