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08 juillet
La poussière danse en nuage au-dessus des festivaliers. Une masse de corps, des flashs, une vibration qui se propage dans la terre, court dans les os, brise les membres. La chaleur de l’été se love même dans les petites heures de la nuit. On transpire, on boit, on crie, on jette ses bras, ses bouteilles, on consomme, on élimine, on brûle, on gaspille, on se consume, on oublie.
29 mai
Un nuage pétaradant : la moto glisse entre les taxis jaunes, les béances dans la route, les passants aux aguets, nombreux, rapides. Il y a sur le bord de la chaussée, régulièrement, de joyeux monticules, des royaumes de plastique et de curiosités abandonnées. Une babouche fatiguée, et tous les épis de maïs de la saison qui ressemblent à des culs de poule déplumés.
14 mars
Une fumée blanche en nuage au-dessus de la grande bouche de la centrale, le poste le montre. Dans la pièce, des notes de piano, qui parfois sonnent juste. La voix parle d’un accident, le petit garçon se distrait de ses touches et lorgne. C’est loin, là-bas les yeux des gens sont une espèce d’amande sans coque. Il y a beaucoup de personnes en combinaisons d’astronaute, ils s’affairent, ils en mourront.
07 septembre
Devant le soleil, un nuage passe, haut, grand. Il s’accroche dans les branches, un temps seulement. Puis c’est comme si la terre craque. Voici une très haute tige, qui a duré, forte comme peut l’être celle d’un vieil arbre soudé à son sol. Trois hommes sont autour, les machines ont donné toute la matinée. Les bruits de cassure s’accentuent. Un gémissement ensuite, et elle abdique. On la débitera, sur la nouvelle route rouge elle commencera de prendre le large.
16 janvier
Le fluide nuage de flétans, toi grand chalutier tu le pêches à vastes filets serrés, envoyés profond, envoyés dans le noir de la nuit marine, envoyés là où il n’y a pas de constat, pas d’œil braqué, là où il y a des bancs de poisson foudroyés prestement par tes nasses aux mailles fines, solides, si solides, impitoyables et sereines, qui fendent l’eau et raclent sans cri, chaque jour.
25 décembre
Pas de nuage. Le grand bleu blanc du ciel asséché. Le pincement lancinant du soleil domine le silence d’un monde où aucune oreille ne se tend, sur des kilomètres de roches rompues par la chaleur. Le long paysage a une strie : un oléoduc noir qui fait courir ses conduits aussi droit que possible, entre le forage et la ville qui pulsait par le passé.
29 février
Nous avons constaté dégrisés que la machine se grippait. Pourtant nous n’avons pas eu mal, pas vraiment, éthérisés par nos remèdes, nos œillères, nos discours, nos divertissements. C’est ainsi que nous avons refusé d’élaguer l’excès de confort, les compromissions, les désirs outremangeurs. Sans beaucoup de questions, nous avons de plus belle croqué, déchiré, pompé, mis des pichenettes à ce qui nous faisait tort. De nos ventres victorieux la vie hors de nous s’est versée. Comme cela, ils sont arrivés, sur la planète terne, les âges nus.
La poussière danse en nuage au-dessus des festivaliers. Une masse de corps, des flashs, une vibration qui se propage dans la terre, court dans les os, brise les membres. La chaleur de l’été se love même dans les petites heures de la nuit. On transpire, on boit, on crie, on jette ses bras, ses bouteilles, on consomme, on élimine, on brûle, on gaspille, on se consume, on oublie.
29 mai
Un nuage pétaradant : la moto glisse entre les taxis jaunes, les béances dans la route, les passants aux aguets, nombreux, rapides. Il y a sur le bord de la chaussée, régulièrement, de joyeux monticules, des royaumes de plastique et de curiosités abandonnées. Une babouche fatiguée, et tous les épis de maïs de la saison qui ressemblent à des culs de poule déplumés.
14 mars
Une fumée blanche en nuage au-dessus de la grande bouche de la centrale, le poste le montre. Dans la pièce, des notes de piano, qui parfois sonnent juste. La voix parle d’un accident, le petit garçon se distrait de ses touches et lorgne. C’est loin, là-bas les yeux des gens sont une espèce d’amande sans coque. Il y a beaucoup de personnes en combinaisons d’astronaute, ils s’affairent, ils en mourront.
07 septembre
Devant le soleil, un nuage passe, haut, grand. Il s’accroche dans les branches, un temps seulement. Puis c’est comme si la terre craque. Voici une très haute tige, qui a duré, forte comme peut l’être celle d’un vieil arbre soudé à son sol. Trois hommes sont autour, les machines ont donné toute la matinée. Les bruits de cassure s’accentuent. Un gémissement ensuite, et elle abdique. On la débitera, sur la nouvelle route rouge elle commencera de prendre le large.
