Les nègres n'iront jamais au paradis
de Tanella S. Boni

critiqué par Sahkti, le 15 mars 2006
(Genève - 50 ans)


La note:  étoiles
Colonialisme à la dérive
La narratrice est noire, elle croise un jour dans un aéroport un homme blanc, vêtu d'un habit traditionnel africain, qui crie "Les nègres n'iront jamais au paradis". Dans l'avion, il se présente. Amédée Jonas Dieusérail. Plus communément appelé Dieu. Il est éditeur (les éditions de la Perche du Lac, qui offrent une voix aux minorités ou aux auteurs inconnus), parisien, et travaille beaucoup entre la France et l'Afrique. Plus jeune, il a violé une élève alors qu'il était enseigné, puis il est entré dans les ordres pour tenter d'oublier mais ça n'a pas marché alors il en est sorti.

Drôle de personnage que Tanella Boni, écrivain et profeseur à l'Université d'Abidjan, a placé au centre de son roman. Un parisien affairiste, pervers, pédophile qui tente de se racheter une conscience en publiant des auteurs noirs dans sa maison d'édition.
De son côté, la narratrice tente de chasser les idées reçues à propos de l'Afrique et de faire exprimer du mieux qu'elle peut les voix du silence et du passé. Elle défend un continent et une tradition. la rencontre entre les deux protagonistes est frontale, ils ont des visions en apparence très différentes puis, rapidement, réalisent chacun comment tirer le meilleur de l'autre. Pour soi et pour le monde. Pas de happy end ou de bonnes intentions au fil des pages, la méfiance existe et demeure, c'est quelque part le colonialisme qui fait face à ses fantômes. Tanella Boni n'emploie pas de ton revanchard ou révolté, elle énonce, elle raconte et c'est sans doute encore plus fort, parce que le côté naturel qui se dégage de certainsa gissements finit par sauter au visage et prendre à la gorge.