Tistou 09/08/2019 @ 22:52:06
Vous l'aurez reconnu, c'est le Lot 1 que j'ai choisi ...

C’est à trois que nous partîmes, fiers et décidés, pour la quête de notre Graal. Nos destriers se résumaient en un seul véhicule pétaradant, de couleur blanche. Autre temps, autre époque (non pas qu’il n’y eût de blancs fiers destriers autrefois, mais plutôt qu’ils ne pétaradaient pas, bien sûr).
Notre Graal ce n’était pas la conquête de Jérusalem non plus. Autre temps, autre époque, on a les Graal (Graux ??) qu’on mérite. D’ailleurs je n’oserais même pas vous décrire le Graal.
Pour autant nous étions fiers, déterminés et prêts à aller jusqu’au bout pour le conquérir ce Graal. Jusqu’au bout. En l’occurrence, jusqu’au bout signifiait d’abord monter, portés par notre véhicule pétaradant, blanc, jusqu’au col du Barioz, à mille mètres environ, puis monter à droite par une petite route, toujours plus haut, vers le Foyer du ski de fond. Oui, il était là-haut notre Graal, au plus près des nuages.
Non, à vrai dire il n’y avait pas de nuages, il faisait bleu, il faisait chaud … (ça se mérite un Graal !). Pour tout dire, c’était l’été, l’été tendance caniculaire (de toutes façons moi je préfère les chats aux chiens, que ce soit bien clair, alors la canicule …). On se félicitait d’autant plus de n’avoir pas dû endosser les armures de nos prédécesseurs, ceux qui montaient, vous savez, les fiers destriers ? Vers Jérusalem plutôt que vers le Barioz d’ailleurs.
Notre Graal ne nécessitait pas de telles protections contre des forces adverses. Du moins le croyons-nous, alors. Non, notre équipement était du type très léger ; short de course à pied en ce qui me concerne (le rouge et bleu, tiens les couleurs du FCG, l’équipe de rugby de Grenoble) et vague T-shirt. Et puis mes runnings de trail, celles à semelles plutôt rigides et cramponnées. (Quand on part à l’assaut du Graal il ne faut pas mégotter non plus, tous les chevaliers vous le diront)
Derrière moi, côté passager, une femme. Eh oui, de nos jours elles aussi participent à la quête du Graal. Pas comme accompagnatrice je veux dire. Autre temps, autre époque ; comme guerrière active, « warrior » si vous préférez comme on dirait maintenant. Pas n’importe quelle femme par ailleurs puisque c’était celle de mon frère, assis à côté de moi. Ma belle-sœur autrement dit. Et là pour le coup j’en ai fini avec les présentations, vous connaissez tous les protagonistes de cette équipée vers le Graal !
Pourquoi vous parlai-je de ma belle-sœur ? Ah oui, j’avais dû lui préciser toute la montée durant vers notre Graal que non, nous ne verrions pas de marmottes. Que pour les marmottes c’était plutôt en face, en Chartreuse, mais que sur Belledonne, là où nous étions, de marmottes nous n’étions pas coutumiers. Non pas que c’eût été désagréable de joindre marmottes au Graal ! Bien sûr que non. Mais quand il n’y a pas, il n’y a pas. Et puis d’abord le Graal nous attendait là-haut, concentrons-nous que diable !
Comment décrire l’état du guerrier qui rencontre le Graal ? Qui sait qu’il va pouvoir livrer combat à la juste place pour la juste cause. Nirvana ? Profonde satisfaction ? Au moins tout ça ! Au moins !
C’est que le véhicule blanc et pétaradant ayant été déposé à la place qui était assignée à ses semblables, nous nous étions mis en route, décidés et fiers, émoustillés de la proximité de la chose. Et il n’avait pas fallu longtemps pour tomber dessus. Au détour du sentier, sur les pentes qui le bordaient, les petits pieds de trente – quarante centimètres de haut, aux feuilles rondes vert foncé qui formaient massifs comme les théiers (mais alors beaucoup moins haut) dans les montagnes autour de Darjeeling. Et sur ces massifs vert foncé , accrochées comme des boules de Noël, de petites perles violettes qui formaient tâches sombres et promesse graalienne. Bon, vous l’avez deviné, ne tournons pas autour du pot, c’est de myrtilles dont je vous parle ! (rétrospectivement je pense que l’emploi du terme de Graal est quelque peu abusif mais … autre temps, autre époque)
Oui, elles étaient là. Fidèles au rendez-vous. Emus nous nous étions déployés et étions montés à l’assaut (montés est un peu exagéré s’agissant de cueillir de petites baies à trente centimètres du sol !).
Une heure et demi plus tard, après une bataille de tous les instants, nous avions relevé nos reins endoloris mais nos regards disaient assez la fierté du devoir accompli. Nous en avions 1,5 kilo (bon, plutôt 1 500 g, ça fait plus riche).
Nous nous en étions retournés pour retrouver notre blanc véhicule pétaradant et retourner dans la vallée de toutes les chaleurs quand ma belle-sœur, dans un dernier effort pour atterrir sur la piste en contrebas avait dévalé, souple et gracieuse, se jouant de la gravité, sur la pente terminale abrupte. Je la suivais. Je me crus souple et gracieux moi aussi, je ne fus que pataud et grotesque, incapable de conserver mon équilibre une fois le dévalement entamé. Je dus m’emmêler les pinceaux … toujours est-il que je trouvais subitement que le sol venait bien vite à ma rencontre et de fait c’est tout mon côté gauche qui s’écrasait brutalement au sol. Je regrettais in petto l’absence d’armure. Ca aurait évité que mon short glissant à l’atterrissage sur le sol ne se retrouve à mes genoux et mon postérieur à l’air. Sonné, dans la position du lutteur gréco-romain mis au tapis, je sentais bien qu’il y avait un truc au niveau de mes jambes. Ca faisait comme des crampes sous ma cuisse droite - eh non, pas de crampes, une déchirure (petite) musculaire. Et ce n’était pas très clair sous mon genou gauche - ah oui, des contusions ou un début d’entorse ? Je vous épargne l’épaule gauche, j’en resterai à mes jambes …
C’est clopin-clopant, mais détenteur du Graal (ah mais !) que j’ai regagné le blanc véhicule et suis redescendu dans la vallée. Le Graal, nous l’avions trouvé. Nous le ramenions après une dure lutte ayant marqué les corps (le mien surtout !). Par contre, confirmation, mais vous le saviez déjà ; de marmottes point. Ben oui, pour les marmottes il faut partir de l'autre côté de la vallée ! Mais je l’avais déjà dit …

