L'été où il faillit mourir de Jim Harrison

L'été où il faillit mourir de Jim Harrison
( The summer he didn't die)

Catégorie(s) : Littérature => Anglophone

Critiqué par Jules, le 13 mars 2006 (Bruxelles, Inscrit le 1 décembre 2000, 79 ans)
La note : 9 étoiles
Moyenne des notes : 9 étoiles (basée sur 4 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (12 297ème position).
Visites : 5 817  (depuis Novembre 2007)

Harrison nous emporte une fois de plus...

Ce livre contient trois nouvelles et vient d’être publié au début du mois.

Dans la première nouvelle, Harrison fait revenir un héros récurrent au long de son œuvre. Il s’agit de Chien Brun qui est un blanc métissé indien. Celui-ci vit de quelques petits travaux effectués pour le compte de son oncle, Delmore, qui lui est un véritable Indien Chippewa. Pour arranger quelques démêlés avec la justice, Chien Brun s’est marié avec Rose, alors que celle-ci est en prison pour quelques mois encore. Mais du coup il a hérité des deux enfants de Rose, le jeune Dirk, enfant tout à fait normal et plutôt intelligent, et la jeune Baie, enfant handicapée de naissance suite aux abus d’alcool de sa mère. Ils habitent une roulotte branlante située sur un terrain de Delmore.

Chien Brun ne survivrait pas non plus sans l’aide de l’assistante sociale Gretchen dont il est follement amoureux tellement elle est belle. Mais celle-ci est profondément lesbienne et, bien que plaquée par son amie, elle ne cède rien à Chien Brun malgré tout son attachement pour lui.

Il souffre terriblement d’une incroyable rage de dents. Ce sera Gretchen qui l’en délivrera en réglant le coût d’une triple extraction chez la dentiste locale Belinda. Mais celle-ci va découvrir l’énorme potentiel sexuel de Chien Brun alors qu’elle est elle-même totalement obsédée par le sexe. Ce sera un excellent exutoire pour Chien Brun, mais ne changera rien à son amour pour Gretchen.

Et voilà qu’il reçoit une lettre qui lui annonce que Baie sera, dans quelques mois, obligée de gagner une institution d’état pour enfants handicapés. Chien Brun et toute sa clique estimeront qu’il est impensable d’accepter cela et d’y envoyer l’enfant…

Dans la seconde nouvelle Harrison va nous faire faire connaissance avec trois femmes républicaines. Elles sont amies intimes depuis le lycée et se sont partagés, sans se l’avouer, le même amant répondant au nom de Daryl. Daryl est un obsédé sexuel tordu et convaincu d’être l’artiste absolu. La première des trois femmes vient de tenter de l’assassiner en lui donnant à boire un liquide bourré de médicaments. Elle quitte Huston pour échapper à la police et se retrouve au Mexique. Ses deux amies vont l’y rejoindre et cela nous vaudra trois versions différentes de cette passion mutuelle, mais aussi de la vie en général. Les deux premières sont un peu des oies blanches n’ayant jamais travaillés et, surtout la première, ayant toujours été surprotégées pas des parents ou l’argent familial. Il n’en va pas de même avec la troisième qui est bien plus lucide.

De toute façon, elles ont une chose en commun, outre leur amant : aucune n’a un bon ménage.

La troisième nouvelle voit Harrison raconter sa propre vie. Mais il n’utilise pas le « je » mais bien le « Il » Tout est raconté comme si l’auteur racontait l’histoire d’un personnage créé par lui.
Cette nouvelle a un réel intérêt pour les idées qui viennent sous la plume de l’auteur, mais aussi pour ceux qui aimeraient connaître la vie de Jim Harrison, ses angoisses, ses échecs, ses dépressions, ses exutoires, ses façons de se guérir, sa perception du monde etc, sans devoir lire un livre entier comme « En marge ». Livre qui, par ailleurs en vaut largement la peine.

J’ai lu les deux et j’en suis très heureux car, évidemment, les idées qui y sont exprimées ne sont pas identiques.

Nous ne changerons plus Jim Harrison, et heureusement !... Il évoque donc pour nous ses conceptions du monde, la nature et son gigantesque pouvoir salvateur, comme le sexe, les ambiguïtés de la vie, ses peurs, l’Amérique passée et actuelle, les Indiens, la pauvreté, l’argent etc.

Chaque œuvre de Jim Harrison est un peu comme une longue réflexion sur les choses, presque une confession, par moment, un testament.

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Les éditions

  • L'été où il faillit mourir [Texte imprimé] Jim Harrison traduit de l'anglais (États-Unis) par Brice Matthieussent
    de Harrison, Jim Matthieussent, Brice (Traducteur)
    Christian Bourgois / Fictives (Paris).
    ISBN : 9782267018103 ; 23,00 € ; 02/03/2006 ; 322 p. ; Broché
  • L'été où il faillit mourir [Texte imprimé] Jim Harrison traduit de l'américain par Brice Matthieussent
    de Harrison, Jim Matthieussent, Brice (Traducteur)
    10-18 / 10-18. Série Domaine étranger
    ISBN : 9782264044198 ; 3,81 € ; 24/05/2007 ; 323 p. ; Poche
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Harrison entre les lignes

