LesieG

avatar 06/11/2017 @ 12:53:45
Je suis d’accord qu’il pouvait, vu sa position , difficilement répondre autre chose....mais cela ne l’empêche pas de penser !!! Et ne pas voir les « capacités » est un mot un peu fort, plutôt compétences.

Et il est sûr que se serait un leurre de se croire tous égaux... attention je ne parle ni d’intelligence ni de capacité... ça n’empêche pas d’essayer d’évoluer.


Ludmilla
avatar 06/11/2017 @ 13:49:28
Il est presque "inhumain"...
Je n'ai trouvé qu'une phrase, vers la fin, où il fasse preuve de sentiments: "En vérité, à cet instant précis, [...] j'ai eu le coeur brisé"

Marvic

avatar 06/11/2017 @ 18:49:22
Oui tu as raison je crois Marvic, le majordome ne se sent pas humilié et c'est bien là où personnellement ça me gêne...car je pense qu'il y a vraiment humiliation par la façon dont on le traite, mais il ne le voit pas ou bien il se met volontairement des oeillères. A-t-il le choix ? Ça peut se discuter mais quelque part sa dignité est sans doute un cache-misère.
Je m'aperçois que, en dehors de l'opinion que l'on peut avoir pour ce genre de fonction , l'introspection du majordome dans le cadre du livre ressort beaucoup plus apparemment que dans le film et la qualité de l'écriture apporte beaucoup sur le jugement que l'on peut avoir sur lui. Dans le film tout est dans la qualité de l'interprétation pour tenter de faire ressortir ce qu'il peut ressentir. De même pour Miss Kenton. De l'importance de comparer, ou pas...C'est pourquoi j'ai voulu mettre une distance entre le film et la lecture ; le film en tout cas est remarquable.

Je n'ai pas vu le film, qui donne peut-être une vision différente du personnage. Comment l'acteur se tient-il, se comporte-t-il, influence-t-il l'opinion du spectateur...
"Nous n’avons pas tous les mêmes capacités, le majordome l’a compris, c’est un sage."

Ouh là dur dur SJB pour ce majordome ! Je suis absolument convaincue que dans un autre milieu, dans d'autres circonstances, ce majordome aurait été certainement tout aussi capable, sinon plus, que ces prétentieux qui se croient le nombril du monde ! Sinon ce fatalisme est désespérant non ?
Dans ce genre de métier, voire de position, soit on donne un coup de pied dans le tas (et on perd sa place à coup sûr mais c'est quand même un choix), soit on s'accommode en se justifiant d'une façon ou d'une autre en évoquant le respect pour son employeur, une mission...Mais les réflexions de cet homme démontre bien qu'il est intelligent et s'il a choisi de servir parce qu'il est de plus en plus conscient de sa condition par rapport à celle de ses maîtres (pas d'autres mots) il veut glorifier un peu son rôle par la dignité. La petite étincelle viendra...


Il ne manque pas d'intelligence, il n'est pas fataliste; pour moi, il a été élevé, je dirais même conditionné pour faire ce métier. Pour lui, la réussite est de servir des maîtres de plus en plus prestigieux.

Marvic

avatar 06/11/2017 @ 18:53:43

Vous êtes de la jeune génération. On aurait dû vous apprendre que nous ne sommes pas tous égaux. Si, au café du Commerce, on avait demandé à ces fins diplomates ce qu’ils pensaient du goal de Neymar contre Anderlecht, ils seraient restés le bec dans l’eau.

Certains ont la capacité de s’inquiéter des grands problèmes du monde et d’autres du football. Nous n’avons pas tous les mêmes capacités, le majordome l’a compris, c’est un sage.

Si ces fins diplomates n'auraient pas su quoi dire ou ne se seraient pas avancés à commenter les performances de Neymar, les habitués du Café du Commerce et du footballeur vedette, auraient sans problème, fourni des réponses à des problèmes diplomatiques ;-))

Saint Jean-Baptiste 07/11/2017 @ 10:24:02

Le pire passage, celui où je l'aurais bien baffé :((( : le renvoi des deux femmes de ménage à cause de leur appartenance à la communauté juive.

@LesieG
Là, je suis d’accord, le renvoi des deux servantes juives est un moment pathétique du récit.
Le majordome n’en sort pas grandi. Mais je crois que c’était la mentalité de l’époque : on ne discute pas un ordre. C’est bien aussi dans la mentalité du majordome.
Aujourd’hui il est bien établi qu’on n’exécute pas un ordre qui va contre sa conscience.
Mais, lors de sa discussion avec Miss Kenton, on a l’impression que le majordome approuve son Maître. Ou alors il est victime d’un à priori : le Maître a toujours raison ! C’est le côté obscure du personnage.


Que ceux qui n’ont pas fini ne lisent pas la suite !

A la fin du récit, il reconnaît que son maître s’est trompé. Mais il l’excuse : il dit qu’il était prêt à faire toutes les concessions pour éviter la guerre avec l’Allemagne.
C’est le côté tragique du personnage, il a toujours suivi son Maître et il se rend compte après coup que son Maître n’avait pas toujours raison...
Mais ce sont des cas archi-fréquents dans la vie.