Lobe
avatar 10/08/2019 @ 12:17:14
Dis donc, est-ce que tout est vrai dans cette tranche estivale à petit goût Monthy Python? Je veux dire... le short... glissant?! Elle est drôle cette épopée des temps modernes. Un Graal très quotidien, mais quand on se retrouve chez soi avec ces 1500000 mg de mûres, on est en droit de se sentir inondé de fierté!

Minoritaire

avatar 10/08/2019 @ 13:24:15
:-)
Il y a quand même quelque chose qui me turlupine : si tu n'avais pas de graal au début, dans quoi as-tu mis tes mûres ?
- Un graal, des groles : accessoire indispensable pour la quête en montagne, alors qu'à l'église, des espadrilles suffisent.

Cyclo
avatar 10/08/2019 @ 18:28:15
Une randonnée comme je les aime, avec une chute comme je les adore, aussi physique que métaphorique : serait-il pas un peu amoureux de sa belle-soeur, le petit frère, comme je le fus dans le temps de la finacée de mon frère aîné, qui était si belle; autre temps, autre époque !

Tistou 10/08/2019 @ 22:39:19
Dis donc, est-ce que tout est vrai dans cette tranche estivale à petit goût Monthy Python? Je veux dire... le short... glissant?! Elle est drôle cette épopée des temps modernes. Un Graal très quotidien, mais quand on se retrouve chez soi avec ces 1500000 mg de mûres, on est en droit de se sentir inondé de fierté!

Tout est vrai hormis les marmottes.Oui, le coup du short aussi, humiliant en diable ! Bonne idée de convertir en mg mais des myrtilles, Lobe, des myrtilles. Les mûres c'est beaucoup plus facile et c'est pour ... dans 2 - 3 semaines ?

