Les chênes qu'on abat... de André Malraux

Les chênes qu'on abat... de André Malraux

Catégorie(s) : Sciences humaines et exactes => Philosophie

Critiqué par Jules, le 3 juillet 2001 (Bruxelles, Inscrit le 1 décembre 2000, 79 ans)
La note : 8 étoiles
Moyenne des notes : 8 étoiles (basée sur 4 avis)
Cote pondérée : 5 étoiles (24 807ème position).
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Les pensées d'un homme hors du commun

L'entretien avec le général de Gaulle que Malraux nous rapporte ici s'est tenu le 11 décembre 1969. Il mourra en novembre 1970. Ce texte fait partie des « Antimémoires ».
Malraux et le général sont installés dans sa bibliothèque et parlent à bâtons rompus. Ce qui est intéressant dans ce texte, c'est justement le fait que nous ayons vraiment l'impression d’un dialogue spontané, qui n’était pas destiné à l’Histoire.
A Malraux qui lui dit que son seul prédécesseur en France était Victor Hugo et non un politique, de Gaulle répond : « Au fond, vous savez, mon seul rival international, c’est Tintin ! Nous sommes les petits qui ne se laissent pas avoir par les grands. On ne s'en aperçoit pas, à cause de ma taille. »
Le général parle de ses rencontres avec Kennedy, de Mao Tse-Toung, de Chou En-Laï, de Churchill, de Clemenceau, de Richelieu, de Bismarck, de Napoléon, d’Alexandre et bien d’autres personnages connus. Mais il aborde aussi les problèmes de la France, de l'Europe face à l'Angleterre, du continent africain, des partis politiques et des politiciens, dont il n’estime aucunement faire partie, ainsi que du peuple français. Malraux, quant à lui, donne sa façon de percevoir le général, comme les événements ou les personnages que celui-ci évoque. Ils discutent aussi du rôle que peut encore avoir la France entre les deux grandes puissances dominantes que sont les Etats-Unis et l'URSS.
A propos de la morale, le général dit : « Il n’y a de morale que celle qui dirige l'homme vers ce qu’il a de plus grand. La grandeur peut être petite, mais voilà, ça ne fait rien. »
Quant aux Français : « Vous savez, les Français ont toujours eu du mal à se débrouiller entre leur désir des privilèges et leur goût de l’égalité. »
Nous sommes après mai 68 et il dit : « Le problème le plus dramatique de l'Occident est-il celui de la jeunesse, ou celui de la démission de presque toutes les formes d'autorité ?… Voyez-vous, il y a quelque chose qui ne peut durer : l’irresponsabilité de l’intelligence. Ou bien elle cessera, ou bien la civilisation occidentale cessera. »
Un livre qui porte à bien des réflexions, même si nous ne sommes pas toujours certains de tout ce que rapporte André Malraux. En effet, nous savons que ce dernier soignait aussi bien son mythe que celui du général…

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Les éditions

  • Les Chênes qu'on abat [Texte imprimé] André Malraux
    de Malraux, André
    Gallimard
    ISBN : 9782749148601 ; EUR 22,00 ; 17/03/1971 ; 235 p. ; Broché
  • Les Chênes qu'on abat... [Texte imprimé] André Malraux
    de Malraux, André
    Gallimard / Soleil (Paris. 1957)
    ISBN : 9782070106455 ; EUR 8,00 ; 31/03/1971 ; 237 p. p. ; Relié
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Entretien au sommet

