Paris
de Émile Zola

critiqué par Réaliste-romantique, le 6 janvier 2006
( - - ans)


La note:  étoiles
Pour les inconditionnels de Zola...ou de Paris
Ce livre clôt le cycle des Trois Villes. Choqué par la simonie et la dévotion naïve de Lourdes, déçu par l'égoïsme et le conformisme des pontifes de Rome, Pierre Froment revient à Paris pour chercher un sens à sa foi et sa vie. Il continue à prêcher dans Montmarte, mais il ne croit plus au message qu'il enseigne. La misère des ouvriers qui l'entoure le préoccupe constamment et l'éloigne encore plus de l'Église. Un jour, il retrouve par hasard son frère Guillaume, perdu de vue. Les frères reprennent leurs relations et Pierre fréquente le ménage de Guillaume, veuf, soit ses trois fils et Marie, jeune fille d'un ami, recueillie par Guillaume lorsqu'elle devînt orpheline, aujourd'hui jeune femme. Alors que Pierre est tourmenté par ses questionnements spirituels, au point d'abandonner l'habit ecclésiastique et la pratique religieuse, il découvre un nouveau monde de bonheurs simples chez son frère. Chez ce dernier, symboles du progrès et de l'avenir, tous s'épanouissent dans le travail, selon les capacités de chacun, des travaux ménagers aux réalisations industrielles, artistiques et scientifiques. Bien sûr, cette vie heureuse ne peut durer toujours: des intrigues amoureuses viendront créer des tumultes. De plus, Guillaume, déçu et choqué par la société, tentera de faire exploser le Sacré-Coeur nouvellement construit (tout ceci se déroule à la fin du XIXe siècle). Est-ce que les héros seront sauvés? Par la foi, la vie ou la science?

Fidèle à son style, Zola profite de cette intrigue pour dépeindre un pan de la société. Dans Paris, c'est la société de fin de siècle, les différents mouvements politiques de la chambre, l'anarchisme, le socialisme (même si l'information de Zola sur ces derniers aspects datait quelque peu) et la misère ouvrière qui sont illustrés. Il condamne à nouveau la débauche de la haute bourgeoisie. Zola oppose aussi deux mondes: celui de l'hédonisme, du spirituel et de l'éthéré, improductif, et celui du progrès, du travail et de la science, monde où réside le salut moderne de l'humanité. Il entrebaîlle ainsi la porte sur son projet suivant, soit les quatres évangiles modernes : Travail, Fécondité, Vérité et Justice qu'il n'a jamais pu écrire.

On sent bien le goût de modernisme de Zola dans ce livre. Toutefois, la démonstration est parfois un peu grosse, cousue de fil blanc. Entre autre, il y a un très grand nombre de personnages, mais ils symbolisent chacun une idée plutôt qu'un être. Ainsi, à part Pierre et Guillaume, personne n'évolue, les autres jouent un rôle, figés dans leur carcan. C'est une critique que l'on fait souvent à Zola, que les personnages n'ont pas de vie, marionnettes prétextes à démontrer des théories. Je trouve cela un peu exagéré en général, mais néanmoins ceci irrite un peu dans Paris. L'opposition est trop forte, par exemple, entre un des fils productifs de Guillaume (BIEN, en gras et double souligné) et son compagnon d'enfance, Hyacinthe, devenu un dandy extrême, méprisant tout ce qui est matériel, même le désir charnel, pour ne vivre que d'intellectualisme (MAL : improductif et stérile). On croirait voir le des Esseintes de Huysmans! Le livre est intéressant, mais je le conseille surtout aux inconditionnels de Zola.