Tistou 10/08/2019 @ 22:42:35
:-)
Il y a quand même quelque chose qui me turlupine : si tu n'avais pas de graal au début, dans quoi as-tu mis tes mûres ?
- Un graal, des groles : accessoire indispensable pour la quête en montagne, alors qu'à l'église, des espadrilles suffisent.

Nous avions chacun notre Graal, nos Graux quoi, et non pas des grolles, et non pas des mûres ; des myrtilles ! (encore appelées brimbelles dans les Vosges). Au moins j'aurais eu des espadrilles aux pieds j'aurais eu une excuse ...

Tistou 10/08/2019 @ 22:43:43
Une randonnée comme je les aime, avec une chute comme je les adore, aussi physique que métaphorique : serait-il pas un peu amoureux de sa belle-soeur, le petit frère, comme je le fus dans le temps de la finacée de mon frère aîné, qui était si belle; autre temps, autre époque !

T'es fou toi ! Et d'abord qui te dit que mon frère ne lit pas C.L. ? Non, je l'aime bien et l'apprécie, voilà tout.

Minoritaire

avatar 10/08/2019 @ 22:51:53
Nous avions chacun notre Graal, nos Graux quoi, et non pas des grolles, et non pas des mûres ; des myrtilles ! (encore appelées brimbelles dans les Vosges).
Ah oui, c'est Lobe qui a parlé de mûres et moi, bêtement, j'ai suivi.

Marvic

avatar 11/08/2019 @ 11:30:23
Participer à un exo et raconter une douloureuse t réelle mésaventure, ce n'est pas courant. Du coup, on connaissait la fin, mais pas tout :-)
J'aime beaucoup l'humour des parenthèses !

Pieronnelle

avatar 12/08/2019 @ 16:47:13
Un peu traumatisé le Tistou ! Faut les aimer les myrtilles pour prendre des risques pareils ! J'avoue que je me suis bien amusée avec le short sur les genoux et si toi tu aurais bien voulu voir mon téléphone accroché au plafond moi je l'ai bien visionnée ta scène...Tu dis que les mûres c'est plus facile à ramasser mais je n'ose même pas imaginer si tu étais tombé dans un buisson de ronces !!!
J'espère que les épaules et le reste se rétablissent vite...
Dans ma petite jeunesse nous allions ramasser les myrtilles pour les personnes qui nous gardaient l'été à la campagne près des Bois noirs. On en remplissait des caisses entières à l'époque et je me souviens de grands peignes pour les cueillir et c'était fatiguant ; nous revenions les bouches barbouillées de noir malgré l'interdiction.
Dis-moi, tu ne serai pas un peu gourmand par hasard pour aimer autant les confitures ?
La prochaine fois pense-bien à mettre ton armure pour ta quète du Graal :-)

Fd
avatar 12/08/2019 @ 17:49:04
La quête du graal comparée à la quête de myrtilles, quelle imagination ! Très amusant à lire et j'ai ri de ta chute, oh excuse-moi Tistou ! Autrefois j'allais aux myrtilles en Valais, aujourd'hui elles sont de plus en plus rares et dans les bistrots de montagne, ils ne servent que des tartes de grosses myrtilles américaines (ou autres) qui n'ont aucun gout, c'est triste, non ? Autre temps, autre époque comme tu le dis si bien.

Antinea
avatar 28/08/2019 @ 08:52:09
Wouarf ! j'ai bien ri ! Merci !
Le graal, les graux... ;)
La canicule... le chien, il a fallu que je la relise celle-là, j'avais pas tout compris au début.

J'adore le rythme de ton texte et même le suspens, j'ai cru au début que le Graal c'était une course en trail, une épreuve sportive sérieuse, et bé non ! Gourmands ! Cela dit, les myrtilles sauvages, que c'est bon ! cela vaut bien le qualificatif de Graal. Il paraît que c'est bon pour la santé cognitive les myrtilles !

Bon, j'espère que la chute ne fut pas trop douloureuse. les myrtilles s'en sortent bien ! Et toi aussi avec les contraintes. Je note : pas de marmotte à Belledonne.


Page 1 de 1
 
Vous devez être connecté pour poster des messages : S'identifier ou Devenir membre

Vous devez être membre pour poster des messages Devenir membre ou S'identifier