7 étoiles

Critique de Fabrice (, Inscrit le 22 novembre 2009, 38 ans) - 28 décembre 2013

6 mois après sa démission de la présidence de la République, un an avant sa mort, le général de Gaulle reçoit celui qu'il appelait "l'ami génial", André Malraux.
Malraux a retranscrit l'entretien, avec l'emphase et aussi la pointe de mythomanie qui le caractérisent : l'amiral de Gaulle déclara plus tard que Malraux avait "arrangé" le récit, qui n'en reste pas moins de qualité.
Nous voici donc dans la quiétude de la Boisserie : par la fenêtre on voit la neige tomber sur la forêt "mérovingienne". Le chat grigri va d'un fauteuil à l'autre, et "Tante Yvonne", satisfaite de voir son époux goûter un repos mérité, est redevenue une simple hôtesse.
Au cours de l'entretien, on parle donc de la Résistance, de l'antifascisme, de la France, du nihilisme, du gaullisme, du communisme, de Staline, de Kennedy, de Napoléon, de Saint-Bernard...
On est frappé par le fait que de Gaulle s'interroge particulièrement sur le sort de la jeunesse et ses revendications de 1968. Sans doute, un homme de sa génération, né en 1890, ne pouvait comprendre les aspirations de cette jeunesse si différente de la sienne. Sans doute aussi, cet échec fut pour lui une source d'amertume dans sa retraite.
On notera aussi cette prédiction de de Gaulle et Malraux sur le Tiers-Monde et le rôle majeur qu'il sera amené à jouer dans le monde "avant une génération"...
Bref, un récit emmené à la Malraux, baroque et foisonnant, mais écrit dans une langue dont on ne connait pas d'équivalent au XXème siècle. Et au début du livre, le plus beau texte écrit sur les funérailles du Général.

De Gaulle, au soir de sa vie

5 étoiles

Critique de Chene (Tours, Inscrit le 8 juillet 2009, 54 ans) - 26 décembre 2011

Ce livre recueil de conversations entre Malraux et De Gaulle dans la bibliothèque de ce dernier accompagné du chat et de Yvonne, comprend quelques perles intéressantes sur le parcours de cet homme dont beaucoup revendiquent aujourd'hui l'action et la pensée. Il y a aussi de fortes réflexions et d'intéressantes références philosophiques qui ont guidé leurs actions à tous les deux, ainsi que quelques révélations historiques.
Cependant, il y a aussi des pensées discutables sur l'état d'esprit de la jeunesse actuelle (on est après Mai 68 qui a chassé De Gaulle du pouvoir) qui passent pour être une discussion entre deux vieux messieurs aigris, usés et dépassés.

on l'appelait "qui vous savez..."

10 étoiles

Critique de Jfp (La Selle en Hermoy (Loiret), Inscrit le 21 juin 2009, 75 ans) - 28 février 2010

André Malraux, un des derniers fidèles, rencontrait régulièrement Charles de Gaulle à La Boisserie (Colombey les Deux Eglises), où celui-ci s'était retiré en 1969, après un référendum qui avait vu la victoire du "non". Ce livre est un recueil des dialogues (réels, imaginaires?) entre ces deux "grands" de l'histoire et de la littérature. On peut regretter la grandiloquence de l'écrivain, qui transporte toujours avec lui des "valises" de citations, allant de Sophocle à Mao-Tsé-Toung, et n'est pas avare de phrases plutôt obscures, à la grammaire tarabiscotée, dont on retiendra malgré tout la grande poésie. C'est agaçant, pour un livre qui se veut un témoignage, mais passons... Beaucoup de thèmes sont évoqués, le Communisme, la Résistance, la lutte contre le Fascisme bien sûr, et celle qu'on appelait familièrement "tante Yvonne" (Yvonne de Gaulle, née Vendroux, la femme du général) fait son apparition au passage, si heureuse de voir son époux enfin débarrassé de ses soucis de chef d'état (elle n'en a malheureusement pas profité longtemps...). Le destin de celui qui fut le plus grand homme d'état français du siècle dernier est évoqué, à travers sa vision de la France, dont il pensait, à tort ou à raison, porter le destin sur ses frêles épaules. Un témoignage bouleversant, qui fait paraitre bien pâlottes les petites agitations bling-bling de nos leaders politiques du moment. Un remarquable travail d'écriture aussi, pour ceux et celles qui sont encore sensibles au beau langage...

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