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Un texte prophétique de Marc Moulin, paru en 2003, dans sa rubrique « Humoeurs » (TéléMoustique)
Marc Moulin, né le 16 août 1942 et mort le 26 septembre 2008, est un pianiste, compositeur, animateur et producteur radio, humoriste, chroniqueur et touche-à-tout belge.
Je nous vois déjà dans 20 ans. Tous enfermés chez nous. Claquemurés (j’adore ce verbe, et ce n’est pas tous les jours qu’on peut le sortir pour lui faire faire un petit tour). Les épidémies se seront multipliées: pneumopathie atypique, peste aviaire, et toutes les nouvelles maladies. Et l’unique manière d’y échapper sera de rester chez soi. Et puis il y aura toujours plus de menaces extérieures: insécurité, vols, attaques, rapts et agressions — puisqu’on aura continué de s’acharner sur les (justes) punitions en négligeant les (vraies) causes. Et le terrorisme, avec les erreurs à répétition des Américains, sera potentiellement à tous les coins de rues. La vie de « nouveaux prisonniers » que nous mènerons alors sera non seulement préconisée, mais parfaitement possible, et même en grande partie très agréable. Grâce au télé-travail qui nous permettra de bosser à la maison tout en gardant les enfants (qui eux-mêmes suivront l’école en vidéo-conférence). Grâce à Internet qui nous épargnera bien des déplacements: on n’aura plus besoin ni de poster les lettres, ni d’acheter un journal « physique », ni d’aller faire la file dans les administrations. (…). Dans les rues, il ne restera plus que des chiens masqués qui font seuls leur petite promenade (pas de problème, sans voitures), et du personnel immigré sous-payé en combinaison étanche, qui s’occupera de l’entretien des sols et des arbres. D’autres s’occuperont de la livraison de notre caddy de commandes à domicile. Alors nous aurons enfin accompli le dessein de Big Brother. Nous serons des citoyens disciplinés, inoffensifs, confinés, désocialisés. Nous serons chacun dans notre boîte. Un immense contingent de «je», consommateurs inertes. Finie l’agitation. Finie la rue.
Marc Moulin, né le 16 août 1942 et mort le 26 septembre 2008, est un pianiste, compositeur, animateur et producteur radio, humoriste, chroniqueur et touche-à-tout belge.
Je nous vois déjà dans 20 ans. Tous enfermés chez nous. Claquemurés (j’adore ce verbe, et ce n’est pas tous les jours qu’on peut le sortir pour lui faire faire un petit tour). Les épidémies se seront multipliées: pneumopathie atypique, peste aviaire, et toutes les nouvelles maladies. Et l’unique manière d’y échapper sera de rester chez soi. Et puis il y aura toujours plus de menaces extérieures: insécurité, vols, attaques, rapts et agressions — puisqu’on aura continué de s’acharner sur les (justes) punitions en négligeant les (vraies) causes. Et le terrorisme, avec les erreurs à répétition des Américains, sera potentiellement à tous les coins de rues. La vie de « nouveaux prisonniers » que nous mènerons alors sera non seulement préconisée, mais parfaitement possible, et même en grande partie très agréable. Grâce au télé-travail qui nous permettra de bosser à la maison tout en gardant les enfants (qui eux-mêmes suivront l’école en vidéo-conférence). Grâce à Internet qui nous épargnera bien des déplacements: on n’aura plus besoin ni de poster les lettres, ni d’acheter un journal « physique », ni d’aller faire la file dans les administrations. (…). Dans les rues, il ne restera plus que des chiens masqués qui font seuls leur petite promenade (pas de problème, sans voitures), et du personnel immigré sous-payé en combinaison étanche, qui s’occupera de l’entretien des sols et des arbres. D’autres s’occuperont de la livraison de notre caddy de commandes à domicile. Alors nous aurons enfin accompli le dessein de Big Brother. Nous serons des citoyens disciplinés, inoffensifs, confinés, désocialisés. Nous serons chacun dans notre boîte. Un immense contingent de «je», consommateurs inertes. Finie l’agitation. Finie la rue.