16 janvier
Le fluide nuage de flétans, toi grand chalutier tu le pêches à vastes filets serrés, envoyés profond, envoyés dans le noir de la nuit marine, envoyés là où il n’y a pas de constat, pas d’œil braqué, là où il y a des bancs de poisson foudroyés prestement par tes nasses aux mailles fines, solides, si solides, impitoyables et sereines, qui fendent l’eau et raclent sans cri, chaque jour.
25 décembre
Pas de nuage. Le grand bleu blanc du ciel asséché. Le pincement lancinant du soleil domine le silence d’un monde où aucune oreille ne se tend, sur des kilomètres de roches rompues par la chaleur. Le long paysage a une strie : un oléoduc noir qui fait courir ses conduits aussi droit que possible, entre le forage et la ville qui pulsait par le passé.
29 février
Nous avons constaté dégrisés que la machine se grippait. Pourtant nous n’avons pas eu mal, pas vraiment, éthérisés par nos remèdes, nos œillères, nos discours, nos divertissements. C’est ainsi que nous avons refusé d’élaguer l’excès de confort, les compromissions, les désirs outremangeurs. Sans beaucoup de questions, nous avons de plus belle croqué, déchiré, pompé, mis des pichenettes à ce qui nous faisait tort. De nos ventres victorieux la vie hors de nous s’est versée. Comme cela, ils sont arrivés, sur la planète terne, les âges nus.
Lobe, c'est magnifique, tout y est.. et ce clin d'œil au 7è jour, lorsque Dieu a terminé son travail..alors que l'homme est en train de le détruire..
Notre pauvre planète qui se meurt, sous la société de consommation, les plastiques jetés partout, le danger des centrales nucléaires, la déforestation, la pêche industrielle, l'extraction du pétrole... et les conséquences dramatiques pour l'humanité..
En plus, bravo pour toutes ces jolies métaphores (est ce le mot exact ?) une babouche fatiguée, le gémissement de l'arbre, les poissons foudroyés....
Notre pauvre planète qui se meurt, sous la société de consommation, les plastiques jetés partout, le danger des centrales nucléaires, la déforestation, la pêche industrielle, l'extraction du pétrole... et les conséquences dramatiques pour l'humanité..
En plus, bravo pour toutes ces jolies métaphores (est ce le mot exact ?) une babouche fatiguée, le gémissement de l'arbre, les poissons foudroyés....
Ah te re-voilà Lobe ! Les yeux et la tête (et le coeur aussi peut-être:-) emplis de tant de choses et souvenirs...
Ton texte m'a bien fait réfléchir tu sais , j'ai cherché et trouvé...tout est là oui, tout ce que les hommes commettent sur notre belle planète ! J'ai découvert aussi que le mot "foudroyés" avait un sens réel concernant cette pêche "électrique" et c'est moi du coup qui ait été foudroyée, quelle honte !
Que dire d'autre ? Que tu deviens de plus en plus complète, que ton jeune âge et ton esprit nous apportent un espoir dans bien des domaines. Personnellement tu es pour moi une consolation sur ce monde futur qui semble en perdition." Heureusement il y a une Lobe" j'ai écrit sur un autre fil où j'étais déprimée...Tu me permettra de souhaiter qu'il y en ai plusieurs :-)
La dernière phrase me reste un peu mystérieuse, faut-il qu'elle le reste ?
Ton texte m'a bien fait réfléchir tu sais , j'ai cherché et trouvé...tout est là oui, tout ce que les hommes commettent sur notre belle planète ! J'ai découvert aussi que le mot "foudroyés" avait un sens réel concernant cette pêche "électrique" et c'est moi du coup qui ait été foudroyée, quelle honte !
Que dire d'autre ? Que tu deviens de plus en plus complète, que ton jeune âge et ton esprit nous apportent un espoir dans bien des domaines. Personnellement tu es pour moi une consolation sur ce monde futur qui semble en perdition." Heureusement il y a une Lobe" j'ai écrit sur un autre fil où j'étais déprimée...Tu me permettra de souhaiter qu'il y en ai plusieurs :-)
La dernière phrase me reste un peu mystérieuse, faut-il qu'elle le reste ?
En voilà une histoire qu'elle finit mal ! (qu'on me pardonne ce néologisme !) Mais c'est l'histoire récente de l'humanité que tu racontes là, à coup de flashs ponctuels !
"Pourtant nous n’avons pas eu mal, pas vraiment, éthérisés par nos remèdes, nos œillères, nos discours, nos divertissements. C’est ainsi que nous avons refusé d’élaguer l’excès de confort, les compromissions, les désirs outremangeurs."
