L'homme qui prenait sa femme pour un chapeau
de Oliver Sacks

critiqué par DomPerro, le 19 juillet 2006
( - - ans)


La note:  étoiles
Fictions réelles d'esprit inimaginable
Célèbre neurologue new-yorkais, notamment incarné par Robin William dans le film L’Éveil, Oliver Sacks renoue avec une certaine tradition hippocratique de la littérature médicale qui a eu recours aux histoires de cas pour représenter le tableau clinique des maladies. Les récits cliniques, quelquefois un peu trop techniques, mais toujours humains, décrits par le Docteur Sacks se situent bien au-delà des limites de la normalité. En réalité, ils sont au seuil de la fiction.

Devant ces graves maladies de l'âme, le lecteur sera précipité dans la plus grande perplexité. En effet, une troublante galerie de patients étranges, voire de personnages, peuple cet ouvrage : un musicien qui ne peut reconnaître les objets; un marin pour qui le temps s’est mystérieusement arrêté entre 1940 et 1950; une dame d’un âge avancé qui imite dans la rue les faciès des passants; un homme qui est persuadé être un chien et qui renifle les odeurs du monde; ces deux jumeaux arriérés mentaux capables de résoudre de complexes calculs numériques, et tant d’autres cas qui témoignent tous des manques ou des excès de l'esprit humain.

Pour la composition de son rôle dans Rain Man, Dustin Hoffman s’appuya à partir de la lecture du cas des jumeaux arriérés mentaux. Aussi, ce livre inspira le metteur en scène Peter Brook en France, dans L’Homme qui.

Étrange objet littéraire, en équilibre entre la médecine et le roman, L’Homme qui prenait sa femme pour un chapeau met en scène des héros anonymes qui mènent de tragiques batailles intérieures devant lesquelles l’équipe médicale la plus expérimentée ne peut intervenir, car désarmée devant ces absurdités inimaginables.
Fabuleuse découverte 10 étoiles

Ce livre est fabuleux et je le recommande chaleureusement à tous les lecteurs, scientifiques ou nuls en sciences ! Pour l'apprécier, nul besoin d'avoir la moindre notion de neurologie, un brin de curiosité suffit ...

Le style est extrêmement clair, agréable et facile à lire. Je ne parlerai pas de vulgarisation scientifique mais plutôt d'un souci permanent d'expliquer les choses de la manière la plus simple possible.

J'aimerais également rappeler que l'approche de Sacks, résolument humaniste et toujours à l'écoute du patient, a ouvert une nouvelle page dans l'histoire du traitement de la maladie ou dégénération mentale.

Enfin, je terminerai cette critique en précisant qu'à aucun moment, le docteur Sacks ne fait dans le "sensationnalisme".

Un livre un peu inclassable mais un de mes coups de coeur de ces dernières années.

Bebmadrid - Palma de Mallorca - 44 ans - 16 août 2015


Pour tous 7 étoiles

Un autre neurologue aurait fait de cet essai un ouvrage adressé exclusivement à ses collaborateurs ou aux hommes de métiers, par un vocabulaire complexe et une langue fastidieuse. Sacks a fait de cet ouvrage autre chose.

Il s’agit de résumés bref mais précis des cas cliniques les plus insolites et graves qu’il a pu rencontrer dans une partie de sa carrière, aux alentours des années 80.
C’est donc l’histoire d’un marin perdu, de Ray aux mille tics, d’un artiste autistique, d’un mélomane encyclopédique, de patients se tordant de rire face aux mimiques mal cachées du discours d’un président, la femme désincarnée… L’histoire de 24 patients, qui sont même plus que des patients.

Oliver explore presque le paranormal ; des maladies inconnues, rarissimes et la plupart du temps sans remède. On en vient à se demander ou sont les limites de la génétique de l’homme, des pathologies neurologiques et cognitives ; elles sont sans doute aussi loin que celles de l’univers !

Sacks est donc plus qu’un médecin ; il ne compte pas s’arrêter au traitement du corps mais s’arrêter sur le traitement de l’esprit, qui serait sans doute la solution à de nombreuses pathologies comme l’autisme ou le syndrome Gille de la Tourette.

Elya - Savoie - 34 ans - 6 septembre 2009


La connaissance du cerveau 8 étoiles

DomPerro nous parle opportunément de ce livre très curieux, très intéressant !
L'étude de ces cerveaux détraqués a fait faire à la médecine des progrès prodigieux. Mais ç'est resté une étude empirique : comme c'est bien expliqué dans le livre, c'est à partir des anomalies qu'on a essayé de comprendre comment fonctionnait le cerveau. Par exemple un bonhomme, à la suite d'une lésion, perd la connaissance de l'anglais ; on repère la lésion et on voit l'endroit du cerveau où s'est enregistré la langue.
Mais les études se sont fortement accélérées avec l'ordinateur et les images digitales. On n'est pas encore arrivé à la compréhension des choses, mais l'observation des processus se précise de plus en plus.
On sait aujourd'hui où se logent les mémoires instantanées, auditives, visuelles... ; où s'entend la musique, la parole, les bruits... ; on voit aussi où se place la pensée active et la pensée qui fait appel à l'imagination... (sans toutefois comprendre, par exemple, ce qu'est l'imagination.)
On arrivera certainement bientôt à tout comprendre et à pouvoir vraiment guérir les anomalies du cerveau.
Mais alors, la menace de manipulation des cerveaux sera imminente et les conséquences effrayantes.

Ce qui m'avait le plus frappé dans ce livre est l'histoire des deux jumeaux calculateurs, dont parle DomPerro : on avait observé qu'ils s'amusaient à trouver des nombres jusqu'à quatre chiffres ; et quand ils avaient trouvé, ils riaient comme des fous (ben oui !) et se congratulaient. En faisant des recherches, on s'est aperçu que ces nombres étaient des nombres premiers ! Avec un papier et un crayon, il faudrait des journées entières pour les trouver et ces "fous" les trouvaient en quelques minutes !
Le livre nous raconte que, malheureusement, on a "guéri" ces malheureux : ils ont cessé de "jouer" et sont devenus neurasthéniques !
C'est donc un livre passionnant, qui nous raconte l'étude de cas très étranges qui ont fait progresser la science dans un domaine nouveau, qui pourrait s'avérer très bénéfique et, sans doute aussi, très dangereux.

Saint Jean-Baptiste - Ottignies - 88 ans - 20 juillet 2006