Saule

avatar 28/05/2011 @ 19:36:56
Je veux bien croire que de telles personnes existent, même si je n'en connais pas. Mais tu as raison. Car "devenir plus intelligent" ne veux rien dire. Je préfère "élever l'âme". En sachant très bien que dans ce domaine, chacun suit son chemin, à son propre rythme, sans se comparer aux autres.

Feint

avatar 28/05/2011 @ 20:16:35
C'étaient surtout pendant les études, des gens qui préparaient Normale Sup, par exemple (et à côté il y en avait d'autres vraiment brillants, il n'y a pas de généralités à en tirer).

Pendragon
avatar 28/05/2011 @ 21:54:39
Cartland ne rend pas forcément bête dès l'instant où celui ou celle qui le lit sait ce que ce genre de roman ne va pas faire "travailler ses méninges" comme tu dis. Je répète, comme Duras regardait Dallas....
Si quelqu'un se complait à ne lire QUE cette dame, je doute qu'en ce qui concerne la littérature il apprenne beaucoup de choses. Mais cette personne peut privilégier les sciences ou la musique par exemple et ne pas s'investir dans la littérature. Est-elle stupide, la lecture de Cartland la-t-elle rendue bête?

Là on se rapproche, si je puis me permettre, d'un sens commun. Il est clair que l'aspect "néfaste" de Cartland (ou Levy, Musso hein, je ne focalise pas sur cette brave dame) peut-être compensé par une très grande série d'autres activités positives pour le cerveau. Je constate donc avec plaisir que tu te ranges malgré tout à mes vues sur l'aspect "négatif" de ce genre de lecture.
Personnellement je me sens mieux (c'est pour cela que j'ai évoqué ton bien être..) quand je lis un livre qui non seulement m'apprend certaines choses, mais aussi m'apporte beaucoup sur le plan humain. Je ne pourrais jamais lire Cartland car ça m'énerverait très vite mais je ne la considère ni nulle, ni neutre. Et surtout pas "neutre comme Eco"! Elle exerce dans un certain genre c'est tout. Libre à qui veut d'y aller...
Mais ne t'inquiètes pas j'arrive à faire la différence entre un roman de Cartland (ou équivalent) et Proust...:-))

Parfait, c'est tout ce que je voulais entendre... tu sais, cette petite phrase que Virgile n'est pas capable d'écrire : "Mais ne t'inquiètes pas j'arrive à faire la différence entre un roman de Cartland (ou équivalent) et Proust"... raaaah, lovely^^
Comment peux-tu t'enfermer dans toutes ces comparaisons? Sérieusement je ne comprends pas. Autant je comprends ton désir de t'élever dans la connaissance, autant il me parait réducteur de cantonner ce désir dans des référents.
Je ne cherche pas à relativiser à tout va; C'est beaucoup trop difficile d'ailleurs. Comme beaucoup j'ai tendance à croire que je peux être objective ce qui, à mon avis, est bien prétentieux et je m'efforce de corriger ce défaut.

Je ne m'enferme pas, que du contraire !!! Plus je suis capable de faire la différence entre les choses, plus je suis capable de me diriger vers ce qui est positif pour moi ! C'est donc exactement l'inverse, je m'ouvre un maximum, j'open my mind (pour parler comme Vandamme qui est, comme chacun le sait, un grand philosophe - touche d'humour pour Virgile) afin de comprendre l'univers qui m'entoure et tenter d'en retirer le meilleur pour moi...
On tourne autour du pot avec Cartland (avant c'était Lévy ou Musso, ou Werber...) et tous ceux qu'on appelle "grands".
On sait à quel point ces avis sont subjectifs et relatifs (confère les avis de Feint sur certains auteurs) et je ne vois pas en quoi c'est dérangeant. Au contraire. Feint ne dira jamais, j'en suis sûre, Camus ne "vaut"rien, il dira qu'il ne l'aime pas beaucoup pour telle ou telle raison. Et moi, qui l'aime beaucoup (Camus, et Feint aussi..) j'essaierai de comprendre pourquoi et si je ne comprends pas pourquoi je dirai qu'il exagère (Feint!):-)) Mais on est bien loin des jugements de valeur non?

