Lui
de Patrick Besson

critiqué par Chat pitre, le 8 juillet 2001
(Linkebeek - 53 ans)


La note:  étoiles
Heureusement que le mot roman est sur la couverture...
Patrick Besson n’est pas n’importe qui, il a reçu de nombreuses récompenses comme, entre autres, le prix de l'Académie française pour Dara, ou encore le Renaudot pour les Brabants.
Jean Edern Hallier l’avait baptisé le meilleur écrivain de la génération nulle, ce qui est un grand compliment venant de sa part.
En passant de conseiller littéraire chez Albin Michel à auteur de chronique dans Voici, Patrick Besson est un "écrit tout" qui écrit bien. Ses opinions politiques ont déjà fait couler beaucoup d'encre.
Avec ce livre il remet une « giga couche » de provocation. écrire un livre sur Hitler : il fallait oser. Qui d’autre que lui aurait été assez gonflé pour prendre ce personnage terrible comme héros de livre?
Il raconte l’histoire d'un homme, de gauche de surcroît, qui, après une séance d’hypnose, découvre qu'il est la réincarnation d'Hitler. Après s'être convaincu qu'il en est bien la réincarnation, il part à la recherche de ses racines en Allemagne, accompagné de deux comparses qui ne sont autres qu'un pro nazi et un membre du Mossad…
L’histoire perd parfois un peu de consistance, mais la force de ce livre est de réussir à raconter la vraie personnalité d'Hitler à travers cette histoire plus que décadente. Sans s’en rendre compte, on découvre ce que fût la réalité de ce dictateur. En quelques lignes on passe de l’humour à l'horreur, de la réalité à la fiction. Avec talent il nous emmène dans ce voyage maléfique avec Hitler. C'est très dérangeant d'ailleurs de se retrouver en sa compagnie pendant 180 pages... On est presque soulagé de fermer le livre et d’être débarrassé de ce héros très encombrant.
La conclusion, que je vous laisse découvrir, est peut-être facile, mais tout compte fait, si on y réfléchit P. B. n’est pas trop loin de la vérité. Ce qui est certain c'est qu’il faut être un peu cintré pour écrire ce livre et un peu cintré pour le lire... En tout cas, moi, j'ai adoré et je vous le conseille vivement...
Au secours, il revient ! 4 étoiles

Dans ce court roman, à la suite d'une séance d'hypnose, un patron d'une agence de publicité se prend progressivement pour la réincarnation du Führer. Dans un délirant road-movie qui l'emmène de Vienne à Berchtesgaden, le fantôme d'Hitler est accompagné d'un historien allemand idolâtre et d'un soi-disant agent du Mossad qui ne serait là que pour neutraliser le monstre renaissant. Ce héros ordinaire retrouvera sur sa route quelques sinistres dignitaires du régime nazi également réincarnés en d'étranges femmes avec lesquelles il vivra des expériences sadomasochistes. Patrick Besson, avec le cynisme et la fantaisie qui font sa marque habituelle, profite de ces mises en scènes pittoresques pour peindre un Hitler sexuellement minable qui réjouira le lecteur.
L'idée du roman n'est pas forcément très originale et Patrick Besson n'est pas le seul à s'être intéressé à Adolf Hitler. Dans "La part de l'autre" (Albin Michel, 2001) Eric-Emmanuel Schmitt tentait de montrer comment le cours de la vie du dictateur allemand aurait été profondément et irrémédiablement bouleversé à la minute où le jury des Beaux Arts de Vienne l'aurait accepté et non refusé parmi ses élèves. Et le monstre serait devenu un homme tout à fait fréquentable. Le propos de Patrick Besson n'est pas de tirer des plans sur la comète mais son objectif n'est-il pas aussi de montrer qu'en tout être humain réside un monstre qui sommeille ?

Ce qui est moins drôle c'est l'ambiguïté du constat fait par l'auteur : Hitler revient cinquante après sa mort et voit de ses yeux que le monde moderne a intégré les tocades du nazisme : le culte du sport (et du jeunisme), le retour à la nature, le végétarisme, l'antitabagisme, l'antialcoolisme, l'athéisme, l'esprit scientifique, le coup médiatique, la médecine…bref, "le monde moderne est nazi".

C'est toujours la même histoire avec Patrick Besson : pourquoi tant de provocation ?

Bidoulet - - 56 ans - 16 novembre 2005


Rend mal à l'aise 2 étoiles

Le sujet du roman est assez spécial. Pour résumer, un homme se fait hypnotiser et se rend compte qu'il est la réincarnation de Adolf Hitler. En passant au-dessus de ses préjugés, on est devant un livre pas super convainquant. L'histoire tourne en mauvais scénario de complot contre ce cher monsieur qui se fait hypnotiser. D'un point de vue historique, le bouquin regorge d'une foultitude de détails concernant le Führer, qui ne laissent pas indifférents et qui mettent par moment assez mal à l'aise. Un roman à mon goût trop impartial par rapport au sujet abordé. Patrick Besson, communiste pur et dur, ne montre pas assez le côté "abominable" de Hitler. Je dois dire que j'ai un peu décroché vers la fin de l'histoire, en lisant une ligne sur deux. En gros, je n'ai pas été très accroché par ce livre. Maintenant, reste à savoir ce qu'à voulu montrer Besson...

Niddle - Le Raincy - 45 ans - 14 janvier 2004


Sur le fil du rasoir 8 étoiles

J'ai suivi le conseil de Chatpitre et j'ai fait l'acquisition de "Lui". Je ne le regrette pas. Il s'agit d’un grand bouquin qui donne envie de connaître un auteur( il a écrit 40 ouvrages) dont je ne connaissais que les brillantes chroniques du FigMag.
Rien que le titre est déjà osé, puisqu'il pourrait signifier que Hitler est la personnalité la plus marquante du XXème siècle. C’est vrai que Patrick Besson frôle parfois la ligne jaune du conformisme ou du non-conformisme, mais comme l’écrit Nicolas d’Estienne d'Orves, dans un site voisin: "Besson danse sur le fil d'un rasoir abominablement tranchant; mais jamais il ne tombe, et c'est bien la preuve qu'il est un grand écrivain".
Le livre est écrit à un train d'enfer, à l'emporte-pièce, d'une construction littéraire savante, d'un suspense qui ne se dément jamais, au style concis et un brin cynique, aux digressions brillantes et dérangeantes, moqueur sinon sulfureux quelque part.Un grand journal du Nord de la France estime qu'il s'y trouve une horreur proférée à chaque page. C'est nettement exagéré. Il y a des passages surprenants: "Comment tu les as embrouillés, les Allemands. Quel camelot, quel escroc! Quel enfoiré! Tu étais le contraire d'un Allemand et le contraire de ce qu'aiment les Allemands, et tu les as persuadés qu'ils étaient comme toi et donc que tu étais comme eux et donc qu'ils t'aimaient. - Je ne suis pas un Allemand ?- Mais non. Ils sont sérieux, réguliers, honnêtes, démocrates, responsables, courageux. Toi, tu es léger, irrégulier, malhonnête, dictateur, irresponsable, lâche. Comme tous les génies, tu es mauvais. Le problème, c'était que tu étais un génie sans talent, alors tu as fait le mal. C'est ça qu'on appelle le génie du Mal."
C'est vrai que Patrick Besson est un écrivain provocateur. Il est surtout libertaire. Il éclaire à sa manière le passé de l'Allemagne, du nazisme et de son chef; loin de valoriser ou d'humaniser celui-ci, il le rend encore plus sinistre.

Macréon - la hulpe - 90 ans - 6 septembre 2001