8 étoiles

Critique de Sahkti (Genève, Inscrite le 17 avril 2004, 50 ans) - 2 octobre 2006

Déjà plus que résumé, inutile de reparler de l'histoire, enfin des histoires.
Je suis reconnaissante à Jules de m'avoir fait découvrir Jim Harrison il y a de nombreux mois maintenant. C'est avec plaisir que je me suis plongée dans ce recueil de nouvelles et que je l'ai savouré. Le premier texte est un régal de sensibilité, d'humanité, d'une certaine forme de cynisme aussi. Mon préféré, sans hésitation. J'ai apprécié les maladresses de Chien Brun, son côté faussement rebelle, son enfermement dans un système et puis cette forme de passivité qui n'en est pas vraiment une. Tout cela sonne très juste, il y a une véritable proximité avec le lecteur.
La seconde partie, "Epouses républicaines" m'a quelque peu déçue. C'est certes bien écrit, il y a un subtil jeu de mise en écho d'une femme à l'autre et Harrison déploie des trésors de perfidie et de ruse avec chacune des trois. Il sonde l'âme humaine sans détours, mais voilà, je n'ai pas été emballée plus que ça. Le procédé me plaît, moins le résultats que je trouve trop convenu et formaté à mes yeux. La structure est intéressante, la manière, mais ça s'arrête là.
La dernière partie me fait vite oublier cette déception. Adoptant à nouveau le procédé de mise en abîme, Harrison se confie indirectement, avec un ton vrai, sincère et très touchant. J'ai particulièrement apprécié le recul que l'auteur arrive à prendre face au narrateur dans lequel il se glisse pourtant complètement. Cela demande une certaine habileté et Harrison y parvient avec succès.
Un recueil que je trouve inégal mais cependant de bonne facture.

Tois nouvelles

8 étoiles

Critique de Tistou (, Inscrit le 10 mai 2004, 67 ans) - 1 juin 2006

Le dernier opus de Jim Harrison est un recueil de trois nouvelles. Dans le droit fil des préoccupations et des centres d’intérêt Harrisoniens : la nature et le Middle West en particulier, les déshérités (ou plutôt les non-favorisés !), les relations hommes-femmes, notre rapport avec l’enfance, …
Dans la première ; « L’été où il faillit mourir », Jim Harrison nous sert la suite des « aventures » de Chien Brun, héros récurrent de plusieurs nouvelles, métis indien du Nord Michigan. Chien Brun est dans une situation des plus inconfortables et des plus complexes, loin du politiquement correct illustré par les productions américaines courantes. Mais le propos de Jim Harrison n’est pas tant de nous raconter une histoire que d’utiliser la situation de Chien Brun pour « digresser » de droite et de gauche et préparer l’épisode suivant des « aventures ». Car n’en doutons-pas, la voie est ouverte ! Et elle plonge vers le Canada.
Dans la seconde ; « Epouses républicaines », Jim Harrison raconte, en trois voix, les voix de trois amies américaines, l’histoire mi-pathétique mi-effarante d’un parcours plus proche de ce qu’on nous sert couramment sur l’Amérique. Trois amies, mariées, qui ont eu le même amant, et qu’une d’entre elles a tenté d’envoyer ad patres. Tentative avortée, fuite au Mexique et retrouvailles là-bas des trois amies pour sauver ce qui peut l’être. C’est traité par Jim Harrison, c’est à dire dans la confusion des sentiments, le règne du chaos et de la conduite à tenir, comme dans la vraie vie ! Chien Brun est loin, bien loin de nos trois épouses républicaines !
La dernière est comme un petit supplément de « En Marge », sa magnifique autobiographie. Comme si Jim Harrison avait encore eu des choses à dire, ou des choses plus intimes, qu’il n’avait pu intégrer à «En Marge ». Cela s’appelle « Traces », c’est traité à la troisième personne du singulier mais la filiation est transparente ! Et comme d’habitude Jim Harrison nous touche.
« Une rivière encore plus modeste quittait le lac vers l’est à travers un vaste marais où des plantes mangeuses de mouches poussaient sous un majestueux pin blanc, où un grand héron bleu nichait à chaque printemps. Sous la surface du lac, des bancs d’ouïes-bleues se cachaient à l’abri de bûches à demi dressées. Sous le dense tapis des feuilles de nénuphar on trouvait des bancs de poisson et des oeufs de grenouille accrochés à ces feuilles en grappes couvertes de mucus.
Assis sous le quai, de l’eau jusqu’au buste, il leva les yeux vers le corps de sa tante sectionné par les planches du quai et respira l’odeur d’un maillot de bain mouillé contre le bois chaud. Un peu plus loin sur la rive, il reluqua par la fenêtre d’un chalet le gros derrière d’une femme qui parut s’effondrer quand elle retira son maillot de bain. Il repensa au bébé rat musqué qu’il avait découvert noyé parmi les roseaux verts. »


L’unité des trois

9 étoiles

Critique de Monito (, Inscrit le 22 juin 2004, 51 ans) - 8 mai 2006

Trois nouvelles, trois voyages, trois différences, mais un fil rouge, l’auteur et ses différentes reprises dans chacune des histoires.
Chine Brun et Baie, Frances, Martha et Shirley et enfin Il, sans doute Jim lui-même. On y retrouve la force descriptive de Harrisson, cette envie qu’il fait naître de connaître ce Michigan.
On retrouve aussi ce monde à part des sangs-mêlés.
La première nouvelle est puissante d’attendrissement sur ce CB qui vit à côté du monde et que l’on connaît un peu déjà. On partage ses étonnements comme ses colères mais aussi sa détermination parce qu’il agit justement.
Les épouses républicaines sont à mourir de rire ! Quel regard dur et acide sur une société bien pensante mais autrement agissante.
Jim Harrisson parle pour des femmes, c’est un délice, même si la conclusion, un peu moralisatrice et moqueuse ne me paraît pas essentielle.
Et enfin, Traces, un résumé de vie, une introspection sévère, un témoignage parfois douloureux parce qu’intime.
Un vrai bonheur en somme, de lire Harrisson, un bonheur toujours renouvelé.

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