On ne tourne pas du tout autour du pot, j'estime (pour une fois en toute humilité) que ce sujet est un sujet central en ce qui concerne l'avenir de l'homme. On se fout comme de l'an 40 des goûts des gens, ça c'est sûr, et que Feint aime ou n'aime pas Camus, on s'en tape, par contre, s'il ne parvient pas à en reconnaître la valeur (ce qui n'est pas le cas, on est bien d'accord), il est intéressant d'en discuter... ce que nous faisons !
Alors si j'ai évoqué le fait que tu te sentes heureux c'est parce que je pense que tu as besoin de ces référents, c'est ton droit, mais ils ne s'appliquent pas à tous et ça tu as du mal à l'admettre...

Les référents, TOUT LE MONDE en a besoin, après, tu appelles ça des lois ou de la morale ou la religion (pour les croyants) ou simplement l'éducation, nous sommes entourés de référents, il n'y a que cela autour de nous ! Je n'ai pas besoin de plus de référents que quiconque, PAR CONTRE, ce que je m'efforce de faire, sans doute plus que quiconque, c'est de les reconnaître et de les classer... les classer en fonction de critères tels que : générique ou individuel, intemporel ou temporel, utilitaire ou bénéfique, malsain ou nécessaire, etc, ... ceci afin (et je l'ai déjà dit ailleurs) de savoir OU et QUAND je me situe par rapport au monde qui m'entoure. Après, tu as tout à fait raison de dire que mes référents ne s'appliquent pas à tout le monde, forcément, puisque ce sont "mes" référents et que je suis, comme chacun de nous, unique. Et c'est bien pour ça que je continue encore et encore et encore à discuter avec vous et avec d'autres et que je continue à chercher et à réfléchir : j'aime savoir le delta qui existe entre les référents des gens... voire même "pourquoi" ce delta existe !

Feint

avatar 28/05/2011 @ 23:19:39
Ce n'est pas tellement Camus, c'est surtout la Peste, qui est un roman démonstratif assez lourdingue - surtout pour Camus, qui a fait beaucoup mieux avec l'Etranger (si on veut bien oublier les toutes dernières pages). Entendons-nous ; évidemment par rapport à beaucoup de choses, je trouve ça très bien ; mais qu'on le porte au pinacle comme on le fait encore, ça me paraît très exagéré. Dans une direction un peu comparable, Beckett, qui est son contemporain, va considérablement plus loin. Chez Camus, on a tendance à faire comme si son engagement, la générosité de l'homme, son charisme et son destin tragique étaient des valeurs ajoutées à sa littérature. Mais il n'y a pas de valeur ajoutée à la littérature. Camus est un bon écrivain. (J'ai un peu discuté de Camus à l'occasion des récentes manifestations en sa mémoire et je me suis rendu compte que, tiens, en réalité il y avait pas mal de gens qui partageaient mes réserves.)

Martell
avatar 29/05/2011 @ 08:03:54
Non.

Si tu veux exprimer l'idée d'une pomme par le symbole "111", l'idée d'ajouter par le symbole "-" et l'idée de deux pommes par le symbole "456788900876" alors, oui, tu peux écrire :

111-111=456788900876

Seulement tu diras exactement le meme chose que moi qui exprime la meme idée avec 1+1=2 (une autre convention que la tienne).
Le consensus, pour ce qui est de compter, ne se trouve PAS dans l'acte de compter en lui-meme; il se trouve dans le fait qu'on utilise les memes symboles pour le faire.


Obunori a compris, Virgile pas encore. L'exemple de 2 + 2 = 4 montre qu'il existe des vérités indépendantes de nous-même. Même si les hommes n'existaient pas, 2 + 2 = 4 serait vrai. Les nombres, les mathématiques, existent indépendamment de nous, de nos représentations.

Obunori, je te conseille ce livre passionnant : http://www.critiqueslibres.com/i.php/vcrit/24362


Quant au rapport entre tout cela et Barbara Cartland... ?

