Bord de mer
de Véronique Olmi

critiqué par Voni, le 25 novembre 2005
(Moselle - 64 ans)


La note:  étoiles
En perdition
Pour la première fois de leur vie, une mère emmène ses deux enfants au bord de la mer.
Ainsi, ce livre aborde un sujet bien banal. Pourtant, très vite, le lecteur plonge dans une atmosphère sombre qui ne ressemble en rien à ces clichés réjouissants de plages ensoleillées, de jeux de sable et de mer d’huile. Tout d’abord parce que leur départ ressemble plus à une fuite qu’à des vacances organisées puisqu’il se décide en pleine période scolaire dans un mois de novembre brumeux et invariablement pluvieux. Puis, la mer qu’ils découvrent se présente à eux uniquement sous ses mauvais jours : elle est brunâtre, déchaînée, continuellement en colère. Ils échouent aussi dans la chambre exiguë d’un hôtel miteux avec comme unique trésor une boîte d’économies ne contenant guère plus qu’une cinquantaine de francs.
Après avoir déambulé dans ce décor lugubre et hostile, ils vont “s’offrir”, en contraste, les lumières multicolores et les joies d’une fête foraine. Ils pénètrent un lieu de Vie animé de musiques, d’odeurs édulcorées qui les transportent dans un univers empli de rires et de douceurs jusqu’à épuisement des quelques pièces de monnaie qui restaient. Là, l’angoisse des personnages qui ne peuvent que regagner l’obscurité s’empare aussi intensément du lecteur qui perçoit encore plus le drame qui se profile…

Sans compassion ni fioriture, dans une écriture épurée jusqu’à en avoir supprimé certaines ponctuations, Véronique Olmi dépeint la solitude incommensurable d’une détresse sociale. Ce livre nous entraîne dans une descente sans espoir avec cette mère désorientée, traquée par des démons intérieurs et qui ne parvient plus à avancer dans cette société indifférente qui lui a toujours échappé. Elle est poursuivie par la honte de n’avoir jamais pu donner à ses enfants une vie comme les autres et elle n’arrive plus à sauver les apparences.
Ce premier livre, noir, très noir, de l’auteure est extrêmement puissant et bouleversant à en couper le souffle. Il est un terrible cri jusqu’au tout dernier mot et il résonne longtemps encore après avoir tourné la dernière page.
Tout effacer et tout recommencer ! 10 étoiles

Ecrivain français née en 1962, Véronique Olmi suit des études d'art dramatique, devient assistante à la mise en scène pour Gabriel Garran et auteure pour le théâtre. Elle a également publié (Actes Sud 2001), son premier roman -Bord de Mer- qui a reçu le Prix Alain-Fournier.

Une femme seule et ses 2 enfants quittent la ville, pour des vacances improvisées au bord de la mer.
Ils s'y rendent en car, de nuit, en plein hiver, pour rejoindre une ville sombre, étriquée, accueillis par une pluie froide ininterrompue.
Un hôtel miteux, une chambre étroite et sale comme seul phare.
Mais la femme est contente d'avoir largué les amarres, contente d'être dans un endroit si différent, à peine éclairé, arrivés au bout du monde.
Progressivement, au fil du récit, on comprend que cette famille évolue au bord d'un gouffre. Celui de la grande pauvreté, des problèmes psychologiques de la mère et de l'extrême solitude.
Les dessins des enfants, leurs affaires (trop grandes, trop petites), leur violence contenue mais aussi le lien étroit qui unit les 2 frères. Des enfants conscients de la situation et qui savent déjà faire semblant.
Une mère qui aime ses enfants et craint qu'il ne soit déjà trop tard.

Une oeuvre magnifique, dure et sensible à la fois. On sent les failles et on peine à entrevoir une porte de sortie.
L'auteure parvient à distiller des gestes d'amour maternel dans cette situation de violence sans issue.
Un livre dont on ne ressort pas indemne, qui touche au plus profond des tripes.
Un moment de lecture intense !

Frunny - PARIS - 58 ans - 19 août 2013


De la détresse et de l'amour 10 étoiles

C’est court, c’est sombre, c’est angoissant… l’atmosphère est d’une tristesse palpable, on la touche du doigt, on s’y enfonce, on plonge dans cette détresse humaine qui vous enveloppe comme un brouillard opaque et humide. Et pourtant on ne se défend pas, on se laisse engloutir, envelopper, happer. Le dernier voyage d’une famille qui survit à la solitude, tant bien que mal portée par l'amour d’une femme dévastée, aidée par ses deux enfants trop tôt mûris, trop tôt grandis et pourtant si avides d’être encore des enfants.

Et ce cadeau qu’elle veut leur offrir lui aussi s’englue dans le sordide : un hôtel miteux, une mer déchaînée et maussade, une pluie battante qui hurle aux tempes de cette femme prisonnière de sa misère, de sa folie, de sa détresse.

Voilà ce que j’aime, dans la littérature : la capacité d’un auteur à nous transposer dans une autre dimension, où jamais nous n’irions sans elle. Je me suis sentie Elle. Je l’ai comprise. Je l’ai soutenue et avais envie de lui dire, à la fin « c’est bon, tu peux lâcher l’oreiller, c’est fait, arrête, tu vas avoir mal au bras ». Ensuite je l’aurais prise dans mes bras et lui aurais dit « Chut, tout va bien, ça va aller, ne t’inquiète pas, ils vont se retrouver »…

Amanda m - - 57 ans - 11 mars 2008