Situer Marc Moulin ne serait pas inutile pour nos amis français.
Musicien-chercheur, pianiste et jazzman, il a dirigé un groupe de jazz fusion, "Placebo"; animateur et producteur de radio, il est à l'origine de l'introduction de la fm à la Rtbf et de plusieurs émissions aujourd'hui cultes qui nous firent découvrir ce qu'il appelait les "troisièmes musiques" (ni la variété, ni la musique classique) et notamment les courants underground américains, et vit avec horreur débarque la publicité sur les ondes publiques ; Il produisit des artistes divers comme Alain Chamfort, Lio ou les Sparks; avec deux amis musiciens, il fonda le groupe Telex qui récolta à l'Eurovision un mémorable "Belgium, one point"; il a livré pour les médias écrits et radiotélévisés, d'innombrables chroniques, billets "d'humœurs" (dont celui-ci) et feuilletons plus ou moins loufoques, mais toujours d'une grande intelligence, d'une grande sensibilité, d'une grande acuité. J'en oublie. Il a laissé un grand vide chez ses collègues, ses amis et le public.
Mais il n'aimerait pas qu'on dise tout cela, car Marc Moulin était un homme qui prenait la vie très au sérieux, mais pas lui-même.
Musicien-chercheur, pianiste et jazzman, il a dirigé un groupe de jazz fusion, "Placebo"; animateur et producteur de radio, il est à l'origine de l'introduction de la fm à la Rtbf et de plusieurs émissions aujourd'hui cultes qui nous firent découvrir ce qu'il appelait les "troisièmes musiques" (ni la variété, ni la musique classique) et notamment les courants underground américains, et vit avec horreur débarque la publicité sur les ondes publiques ; Il produisit des artistes divers comme Alain Chamfort, Lio ou les Sparks; avec deux amis musiciens, il fonda le groupe Telex qui récolta à l'Eurovision un mémorable "Belgium, one point"; il a livré pour les médias écrits et radiotélévisés, d'innombrables chroniques, billets "d'humœurs" (dont celui-ci) et feuilletons plus ou moins loufoques, mais toujours d'une grande intelligence, d'une grande sensibilité, d'une grande acuité. J'en oublie. Il a laissé un grand vide chez ses collègues, ses amis et le public.
Mais il n'aimerait pas qu'on dise tout cela, car Marc Moulin était un homme qui prenait la vie très au sérieux, mais pas lui-même.
Bien dit, Minoritaire.
Je viens de terminer la lecture de sa bio :
http://www.critiqueslibres.com/i.php/vcrit/57581
Je viens de terminer la lecture de sa bio :
http://www.critiqueslibres.com/i.php/vcrit/57581
Bien dit, Minoritaire.Je viens de terminer la lecture de sa bio :J'ai vu après avoir posté mon commentaire.
http://www.critiqueslibres.com/i.php/vcrit/57581
Pour une fois, ma paresse a été prise en défaut : si je l'avais lu ta critique avant, je me serais contenté de mentionner le lien ! :-D
Incroyable ce texte ! C'est clair que ça nous pendait au nez !
Bien dit, Minoritaire.Je viens de terminer la lecture de sa bio :
http://www.critiqueslibres.com/i.php/vcrit/57581
J'ai vu après avoir posté mon commentaire.
Pour une fois, ma paresse a été prise en défaut : si je l'avais lu ta critique avant, je me serais contenté de mentionner le lien ! :-D
Meuh non, Minoritaire, ton message est de bon aloi.
Le fameux morceau "eurovision" https://www.youtube.com/watch?v=6USa0zUMmqI qui a injustement terminé dans les limbes du classement. J'aime beaucoup le commentaire d'une certaine Ramona "When you procrastinate too long on a presentation and you have to put something together quick the night before." :-) (mais c'est injuste)
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