Le rapport avec Cartland, c'est que, comme pour les math je me dis que (peut-être) Tolstoï est un chef-d'oeuvre, indépendant de notre époque, de notre monde, de nos jugements,.. . C'est un chef-d'oeuvre, point. Je sais que c'est osé et que ça fera bondir Virgile. Mais n'empêche, ça me trotte en tête (t'inquiète Virgile, je ne vais pas le démontrer).


Vous êtes bien patient d'essayer de comprendre Virgile. Si lui ramasse deux pommes, puis deux autres et qu'il en voit 5 dans son panier, c'est son problème, pas le nôtre. ^^

Saint Jean-Baptiste 29/05/2011 @ 12:27:55
Ce qu’a dit Bolcho a suscité l’approbation générale et pourtant il conviendrait de bien nuancer.
Enseigner et éduquer ça consiste à transmettre un savoir et des valeurs qui constituent notre patrimoine culturel et religieux.
Et pour ça il faut se mettre d’accord sur des certitudes et sur des valeurs.
Il faut donner aux jeunes des modèles et des repères, des exemples à suivre.
Il faut les aider à s’élever, à s’élever l’âme, comme dit Saule, en leur faisant découvrir la beauté des « œuvres phares ».
Ce n’est pas du tout du bourrage de crâne. C’est comme ça que se transmet une culture et que se perpétue une civilisation (sans trop entrer dans les détails).

On a fait l’expérience de tout relativiser, de tout remettre en question, et de mettre en doute les « certitudes », à commencer par celles de la religion. Or la religion est le premier élément de la culture, c’est ce qui rassemble une communauté.
Monet, le fondateur de l’Europe disait : à recommencer je ferais une Europe autour d’une même religion (au lieu d’une même idole, l’Argent – remarque personnelle).

Je ne suis pas sociologue et sans jouer les Cassandre, je constate comme nous tous ici, le résultat : une génération qui ne lit plus les classiques, qui préfère la star’ac à l’opéra, Mireille Matthieu à Beethoven, et qui se donne pour modèle les stars du sho’bizz et les gloires du sport...
Une génération individualiste et manipulable à merci !

Et ceux qui s’échinent à proposer à cette génération de s’élever, en lisant autre chose que les Musso, Lévy et autre Cartland ont bien raison, à mon humble avis.

Oburoni
avatar 29/05/2011 @ 14:29:25

Enseigner et éduquer ça consiste à transmettre un savoir et des valeurs qui constituent notre patrimoine culturel et religieux.
Et pour ça il faut se mettre d’accord sur des certitudes et sur des valeurs.
Il faut donner aux jeunes des modèles et des repères, des exemples à suivre.
Il faut les aider à s’élever, à s’élever l’âme, comme dit Saule, en leur faisant découvrir la beauté des « œuvres phares ».
Ce n’est pas du tout du bourrage de crâne. C’est comme ça que se transmet une culture et que se perpétue une civilisation (sans trop entrer dans les détails).

On a fait l’expérience de tout relativiser, de tout remettre en question, et de mettre en doute les « certitudes », à commencer par celles de la religion. Or la religion est le premier élément de la culture, c’est ce qui rassemble une communauté.
Monet, le fondateur de l’Europe disait : à recommencer je ferais une Europe autour d’une même religion (au lieu d’une même idole, l’Argent – remarque personnelle).

Je ne suis pas sociologue et sans jouer les Cassandre, je constate comme nous tous ici, le résultat : une génération qui ne lit plus les classiques, qui préfère la star’ac à l’opéra, Mireille Matthieu à Beethoven, et qui se donne pour modèle les stars du sho’bizz et les gloires du sport...
Une génération individualiste et manipulable à merci !

Et ceux qui s’échinent à proposer à cette génération de s’élever, en lisant autre chose que les Musso, Lévy et autre Cartland ont bien raison, à mon humble avis.


Bienvenue au XXIeme siecle :-)

La religion, mouais... On vit tout de meme dans des sociétés de plus en plus métissés, multiculturelles, avec des individus aux croyances les plus contradictoires. Dire que la religion rassemble une communauté c'est bien beau, encore faut-il regarder de qui se compose la communauté en question. Je ne crois pas que la religion soit le plus important a inculquer si on veut souder toute une société autour de valeurs communes (oui, je sais, je suis un fanatique laique...^^).

