Le portrait de Mr. W. H.
de Oscar Wilde

critiqué par Mieke Maaike, le 20 novembre 2006
(Bruxelles - 51 ans)


La note:  étoiles
Enquête au cœur des Sonnets de Shakespeare
Les Sonnets de Shakespeare sont introduits par la dédicace « Au seul générateur des Sonnets que voici Mr. W.H. félicité et cette éternité que promet notre poète à jamais vivant sont souhaitées par le bienveillant aventureux divulgateur T.T. ». Qui est ce mystérieux Mr. W.H. ? Pendant des siècles, les théories de différents experts se sont succédées. Wilde y ajoute la sienne sous la forme de cette longue nouvelle.

Le narrateur discute avec son vieil ami Erskine qui lui raconte l’histoire d’un de ses compagnons de jeunesse, Cyril Graham, convaincu d’avoir percé le mystère de l’identité de Mr. W.H. Selon lui, il s’agirait d’un jeune acteur qui jouait les rôles féminins comme c’était la règle dans le théâtre élisabéthain, et dont Shakespeare était follement amoureux. Mais Cyril Graham décède avant d’avoir pu récolter toutes les preuves pour soutenir sa thèse. Intrigué par cette histoire, le narrateur va à son tour se plonger dans ces Sonnets pour tenter d’en découvrir la clé.

C’est l’occasion pour Wilde de développer avec brio, passion et érudition son interprétation des Sonnets, en les citant abondamment, les décortiquant, les éclairant par des références à la société dans laquelle vivait Shakespeare, parsemant ses découvertes de réflexions personnelles sur l’art en général et le théâtre en particulier.

En réalité, ce livre contient la matière pour un essai. Mais comme il est difficile de soutenir impunément la thèse de l’homosexualité de Shakespeare en pleine période victorienne, surtout lorsqu’on commence soi-même à avoir une réputation sulfureuse, Wilde a préféré utiliser le masque de la fiction. Cette forme permet aussi à Wilde de donner au texte une dimension plus dramatique et de l’agrémenter d’aphorismes et de paradoxes qu’il chérit tant.

Cette nouvelle est publiée en 1889, soit un an avant « Le Portrait de Dorian Gray » dont elle éclaire particulièrement bien la passion de Dorian pour l’actrice. Cette nouvelle permet aussi à Wilde de nous faire partager son admiration communicative pour Shakespeare.
The love that dares to speak its name ? 2 étoiles

Qui est ce Mr W.H. ?

De Shakespeare lui-même se dédiant ses propres sonnets à Wrigthesley Henry, comte de Southampton et mécène de l'auteur, en passant par l'éditeur dédicaçant en fait à un ami imprimeur, les spéculations fusent depuis plus de 400 ans... et ce n'est pas prêt de s'arrêter !

Oscar Wilde, grand lecteur de Shakespeare, ajoute ici son grain de sel. Pour lui Mr W.H. = William Hughes, jeune acteur ayant travaillé pour le dramaturge.

L'hypothèse William Hughes était alors en vogue, émise et popularisée par Thomas Tyrwhitt.
Wilde s'en empare, et la place au coeur d'une intrigue vrai-faux qui prend -littéralement- la vie de ses personnages.
Jeune acteur qui aurait quitté la Compagnie du Globe pour une troupe rivale, à la beauté telle que Shakespeare en était amoureux, William Hughes revit sous nos yeux...

Arnaque ? A vous de voir !

Présenté comme une nouvelle mais à lire comme un essai, personnellement j'en ai trouvé la lecture longue, lourde, chiante, et j'avoue avoir survolé des passages.
Il y a un très bon jeu autour de la réalité et le fabriqué, le sujet est intéressant, mais voila : les querelles d'experts sur le théâtre shakespearien, agrémentées de lectures de sonnets décortiqués et fouillés en quête de preuves pour une théorie, moi, ça ne passe pas.

Oburoni - Waltham Cross - 41 ans - 14 décembre 2008