Saint Jean-Baptiste 07/11/2017 @ 10:38:34
Et ne pas voir les « capacités » est un mot un peu fort, plutôt compétences.

Oui c’est bien vu, il s’agit de compétences et pas de capacités.
Mais je ne pense pas que ce monde soit égoïste et ne pense qu’à préserver ses privilèges. Je pense que ces aristos sont, au contraire, conscients de leur rôle et soucieux de l’avenir du monde. A leur manière, ce sont des idéalistes.

Saint Jean-Baptiste 07/11/2017 @ 10:50:24

... les habitués du Café du Commerce et du footballeur vedette, auraient sans problème, fourni des réponses à des problèmes diplomatiques ;-))
Oui, oui, bien sûr, Marvic, les habitués du Café du Commerce ne reculent devant rien.
;-))))
Mais c’est un monde qui a aussi ses conventions, tu sais : le barman n’est pas tenu au silence comme le majordome. Mais il évitera toujours de contredire celui qui parle le plus fort. Il y va de son fond de commerce...
Alors « soumission, abnégation, renoncement, humiliation… » ;-)))

Débézed

avatar 07/11/2017 @ 18:47:18
Ce bouquin a passé ses vacances sur la table de notre salon, c'est ma fille qui l'a lu.

Débézed

avatar 07/11/2017 @ 18:51:34
J'ai lu ce livre en 1997 et j'ai vu le film au moins une fois mais je crois qu c'est deux fois. Il fait partie des livres qui m'a le plus impressionné. le film est remarquable sa sobriété et son intensité.

Myrco

avatar 07/11/2017 @ 19:29:54
Un bon livre en effet mais je ne suis pas vraiment tentée par les autres livres de cet auteur, tout au moins pour le moment.

Saule

avatar 08/11/2017 @ 13:26:55
Ce livre est indéniablement un tout grand pour moi.

Comme le dit un critiqueur, il y a une dimension métaphysique et moi aussi ça me fait penser au livre de Buzzati, "Le désert des Tartares". Car finalement le majordome vit sa vie à travers sa fonction et, arrivé au soir de celle-ci, il fait le point et se rend compte (enfin c'est simplement suggéré) qu'il est passé à côté de certaines choses. Mais il n'y a rien à regretter, il faut continuer sur sa voie et faire le mieux avec ce qu'on a. Et au soir de la vie, il reste le meilleur devant nous.

Belle philosophie de vie, les personnages sont magnifiques de dignité et attachants, l'écriture est superbe car l'ambiance british et nostalgique est vraiment ressentie. Roman nostalgique sur un thème universel : cinq étoiles pour moi.

Saint Jean-Baptiste 08/11/2017 @ 17:37:24
... ça me fait penser au livre de Buzzati, "Le désert des Tartares".
Le majordome a quelque chose en commun avec le héros du Désert des Tartares, c’est vrai.
Les deux donnent un sens à leur vie dans l’accomplissement de leur "mission" et, à la fin de leur vie, ils auraient dû jouir de ce qu’on appelait avant « la satisfaction du devoir accompli ». Mais finalement, les deux ont l’impression d’être passés à côté de quelque chose.
Mais le majordome est un personnage encore beaucoup plus tragique, je trouve. Il est assez lucide pour comprendre, qu’en servant son Maître, il s’est mis au service d’une cause qui n’était pas la bonne. Et puis, il se sent le cœur brisé, comme le rappelle bien Ludmilla, en découvrant les sentiments de Miss Kenton.

Personnellement, j’ai préféré, et de loin, les Vestiges du Jour au Désert des Tartares.
Le héros des Vestiges a bien plus d’épaisseur que celui du Désert. C’est un personnage de tragédie. Et puis l’ambiance de ces Seigneuries anglaises avec ses salons feutrés, et les décors des campagnes anglaises dans le périple de Stévens en Ford et l’arrivée du nouveau riche américain qui marque la fin d’un monde…

Mais avant d’en dire plus, nous attendrons les commentaires de ceux qui n’ont encore rien dit, ou presque rien : Sissi, Darius, Lobe, Dirlandaise, Tistou, Koudoux, Ludmilla, Debezet et compagnie... on vous attend. ;-))


Septularisen

avatar 08/11/2017 @ 21:41:42
Je suis d’accord qu’il pouvait, vu sa position , difficilement répondre autre chose....mais cela ne l’empêche pas de penser !!! Et ne pas voir les « capacités » est un mot un peu fort, plutôt compétences.


Un des passages les plus prenants du livre!
Je trouve quant à moi, qu'il reste très digne et répond parfaitement dans la mesure ou effectivement les questions qui lui sont posées ne sont pas du tout de son domaine de compétences...
Qui est humilié ici? Ceux qui essayent de prouver leurs dires de toutes les façons possibles? Ou celui qui refuse de "jouer le jeu" en leur apportant une réponse qui, de toute façon, ne pourrait que les conforter dans leurs dires?