Quant aux référentiels... Quelle genre de littérature enseigne-t-on dans les écoles ? Majoritairement des écrivains hommes, blancs, morts depuis des lustres dont les idées, souvent, sont completement dépassées aujourd'hui. Je ne suis pas étonné que les jeunes s'en foutent...

Poil2plume
avatar 29/05/2011 @ 15:24:58
Oburoni, je suis tout à fait d'accord avec ton raisonnement. Pour avoir relu récemment quelque passages de Balzac, je me suis rendue compte à quel point cet écrivain est poussiéreux, lourdingue, absolument pas intéressant, ni pour les lecteurs d'hier et moins encore pour ceux d'aujourd'hui. Il y a pourtant des tas de gens qui citent Balzac pour se donner un vernis de culture alors qu'ils n'ont probablement jamais lu une ligne de la Comédie Humaine.

Quant à la religion, aïe ! Rien ne prouve qu'elle rassemble les gens ni qu'elle élève l'âme. Quand on sait le nombre de gens qu'elle a tués, on peut en douter.

En ce qui concerne les Musso et consorts, s'ils existent et s'ils se vendent si bien, c'est qu'il y a une demande. Ces auteurs-là ont toujours existé, on les a oubliés et c'est tant mieux. Je ne sais pas si lire Musso rend meilleur, mais je connais personnellement des personnes qui lisent ça pour se détendre et qui sont bien conscientes de ne pas feuilleter un chef-d'oeuvre.

Lire Proust élève l'âme ? Pas si sûr... C'était un dandy, un esprit retors, un homme qui aimait assez se moquer de ses contemporains. Pour ma part, il m'ennuie, même si techniquement parlant, il écrit fort bien et manie brillamment les mots.

J'ai eu, moi aussi à une époque des avis très tranchés sur tout et tout le monde. Puis, quand on écoute les uns et les autres on se dit que ce n'est pas si simple. Je fréquente aussi un autre forum où nous sommes en train de débattre sur la maternité : toutes les femmes sont-elles aptes à élever des enfants ? Et un enfant à tout prix fait-il forcément le bonheur d'un couple ? Dur, dur, n'est-ce pas ? Dans la vraie vie, il y a des femmes qui font d'excellentes mères alors que leur entourage ne les voyaient pas du tout dans ce rôle. Et il y a celles qui veulent des enfants par conformisme et n'assument pas leur statut de parent...

Saule

avatar 29/05/2011 @ 15:42:51
Un bon citoyen se doit de s'abbrutir le plus possible, car c'est ainsi qu'il deviendra meilleur consommateur et qu'il participera à la croissance indispensable pour créer les emplois de demain.

C'est en regardant la Star Ac' qu'on est le plus réceptif aux messages publicitaires. A la limite, il est incivique de lire Proust.

Oburoni
avatar 29/05/2011 @ 16:01:11
Un bon citoyen se doit de s'abbrutir le plus possible, car c'est ainsi qu'il deviendra meilleur consommateur et qu'il participera à la croissance indispensable pour créer les emplois de demain.

C'est en regardant la Star Ac' qu'on est le plus réceptif aux messages publicitaires. A la limite, il est incivique de lire Proust.


Incivique ? Non, inutile.

En quoi Proust nous rendrait plus critique envers la société de consommation dans laquelle on vit ? Des écrivains contemporains, parlant aux générations d'aujourd'hui ne seraient-ils pas plus utiles a la culture et au développement moral et critique des jeunes qu'un dandy poussiéreux s'extasiant devant une madeleine ou une poignée de porte de salle de bain ?

Saule

avatar 29/05/2011 @ 16:20:32
Parce que quand tu lis Proust, tu ne manges pas de pop-corn et tu ne regardes pas les publicités pour la TV digitale.