C'est tout à fait ça, "... nos oeillères, nos discours ...", et le mur devant qu'on fait mine de ne pas voir. Il se passera bien quelque chose ... se dit-on ...
L'explosion démographique exponentielle condamne pourtant toutes nos compromissions et nos refus de changements. La seule solution à bien y regarder à cette explosion démographique serait une "implosion", un carnage massif, de beaucoup beaucoup de millions (milliards ?) d'individus. Bien sûr ce n'est pas une solution, ou alors la fameuse "finale" mais vraiment finale, avec zéro survivants. Et le pire c'est qu'on saurait le faire, ça, sans forcément le faire volontairement. "Comme cela, ils sont arrivés, sur la planète terne, les âges nus"
"Pourtant nous n’avons pas eu mal, pas vraiment, éthérisés par nos remèdes, nos œillères, nos discours, nos divertissements. C’est ainsi que nous avons refusé d’élaguer l’excès de confort, les compromissions, les désirs outremangeurs."
C'est tout à fait ça, "... nos oeillères, nos discours ...", et le mur devant qu'on fait mine de ne pas voir. Il se passera bien quelque chose ... se dit-on ...
L'explosion démographique exponentielle condamne pourtant toutes nos compromissions et nos refus de changements. La seule solution à bien y regarder à cette explosion démographique serait une "implosion", un carnage massif, de beaucoup beaucoup de millions (milliards ?) d'individus. Bien sûr ce n'est pas une solution, ou alors la fameuse "finale" mais vraiment finale, avec zéro survivants. Et le pire c'est qu'on saurait le faire, ça, sans forcément le faire volontairement. "Comme cela, ils sont arrivés, sur la planète terne, les âges nus"
Six jours, six fortes descriptions de la folie humaine, le septième (un tous les quatre ans) étant sans retour. C'est bien mis en mots, Lobe, ça fait frémir. Et tout cela nous le savons, est-ce sans remède ?
Merci pour vos commentaires. Beaucoup de palliatifs, pas de remède, d'après moi. Mais j'ai confiance dans l'évolution, elle nous sortira d'autres choses de son chapeau! (pour les humains, en revanche, j'y crois moyen, à moyen terme...)
Et une musique de circonstance, de mes préférées... https://www.youtube.com/watch?v=oJSLQAQqa7Y
Et une musique de circonstance, de mes préférées... https://www.youtube.com/watch?v=oJSLQAQqa7Y
coucou,
journal qui fait voir le temps des arbres qui n'est pas celui des humains, cela m'étonnait de ne l'avoir vu dans aucun texte jusque là.
Le 7 septembre est triste, j'y ai vu quand même de l'espoir, si ce n'est pour la semaine prochaine(à l'échelle sylvestre) pour les mois qui suivront quitte à même devoir attendre quelques années. Bon espoir plus pour la nature que pour l'homme. En tout cas astucieux et bien écrit. 'outremangeur' terriblement bon mot pour exprimer ce que l'on peut constater de la nature et l'homme, je l'enregistre car j'aurais à l'utiliser pour des copains qui ont un fanzine afin de préserver la nature où je vit(Mercantour des promoteurs qui ont déjà ruiné la côte de Menton à St. Tropez au moins). Aussi à l'instar de cette nature qui parle dans ton texte plus que d'émotion juste un constat froid et consternant, hélas que trop juste.
journal qui fait voir le temps des arbres qui n'est pas celui des humains, cela m'étonnait de ne l'avoir vu dans aucun texte jusque là.
Le 7 septembre est triste, j'y ai vu quand même de l'espoir, si ce n'est pour la semaine prochaine(à l'échelle sylvestre) pour les mois qui suivront quitte à même devoir attendre quelques années. Bon espoir plus pour la nature que pour l'homme. En tout cas astucieux et bien écrit. 'outremangeur' terriblement bon mot pour exprimer ce que l'on peut constater de la nature et l'homme, je l'enregistre car j'aurais à l'utiliser pour des copains qui ont un fanzine afin de préserver la nature où je vit(Mercantour des promoteurs qui ont déjà ruiné la côte de Menton à St. Tropez au moins). Aussi à l'instar de cette nature qui parle dans ton texte plus que d'émotion juste un constat froid et consternant, hélas que trop juste.
Début d'année, j'avais repris et allongé ce texte pour un concours de nouvelles étudiantes (je me suis dit que j'allais bientôt basculer de l'autre côté du voile et qu'il était amplement temps!), je vous partagerai la version longue un peu plus tard dans l'année, mais s'il y a des intéressé.es je peux d'ores et déjà le faire par mp ou e-mail.
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