Sinon, je trouve que l'on commente beaucoup - à juste titre d'ailleurs - l'histoire, mais très peu la magnifique écriture de l'auteur et son style si unique, si facile à lire et pourtant si complexe, si recherché.
Je trouve que l'auteur réussi à nous décrire et à nous restituer à merveille l'atmosphère de l'époque, - peut-être devrais-je dire de "fin d'époque" -, dans ces grands châteaux, au milieu de ces "Lords" et ces "Sir" qui sans doute se croyaient éternels...

Rien à redire, un très grand "cru" ce Nobel 2017!...

Koudoux

avatar 09/11/2017 @ 07:54:11
Magnifique livre (idem pour le film).
Pour être un excellent majordome, il faut être un robot qui obéit à Sa Seigneurie, sans donner son propre avis en oubliant ses propres sentiments.
Ce qui lui permet , il me semble, de ne pas être perturbé par des humiliations (elle glissent sur sa cuirasse).
Mais alors, il est passé à côté de bonnes choses.
Maintenant il faut éviter de regarder dans le passé et vivre dans le présent et profiter du changement d'époque.

Lobe
avatar 09/11/2017 @ 12:09:47


Mais avant d’en dire plus, nous attendrons les commentaires de ceux qui n’ont encore rien dit, ou presque rien : Sissi, Darius, Lobe, Dirlandaise, Tistou, Koudoux, Ludmilla, Debezet et compagnie... on vous attend :-))


Je suis tout à fait escargotesque dans ma lecture, et j'avoue ne pas en faire une priorité (la dégustation de châtaignes, en revanche, pourrait en être une...) Mais j'ai bon espoir d'avancer ce we?!

Saint Jean-Baptiste 09/11/2017 @ 17:12:45


Je suis tout à fait escargotesque dans ma lecture
Allez bon , Lobe, c’est si bien dit que c’est pardonné… ;-))

Saint Jean-Baptiste 09/11/2017 @ 17:17:27

... la magnifique écriture de l'auteur et son style si unique, si facile à lire et pourtant si complexe, si recherché.

C’est exactement ça, ce style est un enchantement. C’est incroyable cette facilité de lecture pour un contenu si dense et si complexe, c’est vraiment du grand art.

"Rien à redire, un très grand "cru" ce Nobel 2017!..." (dixit Septu)

Maintenant dis-nous, Septu, nous sommes entre nous, tu as voté pour lui ?
;-))


Marvic

avatar 09/11/2017 @ 18:15:37
Lecture terminée !
Après la dignité et l'honneur, voici la troisième qualité d'un majordome, la loyauté.
Ce qui permet sans culpabiliser de licencier deux femmes de chambre exemplaires...mais juives.
(si j'osais, je dirais que cela me rappelle les "c'est lui qui m'a dit de le faire" des cours d'école)
En respectant "son code du travail", il n'a aucune décision à prendre, pas de convictions à défendre, limitant les prises de risque. Comme les gens qui s'engagent à fond dans un parti, un syndicat, un club, voire une religion, d'autres pensent à leur place, et cela peut vite devenir confortable de ne pas avoir à réfléchir, juste à obéir, à suivre les règles.

On a l'espoir que la rencontre avec Miss Kenton le fasse évoluer. Mais non, il va travailler son "badinage" pour être à la hauteur de son nouveau maître. Majordome jusqu'au bout !

Deuxième livre d'Ishiguro" après "Quand nous étions orphelins" qui ne m'a laissé aucun souvenir.
Un très beau roman, attachant, passionnant, et un réel plaisir de lire un texte aussi bien écrit.

Saule

avatar 12/11/2017 @ 11:09:25
Ce soir sur ARTE, un autre film de James Ivory avec les meme acteurs (et ensuite un reportage sur cette excellent actrice Emma Thompson)

https://arte.tv/fr/videos/…

Pieronnelle

avatar 12/11/2017 @ 15:14:50
Même s'il ne faut pas juger je trouve assez effrayante cette capacité à se décharger de toutes responsabilités lorsque le majordome se trouve à donner un avis sur ce qui ,soi-disant ne fait pas partie de ses compétences. C'est pourquoi je n'arrive pas à le trouver sympathique et n'éprouve aucune compassion pour lui. C'est clair que l'auteur décrit parfaitement ce personnage qui,quelque part représente à lui seul l'asservissement dans un rôle voire une mission attribués. Mais c'est une chose que de passer à côté d'une vie parce qu'on vous a obligé à subir un travail, et une autre que de se plonger dans l'acceptation de ce travail jusqu'à presqu'en faire un sacerdoce. Dans le dernier cas l'absence de rebellion et le refus de se poser des questions s'apparentent plutôt à de la lâcheté ; mais le milieu british et l'époque en sont hautement responsables et provoquent ce conditionnement particulier , les "servants" ayant le sentiment d'évoluer dans une classe supérieure et flattés d'avoir été choisis pour y participer...
C'est parfaitement montré dans le film et je crois que sans l'atout de la magnifique écriture de l'auteur (à vous lire mais qui se sent dans le film) cela n'aurait pu être que l'histoire banale d'un homme qui a opté pour l'obéissance à tout prix, en dehors de la patte historique qui donne une atmosphère de fin d'un monde...

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