Ceci dit, remplace Proust par Gavalda, et ça marche aussi : ce qui est incivique, c'est de lire :-)

Pendragon
avatar 29/05/2011 @ 16:22:25
Saule ne parlait pas de Proust en tant que Proust mais de Proust en tant qu'écrivain en opposition au consensus actuel qui est de ne lire que des Musso, Levy ou autre et de ne regarder que des Star'Ac ou autre, d'écrire en langage sms et d'aduler des joueurs de foot !

Que les anciens soient "poussiéreux" et plus trop en corrélation avec ce que nous vivons actuellement, je veux bien vous l'accorder, mais pas TOUS les anciens, ça c'est de un et de deux (et surtout), si vous ne deviez vous contenter que de ce qu'on vous offre actuellement (Musso, Levy, Star'Ac, hein, vous aurez compris), vous finirez exactement comme Saule le dit : une bande d'abrutis (sens premier du terme) qu'il est très facile de manipuler !

Feint

avatar 29/05/2011 @ 16:34:23
En quoi Proust nous rendrait plus critique envers la société de consommation dans laquelle on vit ? Des écrivains contemporains, parlant aux générations d'aujourd'hui ne seraient-ils pas plus utiles a la culture et au développement moral et critique des jeunes qu'un dandy poussiéreux s'extasiant devant une madeleine ou une poignée de porte de salle de bain ?
C'est beau comme du Beigbeder !

Oburoni
avatar 29/05/2011 @ 19:02:59
En quoi Proust nous rendrait plus critique envers la société de consommation dans laquelle on vit ? Des écrivains contemporains, parlant aux générations d'aujourd'hui ne seraient-ils pas plus utiles a la culture et au développement moral et critique des jeunes qu'un dandy poussiéreux s'extasiant devant une madeleine ou une poignée de porte de salle de bain ?

C'est beau comme du Beigbeder !


Oh par pitié !

Dans une France multiculturelle combien d'écrivains issus des anciennes colonies sont enseignés dans les salles de classe ? Ah ! Pardon ! J'oubliais : la littérature francaise n'englobe pas le monde francophone... Dans des écoles pleines de gamins issus des quatre coins de la francophonie c'est un peu problématique, non ?

Tout ce qu'on fait a l'heure actuelle avec les programmes scolaires c'est de dégouter des générations entieres de la littérature. Pourquoi ? Parce que les oeuvres qu'on leur force en travers de la gorge ne leur parlent pas. Elles refletent plus un éthnocentrisme poussiéreux qu'une ouverture au monde d'aujourd'hui... C'est contre-productif, en fait.
Mais bon ! Je ne suis pas naif, je suis bien conscient que mes propos choquent les Blancs du troisieme age issus des classes aisés qui font les dits programmes (et pour éviter tout malentendu : non, Feint, tu n'es pas visé).

Ce que je veux dire c'est que, si Proust n'est pas a balancer a la poubelle, il y a surement plus judicieux comme auteurs pour faconner l'esprit critique et la culture des jeunes, les intéresser a la réflexion.

Feint

avatar 29/05/2011 @ 19:30:34
Je ne me sens pas visé du tout : je ne fais pas les programmes, je ne suis pas issu d'un milieu particulièrement aisé et je ne suis même pas blanc.
Concernant les textes étudiés en classe, je ne vois pas de quoi tu parles. Proust n'est pour ainsi dire pas enseigné dans le secondaire ; au collège on étudie aussi bien des contemporains que des étrangers ou que des classiques, et même au lycée, d'ailleurs.
Mais ce ne sont pas tes clichés sur Proust qui me choquent le plus, ni même la confusion que tu fais entre l'œuvre et la personne (ce n'est pourtant pas pour rien que c'est aussi l'auteur de Contre Sainte-Beuve), ni encore l'idée vaguement méprisante (mais inconsciemment, je n'en doute pas) qu'un jeune issu de l'immigration, pour faire court, ne serait pas en mesure d'apprécier autre chose que la culture la plus contemporaine ; non, ce qui personnellement me gêne le plus c'est plutôt cette idée que la littérature doive "façonner l'esprit critique et la culture des jeunes, les intéresser à la réflexion", comme si la littérature avait vocation à servir à quelque chose, et comme si la littérature n'avait de validité que dans l'immédiateté : denrée immédiatement périssable avec date limite de consommation. A peu de choses près, c'est la conception de la littérature selon Beigbeder, d'où ma réaction.

