La Chronique du pou vert
de Issa Aït Belize

critiqué par Persée, le 29 juin 2001
(La Louvière - 73 ans)


La note:  étoiles
Un raout pour votre mois d'août
Jubilate, exultate !… A goûter la phrase jubilatoire de Issa Aït Belize, revigorante comme un thé à la menthe dont le miel et la fleur d’oranger ne gâchent en rien la troublante amertume, nous voici entraînés dans un époustouflant raout.
Car c’est toute la création - excusez du peu ! - que l'auteur met en scène, convoquant le visible et l'invisible, l’éternel et le vivant, la pureté et la corruption, les anges, les poux (verts), les saints de tous bords, les chiens et, bien entendu, les hommes (femmes comprises).
Un projet ambitieux. Les meilleurs s'y seraient cassé les dents. Pourquoi celles de Belize éclatent-elles au soleil du Rif ? Parce que, malgré sa peine, il écrit en riant. D’un rire qui tournerait au ricanement si on n'y reconnaissait d'emblée la compassion pour les plus humbles.
Tel ces conteurs de rue que l’on rencontre encore en son Maroc natal, Bélize parvient à nous tenir en haleine jusqu’à la dernière page. En réussissant ce tour de force inespéré : nous faire croire à l'incroyable, nous prendre par la main pour que nous touchions du doigt les plaies de son peuple (qui sont aussi parfois un peu les nôtres), sans qu’on perde jamais le plaisir de le lire.
Et le lecteur se voit confronté à un constat d'autant plus effroyable qu'il gît depuis toujours à portée de tout regard un peu lucide. Effroyable parce qu'il implique la responsabilité de tous, si bien que, plutôt que d’en appeler à une justice qui ne pourrait aboutir qu’à une condamnation capitale et générale, mieux vaut encore crier miséricorde.
On peut ne pas partager l'œcuménisme de Bélize ou, à l’inverse, se demander s'il ne devrait pas s'étendre au serpent tentateur lui-même (auquel il donne souvent des accents, ma foi, assez convaincants). On peut ne pas partager sa foi tout en communiant avec sa sagesse. Mais on applaudira ce très beau roman qui plane comme un aigle de lumière au dessus de beaucoup d'autres. Car la Chronique du Pou Vert, c'est l'écriture faite amour.
des poux, des poux partout! 8 étoiles

bizarre, comme l'ombre de gabriel garcia marquez plane sur le rif marocain! et puis non, vu que aït belize et marquez partagent des parcours similaires de deracinement, de folies burocratiques, de subjugation aux autre norms sociaux, de langues en exil. l'histoire du pou vert commence debout, puis continue son chemin tout droit avec une logique impitoyable, mais truffé d'humour et d'amour, jusqu'a des conclusions qui touchent aux enigmes les plus profondes de nos philosophies occidentales et orientales. avec son conte sur la responsibilité, la culpabilité et l'innocence (rétrouvé dans les poubelles d'un ville mythique au bord de la mediterranée), issa aït belize signe un livre d'un grandeur digne de comparaison positive avec n'importe qui, même marquez!

The mariner - - 72 ans - 19 juin 2005