Le pont de Ran-Mositar
de Franck Pavloff

critiqué par Aaro-Benjamin G., le 7 décembre 2005
(Montréal - 54 ans)


La note:  étoiles
Un cri étouffé
Les noms des lieux ont été changés, mais on reconnaît la Bosnie, morcelée et meurtrie après une guerre des plus horribles. Dans ce décor de cendres, un homme venu du Nord vagabonde à la recherche d’un jeune homme. (son fils, on apprendra plus tard) Il se dit charpentier, parfois forestier, et participera à la reconstruction du Pont de Ran-Mositar, frontière d’une contrée séparée en deux mais aussi symbole d’espoir reliant le quartier chrétien au quartier musulman.

Avant tout un roman d’ambiance, les endroits et les gestes ont prédominance devant les sentiments des personnages. Même après avoir refermé le bouquin, on en connaît peu de cet énigmatique homme du Nord, ni des femmes encore marquées par la douleur de la haine, ni des travailleurs du chantier et des prostituées.

Ce sont des acteurs transparents d’une grande tragédie évacuée, que l’on n’aborde pas vraiment. Tout est suggéré, comme si l’auteur avait eu peur de s’investir, de parler des blessures ? Le résultat est donc glacial, d’autant plus que le style littéraire épuré, axé sur l’essentiel, n’est aucunement propice aux grandes envolées d’émotions.

Certains seront charmés par cette poésie sobre. Personnellement, j’ai eu l’impression d’avoir affaire à un reportage bien léché que l’on diffuse à grande heure d’écoute. Ceci explique peut-être son prix France Télévisions…
La haine en armistice 6 étoiles

Après une guerre civile qui a profondément marquée dans leurs chairs les habitants du pays, la reconstruction du pont reliant les 2 rives d'une ville divisée par les rancoeurs et la haine latente devrait aider la réconciliation nationale d'un peuple qui s'est entre-déchiré.

Cela est la vision optimiste de l'observateur étranger au conflit , l'après-guerre est une période trouble où si les armes sont rangées, l'oubli et la réconciliation , elles, sont plus longues et douloureuses a obtenir.

C'est dans cette ambiance que l'on sent pesante que Pavloff nous décrit le quotidien et la cohabitation de personnages qui quelques mois plus tôt se menaient une guerre atroce.

Un léger regret toutefois , Pavloff emploie un ton si froid qu'on ne s'attache pas aux personnages.

Soili - - 51 ans - 20 avril 2007