Saint Jean-Baptiste 29/05/2011 @ 21:25:35
non, ce qui personnellement me gêne le plus c'est plutôt cette idée que la littérature doive "façonner l'esprit critique et la culture des jeunes, les intéresser à la réflexion", comme si la littérature avait vocation à servir à quelque chose,

La littérature est un des arts, un parmi les autres, que les enseignants et les éducateurs ont pour mission de transmettre aux générations futures.
Le sens du beau s’apprend et il faut faire un effort pour apprendre à reconnaître ce qui est beau.
Mais, évidemment, il faut d’abord accepter de se mettre d’accord sur ce qui est beau,
Ce que plus haut, on a appelé les « œuvres phares ».

Dans tous les arts il y a des œuvres reconnues comme étant à la base de notre culture, parce qu’elles sont reconnues belles une fois pour toutes.
Et c’est ça qui est aujourd’hui remis en question. On relativise tout. Aucune oeuvre n’est plus belle qu’une autre. Tout se vaut. Tout dépend des goûts de chacun. Tout est subjectif.

Dans ces circonstances, l’élite - intellectuelle s’entend - s’en tire toujours.
Mais les masses ne reconnaissent plus rien. La multitude ne sait plus ce qui est beau et ce qui ne l’est pas, parce qu’on ne lui a rien appris, elle n’a pas les bases nécessaires pour accéder à la vraie culture.
N’importe quel rappe est aussi beau qu’une sonate de Shoubert, n’importe quelle croûte peinte avec la queue d’un âne vaut un Léonard de Vinci, Musso vaut Mauriac et la star’ac est plus passionnante qu’un ballet de Maurice Béjart...

Je pense qu’il faut lutter contre cet abrutissement qui rend les foules bien plus manipulables qu’une éducation selon des normes bien établies.

Feint

avatar 29/05/2011 @ 21:56:35
La littérature est un des arts, un parmi les autres, que les enseignants et les éducateurs ont pour mission de transmettre aux générations futures.
Tout à fait : ce n'est pas un outil.

Aucune œuvre n’est plus belle qu’une autre. Tout se vaut.
Comme toi, je ne suis pas d'accord avec ça.
Tout est subjectif.
Mais avec ça, oui.

Et puis, aussi, je suis convaincu qu'il y a des œuvres dites "phares", surtout au XXe siècle, qui sont surestimées - et d'autres sous-estimées.

Oburoni
avatar 29/05/2011 @ 22:28:42

ce ne sont pas tes clichés sur Proust qui me choquent le plus, ni même la confusion que tu fais entre l'œuvre et la personne (ce n'est pourtant pas pour rien que c'est aussi l'auteur de Contre Sainte-Beuve), ni encore l'idée vaguement méprisante (mais inconsciemment, je n'en doute pas) qu'un jeune issu de l'immigration, pour faire court, ne serait pas en mesure d'apprécier autre chose que la culture la plus contemporaine ; non, ce qui personnellement me gêne le plus c'est plutôt cette idée que la littérature doive "façonner l'esprit critique et la culture des jeunes, les intéresser à la réflexion", comme si la littérature avait vocation à servir à quelque chose, et comme si la littérature n'avait de validité que dans l'immédiateté : denrée immédiatement périssable avec date limite de consommation. A peu de choses près, c'est la conception de la littérature selon Beigbeder, d'où ma réaction.


Non.

Tu ne me comprends pas et je pense savoir pourquoi : parce que tu semble avoir une vision radicalement opposée de la mienne de la littérature.

J'ai l'impression que tu vois une oeuvre d'art (un texte littéraire, en l'occurence) comme étant un produit fini, brut, qui se suffit amplement a lui-meme et est bon a apprécier en tant que tel. La littérature, vu sous cet angle, ne sert donc a rien, ne se justifie par rien si ce n'est des raisons purement esthétiques.
Je vois moi les choses de maniere completement différente.
Pour moi un texte est le produit d'un auteur, d'un moment particulier dans sa vie, écrit a une époque particuliere dans une société donné. Un texte ne se suffit pas a lui-meme, le contexte qui l'entoure, duquel il est en quelque sorte le produit est tout aussi important.

C'est peut-etre bateau (c'est meme une évidence fracassante) mais les conséquences sur l'enseignement de la littérature sont pourtant énormes.
Ce que je dis (d'un ton cassant et prétentieux, oui, mais tu devrais me connaitre depuis le temps !) c'est que l'on a plus de chance de comprendre Proust et son style, son oeuvre, en sachant qui il était (de quel milieu social il était issu etc...) qu'en faisant des commentaires composés de trois pages sur une partie charcuté de l'un de ses livres.

La littérature SERT a quelque chose : chaque oeuvre aide a faconner l'esprit critique parce que chaque oeuvre n'est qu'un point de vue de son auteur sur le monde. Etre capable de saisir ce point de vue est en soit s'ouvrir au monde, grandir intellectuellement et culturellement.

Par exemple en ce qui concerne les jeunes issus de l'immigration. Aucun mépris envers eux (cela me blesse que tu pense cela de moi...) ! Mon étonnement quant a l'absence d'auteurs issus des ex-colonies sert juste mon argument quant a l'approche calamiteuse de la littérature en France, son enseignement inutile (fait de commentaires composés...) et ses conséquences désastreuses (des jeunes qui ne se sentent pas concernés, parce qu'ils ne remettent pas les oeuvres en question dans un contexte qui leur parle).

Un exemple : ces jeunes étant tres souvent bilingues l'étude de tels auteurs pourrait, par exemple, les aider a questionner leur identité -ne serait-ce qu'a travers le choix des dits auteurs d'écrire en francais... Ce n'est qu'un exemple, mais qui montre les possibilités de réflexion offertes par la littérature. Encore faut-il la sortir du carcan "un texte se suffit a lui-meme n'allons pas au-dela" !

Feint

avatar 30/05/2011 @ 08:32:48
"Non."
- A quoi?

"Tu ne me comprends pas et je pense savoir pourquoi : parce que tu semble avoir une vision radicalement opposée de la mienne de la littérature."
- Sans doute.

"J'ai l'impression que tu vois une oeuvre d'art (un texte littéraire, en l'occurence) comme étant un produit fini, brut, qui se suffit amplement a lui-meme et est bon a apprécier en tant que tel."
- Au contraire, je la vois plutôt comme quelque chose en cours, inachevé, parfois discontinu. Mais c'est un autre sujet.

"La littérature, vu sous cet angle, ne sert donc a rien, ne se justifie par rien si ce n'est des raisons purement esthétiques."
- Je crois plutôt que la question de sa justification ne se pose pas. ça tient plutôt de l'enjeu vital, à mes yeux.

"Je vois moi les choses de maniere completement différente.
Pour moi un texte est le produit d'un auteur, d'un moment particulier dans sa vie, écrit a une époque particuliere dans une société donné. Un texte ne se suffit pas a lui-meme, le contexte qui l'entoure, duquel il est en quelque sorte le produit est tout aussi important."
- J'avais bien compris qu'on n'en avait pas fini avec le beuvisme.

"C'est peut-etre bateau (c'est meme une évidence fracassante) mais les conséquences sur l'enseignement de la littérature sont pourtant énormes.
Ce que je dis (d'un ton cassant et prétentieux, oui, mais tu devrais me connaitre depuis le temps !) c'est que l'on a plus de chance de comprendre Proust et son style, son oeuvre, en sachant qui il était (de quel milieu social il était issu etc...) qu'en faisant des commentaires composés de trois pages sur une partie charcuté de l'un de ses livres."
- L'exemple de Proust est particulièrement mal choisi. C'est au contraire en procédant comme tu le proposes qu'on a toutes les chances de passer à côté de l'essentiel de son œuvre. Il le savait lui-même très bien - d'où son Contre Sainte-Beuve.

"La littérature SERT a quelque chose : chaque oeuvre aide a faconner l'esprit critique parce que chaque oeuvre n'est qu'un point de vue de son auteur sur le monde. Etre capable de saisir ce point de vue est en soit s'ouvrir au monde, grandir intellectuellement et culturellement."
- Je suis gêné pour répondre à ça. Pour moi c'est un peu comme si tu disais d'un organisme vivant, ou même d'une personne, qu'il/elle sert à quelque chose.

"Par exemple en ce qui concerne les jeunes issus de l'immigration. Aucun mépris envers eux (cela me blesse que tu pense cela de moi...) !"
- Je sais très bien depuis longtemps que tu n'as aucun mépris envers eux, c'est justement pourquoi j'essaie de te faire sentir que les croire incapables de s'intéresser à des classiques, ce n'est pas leur faire honneur. (Et puis j'ai eu maintes fois l'exemple du contraire.)

"Mon étonnement quant a l'absence d'auteurs issus des ex-colonies sert juste mon argument quant a l'approche calamiteuse de la littérature en France, son enseignement inutile (fait de commentaires composés...) et ses conséquences désastreuses (des jeunes qui ne se sentent pas concernés, parce qu'ils ne remettent pas les oeuvres en question dans un contexte qui leur parle)."
- Senghor était au programme du bac il n'y a pas si longtemps, d'autres auteurs sont étudiés aussi ; et il y en aura d'autres encore. Je ne suis pas certain que l'accès à leur œuvre soit nécessairement plus facile pour les jeunes.

"Un exemple : ces jeunes étant tres souvent bilingues l'étude de tels auteurs pourrait, par exemple, les aider a questionner leur identité -ne serait-ce qu'a travers le choix des dits auteurs d'écrire en francais... Ce n'est qu'un exemple, mais qui montre les possibilités de réflexion offertes par la littérature. Encore faut-il la sortir du carcan "un texte se suffit a lui-meme n'allons pas au-dela" !"
- Bien sûr, pourquoi pas ; c'est un axe de réflexion intéressant ; je suis sûr qu'on y a déjà pensé.

Poil2plume
avatar 30/05/2011 @ 11:41:06
C'est bien beau, cette réflexion sur l'utilité ou non de lire tel auteur plus "nourrissant" que tel autre. Quand SJB parle de masses plus malléables car moins cultivées, je réponds : oui, mais les masses incultes ont toujours existé. L'école est aujourd'hui gratuite et obligatoire pour tous les enfants. Pourtant, l'illettrisme semble gagner du terrain jusque dans les classes moyennes.

Les libraires sondés par Livre Hebdo ont constaté un pourcentage inchangé de gros lecteurs depuis un siècle et surtout depuis la création du livre de poche, en principe accessible à tous. Lire et aimer la littérature reste donc un choix personnel, tant à notre époque qu'à celle de Proust. Ce sont finalement toujours les mêmes qui lisent avec plaisir des oeuvres un peu plus ambitieuses que Ensemble c'est tout. Une question de culture ? D'éducation ? Pas forcément. Il y a bien des fans de musique classique, dans une proportion tout aussi inchangée. Et ce n'est pas en introduisant des auteurs contemporains qu'on donnera envie aux jeunes de lire.

Oui Feint, faire lire Senghor ou Michon n'est pas forcément plus facile pour des jeunes sans références livresques ni même culturelles dites "classiques". Et puis, au risque de me faire lyncher, j'ajouterais : pour quoi faire ? Lire doit rester un plaisir égoïste, pas un truc utilitaire. En soi, lire ne sert à rien si on n'éprouve aucune curiosité pour le monde.

Je suis effarée par l'indifférence de trop de jeunes pour les langues étrangères. Là encore, nous avons des profs compétents, des heures de cours, des outils d'apprentissage performants, mais rares sont les jeunes qui maîtrisent une langue, une connaissance bien plus utilitaire que la lecture. Quand j'en encourage certains à faire un séjour à l'étranger, ils se rebiffent. Trop contraignant, à quoi bon ? Je me demande d'ailleurs ce qu'ils vont devenir dans ce monde de plus en plus axé sur la performance et des connaissances variées...

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